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Après B&B et ZAAF, le calme pour Audrey Cordon-Ragot ? "Je n’avais plus envie de me battre, mais de me laisser porter"

Fabien Esvan

Mis à jour 08/04/2023 à 13:41 GMT+2

La championne est déjà à la relance. Une semaine à peine après la fin de son histoire avec la ZAAF, quelques mois après l'échec du projet B&B féminin, Audrey Cordon-Ragot a retrouvé une structure World Tour au sein de la Human Powered Health. Avant d'étrenner fièrement son maillot de championne de France sur Paris-Roubaix Femmes ce samedi, la Bretonne s'est longuement confiée à Eurosport.

L'émotion de Cordon-Ragot : "Je vais tenter de leur rendre ce qu'ils m'ont donné"

Audrey Cordon-Ragot, entre le projet avorté de la B&B et l'échec de celui de la ZAAF, les derniers mois de la championne de France n'ont pas été de tout repos…
A. C. R : C’était exténuant physiquement et moralement. Ça a été dur de garder le cap. Malgré ça, je n’ai pas lâché l’affaire. Je me suis entraînée comme si j’allais courir demain. Mon arrivée dans l’équipe Human Powered Health a été rapide. J’ai enchaîné rapidement avec les reconnaissances pour Paris-Roubaix. Je suis déjà dans l’état d’esprit de courir samedi. Je suis soulagée et heureuse.
Est-ce que l'envie d'arrêter le vélo vous a traversé l'esprit ?
A. C. R : Jamais. J’ai la chance d’être entouré par des personnes formidables. Mes amis, ma famille, mon agent, mes entraîneurs étaient là pour moi, ils m’ont fait garder le cap et la tête haute. J’ai les Jeux olympiques de Paris en fil rouge. Avoir cet objectif en tête, ça me motive tous les jours. Je n’ai jamais pensé à arrêter.
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Cordon-Ragot, très émue : "S’ils ne sont pas là, je crois que j’arrête le vélo"

Outre ces déboires sportifs, il y a aussi eu cet AVC le 11 septembre dernier. L'épisode semble derrière vous, comment vous sentez-vous ?
A. C. R : J’ai mis du temps à revenir. J’ai vraiment fait un hiver studieux dans la récupération. J’y suis allé progressivement avec moins de volume. Je pensais prendre le départ de la première course avec quelques lacunes, mais tout s’est plutôt bien enchaîné avec des top 10 sur presque toutes les courses auxquelles j’ai participé. Je ne m'y attendais pas forcément. Physiquement, j’ai bien récupéré. Aujourd’hui, je ne pense plus à ce qui s’est passé.
Comment abordez-vous ce nouveau chapitre ?
A. C. R : Je ne suis pas sûre de vraiment réaliser ce qui se passe. Je me sens libérée, en paix. C’est beaucoup d’émotions. Je suis très reconnaissante envers l’équipe de m’avoir donné sa confiance et la chance de faire une bonne saison.
Je me disais : ‘pourquoi est-ce que je dois rester dans mon canapé pendant que les autres courent ? Ce n'est pas juste’
Tout s’est passé très vite…
A. C. R : C'était intense… J'ai décidé de quitter mon équipe précédente deux jours seulement après le Tour de Normandie (ndlr, il s'est achevé le 19 mars dernier). J’étais en colère parce que lorsque je voyais ma situation et celle de mes coéquipières, je me disais : ‘pourquoi est-ce que je dois rester dans mon canapé pendant que les autres courent ? Ce n'est pas juste’. Je sentais le besoin de faire bouger les choses.
Vous avez démissionné le week-end dernier et vous ne deviez pas courir avant le 1er juin. C'est là que l'UCI intervient. Comment tout cela a-t-il pu se résoudre aussi rapidement ?
A. C. R : Les premiers échanges se sont fait via le syndicat des coureurs qui a pris la situation à bras le corps. L’UCI a été compréhensive. J’ai contacté le président David Lappartient moi-même pour lui exposer la situation. Quand il a compris, il était désolé et a poussé pour faire bouger les choses. Grâce à lui, c’est allé encore plus vite. Aujourd'hui, on est toutes libres de signer où on veut. On attendait aussi d’avoir mon exemple en jurisprudence.
Qu'est-ce qui vous a plu dans le discours de Human Powered Health ?
A. C. R : D’un point de vue sportif, c’était l’une des équipes qui me correspondait le mieux. C’est assez homogène, il n’y a pas une grande leader désignée. Ça m'arrange parce que je veux avoir ce rôle sur certaines courses cette année. C'est quelque chose que je n'aurais peut-être pas pu trouver dans une autre équipe World Tour qui a déjà une ou deux leaders. Les deux dernières fois (ndlr, avec la B&B et l'équipe ZAAF), le projet extra-sportif me plaisait. Là, j’ai d’abord pensé au projet sportif.
C’est organisé, planifié, rien n’est laissé au hasard, ça me rassure beaucoup et j'avais besoin de retrouver ça après cette période.
En France, l'équipe n'est pas forcément très connue. Pouvez-vous nous la présenter ?
A. C. R : C’est l’une des plus petites équipes World Tour. Il y a une vraie ambition à long terme de devenir l’une des cinq meilleures équipes mondiales. J’aime faire partie de ce genre de projet. Cet esprit un peu américain, c’est quelque chose que j’aime et que j’ai vécu pendant quatre ans à la Trek. C’est organisé, planifié, rien n’est laissé au hasard, ça me rassure beaucoup et j'avais besoin de retrouver ça après cette période.
C’est un contrat longue durée ou jusqu’à la fin de la saison ?
A. C. R : J’ai signé jusqu’à la fin de la saison. Ayant été échaudée deux fois d’affilée, je n’avais pas envie de me retrouver coincée. Je me laisse le temps de réfléchir, mais je ne vois pas pourquoi ça n'irait pas. On verra comment ça évolue.
Avant, j’appelais moi-même les organisateurs, j’ai donné de ma personne pour avoir un programme de courses. Je n’avais plus envie de ça.
La perspective de retrouver une équipe World Tour, c'était important ?
A. C. R : C’était vraiment le premier critère. Je n’avais plus envie de me battre, mais de me laisser porter. Avoir déjà un programme prédéfini avec une invitation assurée sur les Grands Tours, c'est quelque chose qui me sécurise. J’en avais vraiment besoin. Avant, j’appelais moi-même les organisateurs, j’ai donné de ma personne pour avoir un programme de courses. Je n’avais plus envie de ça. Je voulais être au calme pour pouvoir me focaliser sur le vélo.
Votre course de reprise, c’est Paris-Roubaix (ndlr, elle sera aussi consultante pour Eurosport sur l'épreuve messieurs le dimanche)…
A. C. R : Pour moi, c’est la plus belle Classique du monde, celle que tout le monde rêve de gagner, même les grimpeurs. J'ai la chance de participer et de porter le maillot de championne de France, c'est un rêve pour moi. Je vais avoir le maillot que les gens vont chercher à voir. Je n’avais pas envie de manquer cette opportunité. Si on m’avait dit que j’aurais participé après tout ça, je n’y aurais jamais cru.
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Il y a toujours un rêve de le gagner ?
A. C. R : Physiquement, je suis prête, mais mentalement c'est sûr qu'il s'est passé beaucoup de choses. Je veux profiter de cette chance pour appuyer très fort sur les pédales, montrer aux gens qu'il faut toujours se battre et essayer de se sortir des situations 'merdiques'. Gagner serait incroyable, mais allez… Je sais que ça va être dur. Il y a beaucoup d'obstacles et il faut avoir un peu de chance à Roubaix car les plans changent tout le temps…
Vous connaissez les victoires sur les pavés puisque vous avez contribué aux succès de Lizzie Deignan en 2021 et Elisa Longo-Borghini en 2022…
A. C. R : Je l'ai vécu comme si j'avais gagné pour être honnête. Je dis toujours : 'j'ai gagné deux fois Paris-Roubaix en tant que coéquipière'. Les deux fois, nous avons fait une course incroyable. La première était probablement plus émotionnelle parce que le temps était dramatique, cela a rendu les choses encore plus folles. J'ai aussi vu ma meilleure amie Elisa Longo Borghini gagner un an après et c'était aussi quelque chose de spécial.
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Vous avez la "tête dure", parole de Bretonne, rien ne peut vous faire flancher…
A. C. R : J’espère (rires). Si la roue tourne aussi fort qu'elle a tourné dans le négatif, ça va être une fin de saison tonitruante. Je pense avoir découvert une autre Audrey avec une vraie force mentale. Ça va être vraiment utile pour les prochains objectifs que j'ai. Je n'ai jamais rien lâché. Je ne dis pas que je n'ai jamais pleuré, que je ne me suis jamais senti mal et que je n'ai jamais voulu arrêter, mais c'était seulement deux secondes. Avoir des ambitions sur Roubaix, c’est chaud, j’ai un peu de recul par rapport à ça. Etre au départ avec mon maillot tricolore, c’est déjà un rêve.
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