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Les Français ont connu l’Enfer, reconquérir leur Reine n’en sera que plus fort

Benoît Vittek

Mis à jour 06/04/2018 à 16:53 GMT+2

PARIS - ROUBAIX - Les Français ont retrouvé la victoire sur un Monument et le podium du Tour. Peuvent-ils confirmer avec un triomphe dans l’Enfer du Nord ? Voilà 21 ans que Frédéric Guesdon a soulevé son pavé dans le vélodrome mythique de Roubaix…

1997 Paris Roubaix Frédéric Guesdon

Crédit: AFP

Tous les rendez-vous d’un jour ne se valent pas. Les Flandriens sacralisent leur Ronde ; l’Italie ouvre le bal à l’heure de la Primavera avant de le refermer quand tombent les foglie morte ; la Doyenne liégeoise toise ses cadettes du haut de ses 126 ans. Au carrefour (sans arbre) de ces Monuments, début avril, il y a l’Enfer du Nord. La Pascale, la Reine française des classiques, majestueuse de souffrances entre Paris (enfin, Compiègne) et Roubaix, son vélodrome de légende, ses douches d’un autre temps où s’affichent les noms de 21 vainqueurs bleu-blanc-rouge (pour un total de 28 victoires).
Dimanche, une trentaine de coureurs français s’élanceront devant le palais impérial de Compiègne en fin de matinée. Certains auront l’espoir de succéder à Frédéric Guesdon, qui avait soulevé le pavé en 1997. 21 ans plus tard, "Fred" ne sera pas loin, directeur sportif d’une Groupama-FDJ qui aligne en Arnaud Démare le plus solide atout français pour cette course. Les Adrien Petit et autres Florian Sénéchal sont également attendus pour refaire de Paris - Roubaix un Monument dominé par un Français.
Après le retour sur le podium du Tour de France, après la première victoire tricolore sur un Monument au XXIe siècle, après les nombreuses reconquêtes des coureurs français, “ce serait une vraie marque qu’on est remonté au très haut niveau”, juge le directeur de la course Thierry Gouvenou. “Paris - Roubaix, c’est une épreuve unique, on n’a qu’une chance par an, c’est assez limité. Et en France on n’a pas tout à fait la culture. Mais on a quand même des chances.”
Une victoire à Roubaix marque une vie à jamais
Sur les pavés, les Français peuvent parfaire leur reconquête. Et s’offrir une victoire au retentissement exceptionnel. On ne sera pas au niveau des épopées en jaune de Thomas Voeckler, feuilletons estivaux parfaitement calibrés pour emporter les coeurs français. Mais triompher de la “dure des dures”, la course qui incarne le mieux l’héroïsme des coureurs, ne serait-ce pas encore plus fort que les récents podiums trciolores sur le Tour ? Revenir dans le jeu de juillet offre un sentiment grisant et inédit pour les plus jeunes suiveurs tricolores. Mais “seule la victoire est belle”, ce n’est pas Thibaut Pinot qui dira le contraire.
"Je connais le retentissement d’une victoire à Roubaix”, appuie Thierry Gouvenou, équipier de Gilbert Duclos Lassale lors de ses deux succès du début des années 1990. "C’est quelque chose de grandiose, qui marque une vie à jamais." Avec son doublé, “Gibus” a trouvé la gloire éternelle, symbolisée par le pont portant son nom sur la route de Roubaix. À Rénazé, les repas de la famille Madiot voient trôner les pavés conquis par Marc au tournant des années 1990.
Arnaud Démare connaît bien l’histoire de son patron : "Quand Marc vous parle de Roubaix, on ne peut qu’aimer la course", disait-il encore récemment dans un reportage de Stade 2.
On célèbre alors une époque où les Français enchaînaient quatre succès en sept éditions (1991, 1992, 1993, 1997). Le Tour de France attirait déjà une attention démesurée mais les feux de juillet n’empêchent pas de briller au printemps (ah, si Sylvain Chavanel avait plus tôt rêvé de pavés plutôt que de mimosas…). Depuis, Sébastien Turgot est le seul à être monté sur le podium de Roubaix (2e en 2012). Et le succès fuit les locaux.

Une irrésistible "connerie"

La France a déjà connu plus longue pénitence dans l’Enfer du Nord. Lorsque Bernard Hinault prend le départ sur les routes picardes en 1981, il y a déjà un quart de siècle que Louison Bobet a signé un authentique exploit pour succéder à Jean Forestier et l’emporter devant Fausto Coppi.
À 26 ans, Hinault est une légende vivante de son sport, le Blaireau, un champion au caractère hors norme et au palmarès déjà impressionnant (Tour, Giro, Vuelta, Liège, Lombardie…). Mais il n’est pas amoureux de Paris-Roubaix, qui le lui rend bien. Le champion règle ses comptes avec ce “cirque” qu’il estime trop dangereux : mis à terre par un chien à 13 km de l’arrivée, il s’arrache en poursuite d’un trio royal pour signer un sprint rageur et mettre fin au règne de Francesco Moser, triple vainqueur sortant.
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1981 Paris Roubaix Bernard Hinault

Crédit: AFP

Le grand Hinault a ramené Paris - Roubaix dans l'escarcelle française. Son succès historique ne s'accompagne toujours pas d'une déclaration d'amour pour l'épreuve :
J’ai gagné, pour mon palmarès, c’est bon. Mais, je le répète, Paris - Roubaix reste une connerie.
Entre les Français et leur Reine, c’est je t’aime - moi non plus ? Le schéma est récurrent dans le cyclisme, la route punissant au moins autant qu’elle récompense ses forçats. À l’heure où les plus grandes épreuves sourissent à nouveau aux Français, Thierry Gouvenou a une certitude : “Arnaud Démare m’avait impressionné à Paris - Roubaix Espoirs (4e en 2011). Il avait déjà sa réputation de sprinteur et il avait fait preuve d’une belle résistance. Je m’étais dit : ‘Ce gars-là, il a quelque chose pour les classiques.’ Le jour où il y aura vent de dos, où ce ne sera pas trop gras… Je ne le vois pas finir sa carrière sans gagner Paris - Roubaix.”
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