TOUR D'ITALIE 2018 – Pinot, l'incroyable trou noir

Du paradis à l'enfer. L'ascenseur émotionnel vécu par Thibaut Pinot de vendredi à samedi aura été aussi terrible que sa défaillance dans l'ascension du Col Saint-Pantaléon. Un an après avoir perdu le podium lors du chrono de la dernière étape, le Français de la Groupama-FDJ voit cette fois le top 3 s'envoler à 150 kilomètres de l'arrivée d'un Giro 2018 qui en comptait 3571. Une désillusion terrible et tellement soudaine. Encore parfaitement placé aux côtés de Froome et des autres leaders un kilomètre auparavant, Pinot a explosé d'un seul coup. Et en a subi les conséquences bien après l'arrivée. Le Français a terminé sa soirée à l'hôpital, souffrant de déshydratation et de fièvre. Son abandon a été acté dans la foulée.

Accompagné de tous ses équipiers restants, le Français a rapidement coulé, sans explication. A cet instant, le staff même de la Groupama-FDJ peinait à comprendre les raisons de la défaillance de son leader, au lendemain d'un bon jour vers Jaffereau. "Non, il n'y a pas vraiment de raisons, expliquait alors Martial Gayant, directeur sportif sous le choc. C'est une défaillance, rien d'autre. Une grosse défaillance. C'est très dur à vivre, alors qu'on était près d'un podium, à la veille de l'arrivée. Ça fait mal". On a un temps pensé à un coup de chaud, le voyant en train de chercher à s'hydrater et à se rafraichir, faisant même preuve d'un manque de force et de lucidité qui l'empêchait de récupérer le bidon tendu par sa voiture.

Si Pinot n'a jamais pensé à l'abandon, se battant un temps pour tenter de limiter la casse, le Français ne s'est jamais refait. Il a même coulé de plus en plus, rattrapé même au pied de Cervinia par le gruppetto où se trouvait également les deux "favoris" à la rue de cette fin de Tour d'Italie, Simon Yates et Esteban Chaves, mais aussi les sprinteurs comme Elia Viviani (Quick Step-Floors). Jamais lâché par ses équipiers, le Français a rallié l'arrivée dans ce groupe, finissant à 45'32'' du vainqueur du jour, Mikel Nieve. Si cette déconfiture ne le prive même pas du top 20 (16e), difficile d'y trouver un quelconque réconfort. Mais Pinot a-t-il vraiment été surpris ?

Si Martial Gayant l'était, Jérémy Roy s'attendait à un tel scénario ce samedi, le craignait tout du moins. Le compagnon de chambrée de Thibaut Pinot a raconté à l'arrivée de Cervinia que le leader de la formation française n'était pas à 100% depuis quelque temps : "On savait Pinot souffrant depuis quelques jours, a expliqué Roy. La nuit a été terrible, j'avais un mauvais pressentiment et ça s'est vérifié. Il a déjà franchi ses limites depuis plusieurs jours mais on ne peut pas franchir ses limites jour après jour. Aujourd'hui, il était vraiment à l'agonie. On est resté avec lui pour finir l'étape mais c'était une galère". Après Esteban Chaves, après Fabio Aru, après Simon Yates, c'est donc un quatrième cador qui a tout perdu sur une grosse défaillance. Dur.