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Tour de France femmes : Ashleigh Moolman Pasio, une cycliste qui veut se dépasser pour l’Afrique

Benoît Vittek

Mis à jour 29/07/2023 à 15:15 GMT+2

Septuple championne d'Afrique, Ashleigh Moolman Pasio (AG Insurance-Soudal Quick-Step) veut se servir de son rayonnement international pour aider les femmes de son continent à s'émanciper sur deux roues. "Elles ont tellement d'obstacles à surmonter, mais j'essaye de les aider petit à petit", explique celle qui occupe la 2e place du classement général du Tour avant la bataille du Tourmalet.

Moolman Pasio sur le Tour de France Femmes 2023

Crédit: Imago

Jusqu’ici, tout va très bien pour Ashleigh Moolman Pasio. Un an après sa cruelle désillusion dans l’étape reine du Tour de France Femmes 2022, où elle a perdu tout espoir de triomphe au classement général à cause d’un virus stomacal, l’étoile sud-africaine aborde le week-end décisif de l’édition 2023 dans une position idéale. Les cols d’Aspin et du Tourmalet se détachent à l’horizon, et la leader de l’équipe AG Insurance-Soudal Quick-Step est même en “pole position” parmi les favorites, qu’elle devance toutes dans le sillage jaune de Lotte Kopecky (SD Worx).
"J’ai l’impression d’avoir des comptes à régler avec le Tour", expliquait début juillet l’ingénieure de formation, qui s’est mise tardivement au cyclisme, mais a rapidement vibré pour le pur grimpeur Alberto Contador ("je m’identifiais à son style") et pour ses compatriotes Robbie Hunter (premier vainqueur d’étape africain sur le Tour) et Daryl Impey (premier porteur du maillot jaune) : "Voir l’Afrique, et l’Afrique du Sud, aussi performantes sur la scène internationale, c’était vraiment inspirant."
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Après avoir longtemps cru qu’elle n’aurait jamais la chance de disputer le Tour, à son tour de briller sur la plus grande épreuve cycliste au monde, pour mieux inspirer les cyclistes de demain. "C’est une grande responsabilité d’être une ambassadrice pour un continent comme l’Afrique", nous confie la septuple championne continentale. "Beaucoup de femmes, surtout en Éthiopie ou en Érythrée, au Rwanda aussi, m’envoient des messages et me demandent : ‘Comment devenir une athlète professionnelle ?’ C’est un vrai défi parce qu’elles ont tellement de barrières à surmonter."
On se retrouve toutes les semaines sur Zwift
"Pour commencer, il y a des barrières culturelles", explique la Sud-Africaine relocalisée à Gérone, dans le nord de l’Espagne. "Ce n’est pas commun pour une femme africaine de voyager à travers le monde, de faire de grandes choses, d’incarner une forme de puissance. Et il faut franchir la barrière des visas pour venir en Europe, et tellement, tellement, tellement d’autres obstacles… Alors j’essaye de travailler sur ces questions, petit à petit."
La pandémie, avec ses restrictions de déplacements, l’a poussée à s’intéresser au cyclisme en ligne. "J’ai compris tout le potentiel du monde virtuel pour réunir des personnes du monde entier", explique celle qui est devenue en 2020 la première championne du monde de cyclisme esports. Surtout, la Sud-Africaine a développé le collectif Rocacorba, "une communauté virtuelle dont l’objectif est d’aider les femmes à gagner de l’autonomie. On se retrouve toutes les semaines sur Zwift pour les aider à prendre confiance en elle. Les hommes sont également les bienvenus, et on discute, on parle de nos expériences, pour s’inspirer et se motiver les un(e)s les autres."
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Moolman Pasio sur le Tour de France Femmes 2023

Crédit: Imago

La pratique sportive et l’exemple offert par une championne permettent d’élargir les horizons, surtout lorsqu’on parle de la bicyclette, qui est aussi un moyen de transport. C’est le principe même de l’association Qhubeka, dont Moolman Pasio est également ambassadrice. L’ONG revendique 110.000 dons de vélos pour faciliter l’accès à l’éducation d’enfants sud-africains. Cette année, le Tour et le Tour Femmes ont financé 1.500 dons, dont une partie exclusivement réservée à de jeunes filles. Certaines deviendront peut-être des championnes. Mais le premier objectif est d’améliorer leurs conditions de vie et élargir leurs horizons sur deux roues.

"Je pensais que je devais prendre ma retraite"

La prochaine étape pour Moolman Pasio est de "créer des centres esports en Afrique, dans des communautés défavorisées. Je veux utiliser des containers et y installer des vélos connectés." Premier site d’implantation : Khayelitsha, un township de la métropole du Cap, une des trois capitales de l’Afrique du Sud avec Pretoria et Bloemfontein. Les conditions de vie s’y améliorent ces dernières années mais restent marquées par la pauvreté et la violence. Moolman Pasio s’est associée à un magasin de cycles local, Khaltsha, pour ce premier projet, qu’elle espère reproduire "dans d’autres parties de l’Afrique".
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"Les femmes pourront y apprendre à rouler, mais aussi apprendre ce que c’est que de suivre un plan d’entraînement", poursuit la championne, vainqueure du Tour de Romandie fin 2022 après avoir digéré son échec sur le Tour. "Ma communauté m’a aidé à surmonter la déception", sourit-elle. "Je les ai rejointes sur Zwift et elles m’ont rappelé que peu importe mes résultats sur le Tour, je restais leur leader et leur reine de la montagne. C’est ce qui m’a permis de rebondir et de me rappeler que j’étais capable de battre les toutes meilleures sur un col."
À l’aube de son 37e anniversaire, ce Tour de Romandie aurait dû être sa dernière course professionnelle… Mais la Sud-Africaine a rejoint la nouvelle structure AG Insurance-Soudal Quick-Step pour la saison 2023, et elle vient de signer un nouveau contrat pour une année supplémentaire, en vue des Jeux 2024. "Je pensais que je devais prendre ma retraite pour pouvoir mieux m’investir dans mes activités et mon collectif mais je me suis prouvé que j’étais capable de faire plus d’une chose à la fois", se félicite la championne aux multiples casquettes. Samedi, elle sera concentrée sur la conquête du Tourmalet. "Mais j’ai de bonnes raisons de me faire mal", sourit-elle.
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