Saunier Duval, plein gaz

La montagne, ça les gagne. Qu'elle soit moyenne, haute ou très haute. Jusqu'à présent, dès que la pente s'est élevée, l'équipe Saunier Duval a tout raflé sur ce Tour 2008. Après les succès de Riccardo Ricco à Super-Besse (première arrivée au sommet) et à Bagnères-de-Bigorre (première étape pyrénéenne), Leonardo Piepoli a pris le relais en s'imposant à Hautacam... devant le troisième larron de la maison jaune, Juan Jose Cobo. Un triomphe total.

La suprématie montagneuse de Saunier Duval a pris une dimension supplémentaire en ce 14 juillet. Jusqu'ici, elle résidait dans les seules jambes, certes de feu, de Ricco. Désormais, la menace est triple. Forcément, ça va commencer à jaser dans les salles de rédaction. Vincent Lavenu préfère rester calme. "Dès qu'une équipe domine en montagne de cette manière, on peut commencer à se poser des questions. Mais je me garderai bien de les poser. Sincèrement, je n'ai rien vu d'énorme à Hautacam, pas plus que la veille. Il n'y a pas eu un mec qui a tout écrasé. Les écarts sont faibles", constate le manager de l'équipe AG2R.

Mais on peut se demander où s'arrêteront les hommes de Pietro Algeri. Leonardo Piepoli, lui, ironise: "Sur le Giro, on disait qu'on avait une équipe de merde qui n'aidait pas Ricco. Là, Ricco, Cobo et moi sommes bien alors on dit qu'on a une grande équipe. Dans les deux cas, je crois qu'il y a de l'exagération. On reste une petite équipe. C'est comme en football. En Serie A, le Milan et la Juve sont toujours là, mais de temps en temps, le Chievo arrive et bouleverse l'ordre établi. C'est ce que nous faisons sur ce Tour de France." Pas question, donc, de parler d'invincible armada. Saunier Duval veut la jouer modeste.

Après tout, Riccardo Ricco, si étincelant la veille, a nettement calé, ce qui, d'une certaine manière, est rassurant. "J'ai fait beaucoup d'efforts pour gagner à Bagnères-de-Bigorre et je n'avais pas de supers jambes aujourd'hui. Je l'ai dit à Leonardo. Il valait mieux qu'il prenne la course en mains avec Cobo", confie le Cobra, qui ne mentait donc pas quand il assurait souhaiter la victoire de Piepoli à Hautacam. Piepoli et Cobo, comme Ricco lors de ses deux succès, ont également profité d'une certaine marge de manoeuvre, du fait de leur éloignement des premières places au classement général.

A la sortie des Pyrénées, la Saunier Duval a replacé deux de ses hommes dans le Top 10, et elle possède en Ricco un lance-flammes susceptible d'incendier le Tour à tout moment dans les Alpes. Mais le mieux placé du trio est aussi le moins médiatique et le seul à ne pas avoir encore gagné, en l'occurrence Cobo, désormais huitième. Piepoli en fait d'ailleurs le véritable leader de la formation espagnole. "Pour le général, notre homme fort, c'est Cobo. L'année passée, il a perdu 20 minutes dans l'étape du Plateau de Beille parce qu'il n'était pas bien. Sans ça, il finissait dans les cinq premiers à Paris", rappelle le vétéran italien.

Seule certitude à ce jour, quoi qu'il advienne d'ici le 27 juillet, l'équipe Saunier Duval n'aura pas perdu son temps sur ce Tour 2008, qui constitue d'ores et déjà une grande réussite. "Nous avons gagné trois étapes, nous avons le maillot à pois, c'est super" , sourit encore Piepoli. A l'instar de la CSC, mais dans un registre différent, la formation ibérique a mis sa patte sur la course. Mais Piepoli ne croit pas à un destin doré. "Nous ne pouvons pas gagner le Tour, affirme-t-il clairement. Nous ne sommes pas là pour ça de toute façon. Pour y parvenir, il aurait fallu creuser de gros écarts en montagne, ce que nous n'avons pas fait. Mais nous sommes déjà contents." Le contraire serait difficilement compréhensible...