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Thomas Voeckler, clap de fin pour un monsieur du Tour

Laurent Vergne

Mis à jour 25/07/2017 à 14:20 GMT+2

TOUR DE FRANCE – Thomas Voeckler a mis fin à son Tour, sa saison et sa carrière dimanche sur les Champs-Elysées. A 38 ans, l'Alsacien tenait symboliquement à s'arrêter sur la Grande Boucle, cette épreuve qui a forgé sa carrière, lui a tant donné et à laquelle il a beaucoup rendu.

Thomas Voeckler

Crédit: Getty Images

Loin de ses grandes années et de ses jours de gloire, Thomas Voeckler a bouclé dimanche son 15e et dernier Tour de France, à la 85e place du classement final. Sans victoire d'étape, maillot distinctif ni coup d'éclat. Mais l'essentiel était sans doute ailleurs pour le coureur français le plus emblématique de ces 15 dernières années, qui a décidé de mettre un terme à sa carrière ici, aux Champs-Elysées. Logique. Le Tour, c'est la course qui a fait Voeckler. A Paris dimanche, à Marseille la veille où le Vélodrome l'avait acclamé, et un peu partout, l'Alsacien, qui ne voulait pas de tournée d'adieux, a reçu des marques de respect et d'affection.
Quatre mois après Tom Boonen à Roubaix, Voeckler raccroche donc en pleine saison, à l'issue du Tour. S'il n'a évidemment pas le palmarès du Flamand sur la Reine des classiques, Voeckler n'en a pas moins été un personnage du Tour. D'où l'analogie avancée par Christian Prudhomme. "En s'arrêtant ici, il rend formidablement hommage au Tour, souligne le patron de l'épreuve. Comme Tom Boonen avec Paris-Roubaix. Il y a une vraie logique. La course de référence, c’est pour l’un Paris-Roubaix, pour l’autre le Tour de France. Et c’est une manière pour eux de dire : 'Merci'."
Pas besoin de gagner le Tour pour le marquer profondément. La preuve avec ces hommes. (Infographie par Clovis Museux - Twitter : @Sivolc)
Bon partout et excellent nulle part
Si Voeckler peut dire merci au Tour, celui-ci n'est pas non plus indifférent à cette révérence. "Un coureur qui bouscule la course comme Voerckler l'a fait, c'est une très bonne nouvelle pour l'organisateur", admet Prudhomme. Vainqueurs de plusieurs étapes, maillot à pois, porteur du maillot jaune pendant 20 jours et 4e de l'édition 2011, sans doute la plus belle du passé récent, "Ti Blanc" a su se faire une place. Le tout sans être un crack, ni un grand sprinter à la Cavendish pour compiler les victoires d'étapes, ou un super rouleur à la Cancellara pour capitaliser sur prologues et chronos afin de se parer de jaune.
"Bon partout et excellent nulle part", comme il se définit, Voeckler ne possédait a priori aucune des caractéristiques qui façonnent les destins glorieux sur une course comme le Tour de France. Mais c'est dans une autre définition de lui-même qu'il faut trouver les raisons de ses succès de juillet : "Ne pas avoir de complexe sans se prendre pour ce qu'on n'est pas, ça me ressemble bien". Voeckler n'était pas un rêveur. Même pendant le Tour 2011, il ne s'est jamais imaginé en triomphateur sur les Champs-Elysées. Mais il a obligé les autres, les Evans, les Schleck, les Contador, les grands noms, quoi, à aller le chercher.
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Thomas Voeckler au Galibier, en 2011.

Crédit: Getty Images

Le Plateau de Beille au cœur de son tiercé

Quand on lui demande d'évoquer ses trois plus grands souvenirs du Tour, Thomas Voeckler n'hésite pas. Il cite, dans l'ordre, "le Plateau de Beille 2011", le Plateau de Beille 2004 et l'échappée vers Saint-Flour en 2011". Le premier restera comme "le pic d'excellence de sa carrière", comme le dit Jean-René Bernaudeau. JR le Vendéen, le manager de toujours, de Brioches La Boulangère à Direct Energie en passant par Bouygues et Europcar. Mais Bernaudeau, qui fonctionne d'abord à l'émotion, garde un attachement particulier pour la montée du Plateau de Beille en 2004, quand Voeckler avait sauvé son maillot pour une vingtaine de secondes face à l'ogre Lance Armstrong.
Le Plateau de Beille 2004, c'est au-dessus de tout. Pleurer de joie comme ça, pour un type qui dirige une entreprise comme moi… En 2011, ce n'est pas que je m'étais habitué, mais c'était différent. Moins dans l'émotion. Surtout, 2004, j'ai vécu la montée à côté de lui, dans la voiture. Pour moi, rien ne dépasse ça. Ça n'a pas d'équivalent. Je suis discret, je vis les exploits de mes coureurs en versant une larme avec mes proches, mais c'est mon jardin secret.
De Voeckler, Bernaudeau a aimé le coureur et "sa science unique de la course". Il en a admiré le caractère, aussi. "C'était un patron, assure JRB. Il y a des leaders, et il y a des leaders-patrons. Les leaders, ils le sont parce qu'ils sont les meilleurs coureurs de leur équipe. Le patron, lui, est en plus un taulier, un capitaine, avec les épaules pour diriger un groupe."

Bernaudeau : "Thomas Voeckler, il fait partie de ma vie"

Mais plus que tout, Bernaudeau a aimé l'homme. "En Thomas, j'ai découvert une jeune instruit, cultivé, une tête bien pleine, poursuit-il. Thomas Voeckler, il fait partie de ma vie. Les émotions qu'il m'a procurées, ça ne s'achète pas. C'est ce qu'il faut mettre en valeur dans le sport. Ce n'est pas l'argent. Ça n'a pas de valeur l'argent. Quand on forme des coureurs comme moi, on espère tomber sur une perle rare. Avec Thomas, je l'ai eue."
Si l'histoire des équipes de Bernaudeau ne se résume pas à Voeckler (coucou à Chavanel, Fédrigo, Rolland et bien d'autres), le tandem Voeckler-Bernaudeau n'en reste pas moins le grand fil conducteur. Une aventure humaine, le destin commun de deux forts caractères, deux types pas toujours commodes mais d'une fidélité rare. "Notre équipe n'a jamais été trop aimée, juge l'homme aux 20 maillots jaune. Jean-René tenait des propos qui, parfois, dénotaient un petit peu dans le milieu très consensuel du cyclisme, et moi je ne suis pas réputé pour avoir ma langue dans ma poche. On n'était pas forcément les plus aimés mais on s'en foutait, on faisait notre truc."
Leur truc les a menés sur des hauteurs communes que ni l'un ni l'autre n'auraient imaginé voilà 15 ans. Mais Thomas Voeckler n'est pas nostalgique. "Je mesure ce qui a été fait, je suis fier de beaucoup de choses mais, en même temps je ne suis pas du genre à trop vivre avec le passé ou à passer mon temps à me féliciter de ce que j'ai pu faire." A 38 ans, il pense déjà à la suite. Il aime trop le vélo pour le quitter complètement, ne cache pas son attirance pour les médias et spécialement le métier de consultant, dans lequel il a sans doute tout pour s'épanouir. "Il trouvera une autre façon d'honorer le cyclisme", conclut Christian Prudhomme. Personne n'en doute.
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