Eurosport
Les débats du Tour : Qui osera bouger dès le Tourmalet ?
Par
Publié 26/07/2018 à 20:21 GMT+2
TOUR DE FRANCE - Chaque jour, trois questions sont posées à des membres de la rédaction. Chacun donne son point de vue et vous invite à prendre part à la discussion. Au menu jeudi : Arnaud Démare et l'étape de vendredi, dernier grand rendez-vous en montagne.
Tour de France: Col du Tourmalet
Crédit: AFP
Démare est-il le grand favori pour les Champs ?
A mon sens, oui. Avant même son succès à Pau, il représentait pour moi la valeur la plus sûre en cas d'arrivée massive pour deux raisons : touché, Sagan n'est pas à 100% et je doute qu'il le redevienne d'ici Paris, surtout avec les passages sur les (légers) pavés parisiens. Ensuite, un Démare en confiance est sans doute le plus fort parmi les sprinters restants.
Bien sûr, le Français est loin d'être assuré de s'y imposer, un sprint sur le Tour n'est jamais gagné d'avance et tous les bolides restants (Alexander Kristoff, Christophe Laporte, Edvald Boasson Hagen, John Degenkolb) peuvent y croire sur la plus belle avenue du monde. Mais, avec une équipe entièrement à son service et désormais bien rodée, avec sa puissance et la confiance acquise ce jeudi, Démare risque bien d'avoir la grosse pancarte dimanche.
Au moins par défaut, oui. Parce qu'il a remporté le dernier sprint en date avant celui des Champs-Elysées. Parce que Peter Sagan parait bien rouillé après sa chute. Parce qu'il ne reste pas quarante sprinters de son niveau non plus. Parce qu'il aura a priori, sous réserve de tout aléa d'ici dimanche (délais, chute, maladie), une dynamique très favorable après sa libération paloise.
Pour tout ceci, Arnaud Démare a toutes les raisons de croire en son étoile. Attention, quand même. A Pau, il a été remarquablement emmené par la Groupama-FDJ, qui l'a lâché au tout dernier moment. Il aura sans doute besoin d'être tout aussi bien épaulé dimanche. Et Sagan ira peut-être mieux, d'ici là. Le Slovaque a trois jours pour se requinquer et se remettre de ses courbatures.
Qui osera bouger dès le Tourmalet ?
J'en parlais déjà mercredi mais Quintana a tout de l'animateur de l'étape de vendredi. Revenu en forme dans cette 3e semaine, le Colombien a déjà sauvé son Tour avec une victoire d'étape et ni lui, ni son équipe ne peuvent se satisfaire d'un top 5 au général. C'est pour cela que Quintana a tout du grimpeur capable de jouer cette étape à quitte ou double.
Positionné à 3'30'' de Thomas, le Colombien est sans doute trop loin pour que Thomas bondisse de suite dans sa roue s'il venait à démarrer dans le Tourmalet, un col qui convient parfaitement aux qualités du grimpeur de la Movistar. Bien sûr, cela nécessiterait aussi une attaque d'envergue des hommes d'Eusebio Unzué, ce dont ils ont déjà montré qu'ils en étaient capables.
Elle a beau être très "historique" cette dernière étape de montagne, avec l'enchaînement des cols d'Aspin, du Tourmalet et d'Aubisque, je crains que son profil ne soit assez mal fichu. L'Aubisque, d'abord : via le marchepied du Soulor, il est certes interminable, mais aussi assez roulant par ce versant, notamment dans sa partie finale. Quintana, mercredi, avait souligné à quel point le col de Portet était taillé pour les purs grimpeurs comme lui. Ce ne sera pas le cas vendredi.
Du coup, attaquer dès le Tourmalet pourrait faire sens. Sauf que le sommet du vénérable géant des Pyrénées est situé à plus de 90 kilomètres de l'arrivée à Laruns. Il faudrait donc trouver quelqu'un prêt à partir à près de 100 kilomètres du but. Or les positions étant très serrées au classement général, qu'il s'agisse de la course au podium ou même pour une place dans le Top 5, qui sera prêt à une telle offensive au risque de tout perdre ? Un audacieux, un grand fou. A-t-on quelqu'un qui correspond à ce profil ? Je ne n'en suis pas convaincu.
Combien Dumoulin doit-il reprendre à Thomas pour rêver samedi ?
Au minimum 30 secondes. Déjà pour reprendre un petit ascendant psychologique sur le Gallois, qui serait alors encore un peu plus sous pression au moment de défendre son maillot jaune sur les routes basques. Surtout, il ne se retrouverait plus qu'avec une avance de 1'30'' sur Tom Dumoulin avant le chrono. Sur le papier, ça paraît énorme. Et pourtant…
Un chrono de fin de Tour est difficilement comparable mais, si l'on se fie aux trois principaux succès dans l'exercice de Dumoulin (Mondiaux 2017, Giro 2017 et 13e étape du Tour 2016), on s'aperçoit quand même que Thomas a encore de quoi s'inquiéter. Quand le Néerlandais est irrésistible, il l'est vraiment. En 2016, il colle par exemple 2'00'' à Thomas (qui ne défendait pas un maillot jaune non plus), 49'' au Gallois sur le Giro avant de repousser Roglic à 57'' sur les Mondiaux. Autant dire que dans un grand jour, pour peu que Thomas fatigue légèrement, Dumoulin peut lui reprendre 1'30''. Reste à se rapprocher un peu d'ici samedi.
Tom Dumoulin est à deux minutes (1'59", pour être très précis) de Geraint Thomas. Raisonnons par tranche : s'il perd du temps, ne reprend rien ou moins de 30 secondes, je ne le vois pas déposséder Thomas du maillot jaune samedi. Il devrait alors combler plus d'une minute trente sur le Gallois dans le contre-la-montre. Même s'il est le meilleur rouleur du monde, ce serait sans doute trop, le coureur de la Sky n'étant pas manchot non plus dans cet exercice.
Si le Néerlandais parvient à combler entre 25 et 50% de son déficit, il abordera le chrono avec un débours compris entre une minute et une minute trente. Une différence tout sauf anodine. Pour moi, la minute est la barrière minimale que Dumoulin doit se fixer. S'il comble la moitié de son handicap, il sera galvanisé et Thomas fragilisé. Le contre-la-montre est long de 31 kilomètres. Deux secondes par borne, ce ne serait pas simple, mais pas inimaginable non plus. Enfin, si, vendredi soir à Laruns, le vainqueur du Giro 2017 est revenue à 30-40 secondes de Thomas, il sera à mes yeux le nouveau favori du Tour. Mais cette hypothèse réclame quand même un authentique exploit de sa part vendredi...
/origin-imgresizer.eurosport.com/2018/07/19/2375584-49410450-2560-1440.jpg)
Tom Dumoulin
Crédit: Imago
Sur le même sujet
Publicité
Publicité