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Les débats du Tour : Pinot aurait-il dû attaquer plus tôt ?

Eurosport
ParEurosport

Mis à jour 21/07/2019 à 09:45 GMT+2

TOUR DE FRANCE - Chaque jour, trois questions sont posées à des membres de la rédaction. Chacun donne son point de vue et vous invite à prendre part à la discussion. On s'intéresse cette fois à la tactique des Movistar et de Pinot tout en se projetant sur la suite du Tour du duo Kruijswijk-Buchmann.

Pinot aurait-il dû attaquer plus tôt ?

  • Jean-Baptiste Duluc
En attaquant à 200m de l'arrivée, Thibaut Pinot est allé décrocher l'une des plus belles victoires de sa carrière, au sommet d'un mythe comme le Tourmalet. C'était d'ailleurs l'objectif de l'équipe Groupama-FDJ samedi et il faut saluer cette réussite. Mais, à la vue des jambes du Français et celles de ses adversaires, Geraint Thomas en tête, il y a quand même matière à avoir quelques regrets.
On ne parle pas non plus de le voir attaquer à 5km de l'arrivée, ce qui aurait clairement été prématuré au vu de la présence de deux équipiers de Steven Kruijswijk (Bennett, De Plus). Mais le voir passer à l'offensive sous la flamme rouge, ou même à 800m de la ligne, lui aurait clairement permis de creuser plus d'écarts. Thomas aurait pu être repoussé au-delà de la minute. Personne, à l'exception peut-être d'Alaphilippe, n'était en mesure de suivre le Franc-Comtois. C'est dommage de ne pas en avoir plus profité et il pourrait le regretter dans une semaine.
  • Simon Farvacque
Si Thibaut Pinot échoue à une dizaine de secondes du podium, voire de sa plus haute marche, dans huit jours sur les Champs Elysées, il repensera peut-être à sa victoire au Tourmalet avec une pointe d'amertume. Le leader de la Groupama-FDJ ne s'en est pas caché : il jouait l'étape, samedi. En ce sens, il a couru juste. Mais aurait-il pu réaliser une meilleure opération au classement général en se concentrant sur la lutte pour le maillot jaune ? C'est une possibilité, que son aisance dans le final suggère. Mais impossible à mon sens de se montrer péremptoire à ce sujet.
Pinot a décroché tout le monde sur une accélération progressive, débutée à 300 mètres du sommet. Attaquer peu après la flamme rouge, par exemple, aurait demandé un effort différent. Et si tout le monde n'avait pas explosé dans sa roue, ne serait-ce que si un coureur avait réussi à le suivre, cela aurait pu entraîner quelques secondes de tergiversation.
Je trouve que l'on a parfois trop tendance à transposer dans nos esprits une attaque victorieuse à un moment donné, en une offensive qui l'aurait été à un autre instant. Pinot a peut-être manqué une belle occasion… mais ce "peut-être" n'est pas à négliger alors que son succès magnifique en est dénué.

La Movistar a-t-elle fait n'importe quoi ?

  • Jean-Baptiste Duluc
Ce n'est pas la Movistar qui a fait n'importe quoi sur la route du Tourmalet, mais bien Nairo Quintana. La formation espagnole, comme on pouvait s'y attendre, a pris les choses en main très tôt dans la course, dans l'ascension du Soulor, pour faire mal aux autres favoris et créer une première sélection. Cela a fonctionné avec les pertes de Romain Bardet, Adam Yates ou encore Dan Martin (le Britannique a été lâché dans le Tourmalet), qui n'ont pas su tenir le tempo imposé par Andrey Amador et Marc Soler. Bref, une tactique d'équipe dominante qui veut faire mal à ses adversaires. Mais c'était sans compter Quintana. Tombé mercredi, le Colombien a visiblement du mal à se remettre de cette chute. Après un chrono décevant vendredi, il a lâché prise très tôt dans le Tourmalet, alors même que la Movistar continuait de durcir.
Le problème, c'est que Quintana a agi avec ses équipiers/leaders comme s'il était bien, alors que l'on a vite vu que ce n'était pas le cas et que lui même devait le savoir depuis un moment. Ce n'est pas un hasard s'il a longtemps musardé en queue de groupe alors que Movistar roulait. L'attitude du Colombien a d'ailleurs passablement énervé Alejandro Valverde. "Nairo n'était pas à son meilleur mais nous ne le savions pas non plus. Il ne nous avait rien dit", a glissé le champion du monde après l'étape.
Et la Movistar a alors été obligé de relever Soler, qui roulait alors, et s'est retrouvé à jouer l'étape avec Valverde et Landa qui ont fait ce qu'ils pouvaient. Et il n'a pas manqué grand-chose à Landa pour jouer la gagne. Quelques trois cents mètres environ et un peu de jambes. Difficile de parler de débâcle. En revanche, pour ce qui est de Quintana et son esprit d'équipe …
  • Simon Farvacque
La tactique de la Movistar a été mauvaise à mon sens. L'hypothèse d'une course correcte seulement gâchée par la méforme de Nairo Quintana me paraît difficilement recevable. Comme l'a précisé Jean-Baptiste, le Colombien avait déjà montré qu'il n'était pas dans la forme de sa vie vendredi lors du chrono. Et au-delà des indices disséminés par son "leader", la formation espagnole est, aussi, responsable du manque de communication qui semble avoir débouché sur cette situation d'échec.
Enfin, Mikel Landa (6e de l'étape à 14" de Pinot) n'a certes pas sombré dans des proportions similaires à celles de Quintana (17e à 3'24"). Loin s'en faut. Mais il n'a pas non plus réussi à mettre en difficulté Pinot, Alaphilippe, Bernal and co. Il a gagné sept places au classement général, mais il reste aux portes du Top 10 dans celui-ci (11e), deux rangs derrière son coéquipier, Alejandro Valverde, et à plus de six minutes du maillot jaune (6'14"). Finalement, la stratégie de Movistar a surtout été payante pour le spectacle. Ce n'est pas rien. Mais ce n'était sans doute pas le but.
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Alejandro Valverde (Movistar) dans la roue de ses équipiers, Marc Soler et Andrey Amador, lors de la 14e étape du Tour de France 2019

Crédit: Getty Images

Entre Kruijswijk et Buchmann, qui est le plus dangereux ?

  • Simon Farvacque
Steven Kruijswijk et Emanuel Buchmann ne font pas beaucoup de bruit. Et pourtant, ils occupent respectivement le troisième et le cinquième rang du classement général du Tour de France après 14 étapes. Selon moi, le Néerlandais de la formation Jumbo-Visma est le plus à même de viser la victoire à Paris. L'expérience plaide en effet pour Kruijswijk, 32 ans et déjà plusieurs "Top 5" en Grand Tour, dont une cinquième place lors de la dernière Grande Boucle, face à Buchmann (26 ans), qui n'a jamais fait mieux que 12e de la Vuelta, l'an passé, sur une course de trois semaines.
Le classement, aussi, est favorable à "SK", qui compte près d'une minute d'avance sur le grimpeur de la Bora-Hansgrohe (58"). Si on ajoute à cela le bon chrono qu'il a réalisé vendredi (34 secondes de mieux que Buchmann) et la surpuissance de son équipe, en surnombre à trois kilomètres du sommet du Tourmalet, Kruijswijk paraît s'imposer comme bien plus menaçant, dans ce duel d'hommes de l'ombre. Mais c'est peut-être ça, la chance de Buchmann. Au jeu du plus dangereux des discrets, l'Allemand a pour avantage de l'être encore plus. Et dans ce Tour qui tord pour l'instant le cou aux a priori, c'est peut-être son plus bel atout.
  • Jean-Baptiste Duluc
Comme l'a dit Simon, les deux hommes sont respectivement 3e (Kruijswijk) et 5e (Buchmann) du général et sont donc des candidats très sérieux dans la course à la victoire finale. Sur les pentes du Tourmalet, ils étaient bien présents parmi les meilleurs et n'ont été séparés que de deux secondes. Pour autant, le Néerlandais est bien le plus à même d'au minimum monter sur le podium à Paris. Déjà, l'expérience de Kruiswijk (5e du Tour et 4e de la Vuelta 2018, 4e du Giro 2016 notamment) lui offre un avantage considérable sur le grimpeur allemand, qui ne compte qu'une 12e place sur la dernière Vuelta. Mais même celle-ci témoigne d'un avantage clair pour le Néerlandais.
Après 12 étapes, Kruijswijk était 10e du classement général tandis qu'Emanuel Buchmann était 7e. Mais quand le grimpeur de la Bora-Hansgrohe a souffert en troisième semaine, le Néerlandais a élevé son niveau. Une des constantes sur les grands Tours de la part de "SK", excepté ses malheurs du Giro 2016 bien sûr. Et un sacré avantage quand on aborde celle-ci en étant déjà sur le podium et avec une équipe plus solide en montagne (il pouvait encore compter sur De Plus et Bennett à 3km de l'arrivée). Sauf chute, je serais même très surpris qu'il ne soit pas sur le podium à Paris.
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