Tadej Pogacar remporte le dernier Monument de 2023, la dernière course de Thibaut Pinot

Et de un, et de deux, et de trois Lombardie pour Pogi. Sans être au-dessus du lot, Tadej Pogacar (UAE Emirates) a piégé la concurrence pour s’adjuger un troisième Tour de Lombardie d’affilée, performance que seuls Fausto Coppi et Alfredo Binda ont réalisé dans l’histoire. Incapable de forcer la décision en montée, le Slovène a fait la différence dans la descente du Passo di Ganda, avant de rallier l’arrivée sur les hauteurs de Bergame en solitaire samedi.

Longtemps à la limite, Primoz Roglic a conclu son chapitre sous les couleurs de Jumbo-Visma avec un podium, troisième derrière Andrea Bagioli (Soudal Quick-Step), le plus véloce du groupe des battus. Tombé en début de course, Remco Evenepoel n’a pas pesé sur la course, à l’instar de Thibaut Pinot (Groupama-FDJ), qui referme cette après-midi le livre d'une carrière riche d’émotions.

L’âge de la maturité approche pour Tadej Pogacar, 25 années au compteur depuis le mois dernier. Arrivé à Côme avec l’étiquette de favori (partagée avec Primoz Roglic et Remco Evenepoel), le Slovène savait que les jambes n’étaient pas fantastiques depuis le début de la tournée des classiques transalpines. Sonné par Roglic sur le Tour d’Emilie (2e), "Pogi" a cette fois procédé autrement. Même nanti d’une armada impressionnante, le prodige de Komenda a attendu le dernier moment pour mettre ses équipiers à l’ouvrage, au pied du Passo di Ganda (9,2km à 7,3%).

Lorsque son fidèle second Adam Yates a décidé de mettre le feu aux poudres, il s’est contenté d’observer les dégâts en deuxième rideau, l’ombre de Roglic jamais très loin de sa roue arrière. Alors distancé de la tête, Pogacar s'est mis en route pour de bon, et est revenu à vitesse grand V sur les autres favoris, avant de partir seul, à 33 kilomètres du but. Seulement, le Slovène n’avait pas ses jambes de feu du printemps, et Aleksandr Vlasov (BORA – hansgrohe) n’a pas eu besoin de se mettre dans le rouge pour rejoindre le champion de Slovénie.

Tout ce beau monde a finalement franchi le sommet dans un mouchoir de poche, sous l’impulsion d’un Roglic plutôt discret. Conscient des limites de son compatriote dans l’exercice de la descente, Pogacar s’est immédiatement jeté dans les courbes serrées, creusant très vite un écart d’une vingtaine de secondes sur le reste des cadors. Comme attendu, Roglic a éprouvé de grandes difficultés à suivre les roues, et s’est même porté en tête du groupe pour imprimer son propre rythme.

Problème, ce dernier était bien moins soutenu que celui d’un Tadej Pogacar pourtant gestionnaire de son effort. Le soutien de Carlos Rodriguez (INEOS Grenadiers) n’y fera rien et, en dépit d’une petite frayeur avec l’apparition de crampes, Pogacar fonçait tout droit vers un triplé historique sur la Classique des feuilles mortes (2021-2022-2023). Un exploit dont le dernier en date remonte à 1948, par Fausto Coppi. Avec un cinquième Monument dans la poche et une 17e victoire cette saison (le plus gros total du peloton), Pogacar inscrit encore davantage au fer rouge son empreinte dans le grand livre de la petite reine.

Attendu à ces hauteurs-là, Remco Evenepoel a joué de malchance avec une chute survenue très tôt dans la journée. Touché au coude gauche, le champion de Belgique a pu reprendre sa place dans le peloton et a même mis ses équipiers à la planche à un peu plus de 110 kilomètres de la ligne.

Un coup pour rien, ou presque, puisqu’il a permis de révéler le jour sans d’Enric Mas (Movistar), dauphin de Pogacar l’an passé. Meurtri dans sa chair, Evenepoel a logiquement disparu au moment de l’explication finale, au même titre qu’un certain Thibaut Pinot (Groupama-FDJ). Le Franc-Comtois a surtout profité de sa dernière journée dans le peloton professionnel, avec le passage de la très remarquée "Curva Pinot", placée dans le Colle Aperto. Pinot franchira la ligne près de neuf minutes après le vainqueur entouré de ses équipiers, le sourire aux lèvres.