Eurosport
Manon Apithy annonce sa grossesse : "Je me vois déjà à Los Angeles, avec mon mari et mon enfant sur la piste"
Par
Mis à jour 03/02/2025 à 14:16 GMT+1
Sacrée championne olympique au sabre à Paris 2024, Manon Apithy Brunet (désormais Apithy uniquement) attend un heureux évènement. C’est ce qu’elle a révélé en exclusivité à Eurosport. Elle nous parle de la façon dont elle appréhende ce nouveau chapitre de sa vie de femme. Elle se projette déjà sur son retour à la compétition et la défense de son titre olympique à Los Angeles, en 2028.
Des larmes et des bisous : le titre olympique en sabre d'Apithy-Brunet face à Balzer en vidéo
Video credit: Eurosport
Propos recueillis par Géraldine Weber
Manon, vous n'auriez pas une petite révélation à nous faire ?
M.A : Effectivement… J'ai même un petit truc à vous montrer. J'ai un petit bébé dans mon ventre depuis quatre mois.
Est-ce un projet de longue date ? Pouvez-vous nous expliquer comment cette idée a mûri ?
M.A : Oui, c'est un projet de longue date. Depuis qu'on s'est mis ensemble avec Boladé (Apithy, son mari, NDLR), on parle de bébé. Boladé a toujours eu envie de bébé, très tôt. Je savais qu'il fallait que je calcule en fonction des saisons et des Jeux. Au début, le projet, c'était de le faire après les Jeux olympiques de Tokyo. Et puis, il y a eu le Covid. Trois ans pour préparer Paris, cela semblait un peu compliqué. Donc, on s’est dit qu’il valait mieux repousser. Ce qui m'a un peu arrangée. J’avoue que je me sentais encore un petit peu jeune à ce moment-là. On s'est dit : 'après Paris, c'est parti. On lance un bébé, médaillé ou pas médaillé !'
Au final, le timing est parfait puisque Boladé est médaillé à Paris et vous, vous êtes titrée. Puis vous tombez rapidement enceinte…
M.A : Oui, le timing était parfait. C’était une belle année 2024. Mais il y a eu un couac : on a fait un test de grossesse quand on était en vacances aux Philippines, au bout du monde, le jour de notre anniversaire de mariage. Et là, je suis enceinte. Mais cela ne se passe pas comme prévu. On se rend compte que l’on en train de perdre le bébé. Ce qui est fou, c'est qu'on se visualise très vite. Dès le lendemain, on se disait, 'si c'est une fille, on a le prénom. Mais si c'est un garçon, on n'en a pas.' Du coup, on est restés trois heures dans la piscine à faire des espèces de matchs de prénoms de garçons. Et au final, quelques jours après, j’ai fait une fausse couche.
Que s'est-il passé après ?
M.A : On est rentrés en France. J’ai appelé la médecin. J'ai dû faire une prise de sang. Et l'hormone avait bien chuté. J'ai eu les résultats du test le 14 septembre, le jour de la parade. Au fond on le savait... On avait commencé à faire notre deuil dans l'avion en rentrant de vacances. Coup dur.
Vous l'avez communiqué à vos proches ?
M.A : En fait, ce qui est surprenant, c'est que lorsque j'ai commencé à en parler autour de moi, à ma famille ou à des amis, tout le monde me dit : 'Ah, mais t'inquiète pas, c'est normal, ça arrive à tout le monde.' J'ai plein de copines à qui cela est arrivé. On m’a dit que c’était le cas pour deux femmes sur trois. Ma mère m’a même dit : 'Je crois que cela m'était arrivé, mais je n'étais pas au courant.' En fait, il y a plein de femmes qui font des fausses couches, mais qui ne sont pas forcément au courant. Elle m’a expliqué que c’était pour cela qu'on attendait les trois mois de grossesse avant de l’annoncer. On a vite voulu passer à autre chose et on a voulu voir le positif. On s’est dit : 'Bon, ça a marché du premier coup, donc ça va marcher.'
On a pleuré ensemble et après on s’est dit qu’on allait recommencer
C'est important pour vous d'en parler maintenant ? Que les gens se rendent compte que ça arrive fréquemment ?
M.A.: Oui, c'est ça. Quand on me dit : 'c'est normal, ne t'inquiète pas, ça arrive à tout le monde.' Je me dis qu'il aurait fallu me le dire avant. Peut-être qu'on n'ose pas le dire. Il ne faut pas que les gens aient peur. Quand je dis aux gens que j'ai fait une fausse couche, tout le monde me regarde avec un air désolé et me dit que ce n'est pas de ma faute. Mais moi je réponds que tout est OK. J'ai compris que s’il n’est pas bien accroché, ce n'est pas bon. Il y a plein de choses qu'on ne sait pas trop. C'est un peu tabou. Je me dis que si on est au courant que cela peut arriver, on le vit différemment.
/origin-imgresizer.eurosport.com/2025/02/03/image-f632f000-bde0-4b58-891f-e9e8b7e3cb4d-85-2560-1440.jpeg)
Boladé Apithy et Manon Apithy
Crédit: Getty Images
Vous avez été accompagné tous les deux, ou est-ce qu’en parler à vos proches a suffi ?
M.A : Non, on n'a pas été accompagné. On en a parlé entre nous, on a pleuré ensemble. Et juste après on s'est dit qu'on allait vite recommencer. Le fait de parler avec des proches et qu'on nous dise que c'était "normal", cela nous a fait relativiser. On a vite voulu voir le côté positif et on s’est dit : "Au moins on sait que ça marche !" Ensuite, ça a remarché tout de suite et il y a cette bonne nouvelle !
Est-ce que cette fausse couche a nourri des angoisses durant le début de cette grossesse ?
M.A : Ce qui est sûr, c'est que j’avais vraiment besoin d'attendre que cela fasse trois, quatre mois pour être sûre que le bébé soit bien accroché. J'ai attendu un peu plus longtemps. Je ne l'ai pas crié sur tous les toits. Mais j'avoue que quand je voyais quelqu'un dont j'étais proche, je disais que j’étais enceinte. On ne se cachait pas trop parce qu'on était juste heureux. Et même si on me disait 'ne le dis pas tout de suite, on ne sait jamais', je répondais 'celui-là, il restera accroché, il n'y a pas de problème. Je le sens bien.' J’étais tout de suite très positive.
Dans votre équipe, notamment avec Cecila Berder, il y a eu des projets de grossesse, à des moments différents et avec des finalités différentes. Est-ce que vous parlez beaucoup ? Il n'y a pas de tabou ?
M.A : Oui, c'est vrai qu'entre coéquipières, on apprend à se dire quand ça ne va pas. On partage nos stress, nos peurs. On a vraiment travaillé beaucoup là-dessus pendant pas mal d'années. Je vois qu'aujourd'hui, si j'ai la moindre question, elles sont à l’écoute. Les filles sont ravies de me répondre. Elles me rassurent. Elles me donnent des petits conseils. Cécilia, qui a eu une première grossesse après les Jeux de Tokyo, me dit : "Je vais faire un peu différemment, si tu as envie qu’on n'en parle pas de soucis." La proximité avec les filles de l’équipe de France, ça aide beaucoup ! Avec Cécilia et Charlotte (Lembach), on est tellement proches ! On a tellement l'habitude de s'organiser pour le côté performance, pour le côté bien-être de l'équipe, que, poser une question intime, c'est devenu presque normal. C'est cool d'avoir ces filles autour de moi.
Vous êtes dans le même bateau avec une carrière sportive de haut niveau à mener. Est-ce que vous vous posez beaucoup des questions sur l'après ?
M.A : J'avais beaucoup de questionnement sur "l'après", avant de voir Clarisse (Agbegnenou), de voir Cécilia et de me dire qu’en fait, c'était vraiment possible. Ce qui est bien, c'est qu'à l'INSEP, on a une préparatrice physique qui est spécialisée là-dedans et elle aussi, je peux lui poser des questions. Et elle, quand on prend rendez-vous, elle me dit : 'En général, après la grossesse, on devient meilleur physiquement.' Et je me dis, mais c'est énorme ! Ça veut dire que je peux encore progresser ! Donc je vois un peu le côté positif. Ce qui me fait un peu plus peur, c'est plus le côté management. Tout le monde me dit : "Ça va changer ta vie, ça va changer aussi ta façon de voir les choses. Ça va te changer." Ce qui m’inquiète, c'est plutôt comment réussir à organiser tout ça. Parce que nous, sportives de haut niveau, on est quand même très égocentrés ! Ce ne sera plus "moi, je". Ce que c’est d'organiser une vie autour d'un enfant, c'est plus cela qui m'angoisse. Côté performance, si je rate cette Olympiade, ce ne sera pas à cause de mon enfant. Ce sera juste parce que ce n’était pas le moment. Je ne me pose pas trop de questions parce que je sens que je peux encore progresser.
/origin-imgresizer.eurosport.com/2024/07/30/4013498-81407608-2560-1440.jpg)
Clarisse Agbégnénou et sa fille Athéna après la conquête de la médaille de bronze en -57 kg aux Jeux Olympiques Paris 2024
Crédit: Getty Images
Vous êtes encore active en ce moment ?
M.A : Oui, je m'entraîne encore et j’espère pouvoir le faire quasi jusqu'au jour de l'accouchement. Je sais que je peux travailler, même physiquement. Là, on fait du cardio comme avant. C'est rassurant de se dire que tu peux faire tout ça. Je me dis 'tu as vu ce qu'on est en train de faire ensemble ?'. Je suis contente de partager cela avec cet enfant dans mon ventre.
Vous vous projetez déjà sur les Jeux ? C’est le prochain objectif ?
M.A : Le prochain objectif, ce sont les Mondiaux. Je veux être championne du monde avant de retourner aux Jeux. Mais oui, là, c'est pour ça que j'ai repris l'entraînement et que je suis déjà organisée. Là, je m'entraîne comme une sportive de haut niveau. Je m'entraîne tous les jours, voire deux fois par jour. Parce que je sais que le retour va être difficile. Même si n'est pas pareil, je l'imagine un peu comme une blessure cet accouchement. Je me dis, je vais être blessée, il va falloir revenir. Et je m'entraîne avant pour que la blessure se répare au plus vite. C'est juste qu'après, il va y avoir un petit bout de chou qui va prendre tout mon temps. Boladé m'a demandé : 'Est-ce que tu es encore motivée ? Et à partir du moment où j'ai dit : je veux être championne du monde et les Jeux, ça me fait toujours vibrer'. Donc en fait, la réponse est simple : je veux y retourner. Je veux vibrer à nouveau. J'ai envie de relever ce challenge. J'ai également envie de montrer à mon enfant ce que je fais.
Vous avez parlé tout à l'heure de Clarisse Agbegnenou, de Cécilia Berder. Je sais qu’elles font partie des femmes, des sportives, des mamans que vous admirez et dont vous êtes proches. On a vu Clarisse venir de temps en temps à l'entraînement avec son bébé. Est-ce que vous savez déjà comment vous voulez vous organiser ?
M.A : J'ai vu Clarisse créer tout un projet autour des Jeux, mais en tant que maman et avec sa fille. Est-ce que je veux autant emmener mon enfant en compétition ? Je ne suis pas sûre. Mais en tout cas, je sais que je ne veux pas être loin de mon enfant plus de quatre, cinq jours. J'en ai déjà parlé à ma fédération, j'ai dit que si je partais en compétition, que la compétition était un peu trop loin ou s'il y avait un stage de plus de trois, quatre jours, je partirais avec mon enfant. Donc, s'ils peuvent m'aider à avoir une tierce personne avec moi, ce serait top. Je sais qu'il y a une crèche à l'INSEP, mais il faut d'abord qu'il marche. Donc, j'avoue qu'on n'est pas encore très organisé. Mais j'ai des idées. Je sais ce que je veux absolument ou ce que je ne veux pas.
Manon, je vais vous demander de fermer les yeux : imaginez que nous sommes en 2028. Comment visualisez-vous cette année-là et ces Jeux Olympiques ?
M.A : C'est marrant, mais je me suis un peu en revu au Grand Palais. Le moment où je gagne et que Boladé monte sur la piste ! J'imagine Boladé qui porte notre enfant, entourés d'un drapeau français et ils se précipitent sur moi... Ce serait un peu comme revivre ce que j'ai vécu au Grand Palais, mais cette fois, pas à deux, mais à trois.
/origin-imgresizer.eurosport.com/2024/07/29/4012873-81395108-2560-1440.jpg)
Apithy-Brunet à l'apogée de l'émotion : la Marseillaise en honneur de la sabreuse
Video credit: Eurosport
Sur le même sujet
Publicité
Publicité