A leur place

Plus qu'une défaite, c'est une débâcle. On savait que la tâche serait compliquée pour l'équipe de France de fleuret en quarts de finale face à la Russie, intrinsèquement supérieure. Mais l'ampleur de la déroute laisse un goût amer. Menés d'un bout à l'autre de ce match, les Français n'ont jamais existé. Ils n'ont même pas eu le temps d'y croire. Au vu du niveau individuel des membres de ce groupe ces derniers mois, et compte tenu des problèmes internes qui l'ont miné, un tel échec n'est pourtant pas surprenant. Mais dans le contexte de ces Mondiaux à domicile, certains avaient espéré une révolte. Elle n'a pas eu lieu.

Les deux premiers tours s'étaient pourtant bien passés. Une entame sans souci contre l'Argentine (45-18) puis un huitième de finale bien maitrisé contre le Bélarus (45-31) qui avait piégé les Français au même stade de la compétition lors des derniers Championnats d'Europe. Mais la Russie, c'est autre chose. Or, rapidement, l'affaire a pris une mauvaise tournure. Dès le deuxième assaut, Marcel Marcilloux a pris l'eau face à Alexey Cheremisinov, concédant 6 touches, n'en mettant qu'une seule. "Bouge-toi le cul, tu fous rien", lui hurlait Patrice Menon, furieux, du bord de la piste. En vain. La Russie menait déjà 10-3, puis 15-6 au tiers de ce quart de finale.

Jérémy Cadot, entré à la place de Marcilloux l'inverse de ce qui s'était produit en huitièmes) a redonné un bref instant un peu de vie à cette équipe de France, en ramenant le score à 14-18. Mais l'écart allait rapidement enfler à nouveau (25-16, 30-19). En réalité, dans leur tête, les Français avaient déjà lâché, à l'image d'Erwann Le Péchoux, très décevant alors qu'on attendait de lui qu'il assume un rôle de locomotive dans ces Mondiaux. Battus 45-30, les Français n'ont affiché qu'un seul bilan positif sur les neuf relais (le 4e, remporté 8-5 par Cadot face à Ganeev). Il n'y a pas eu de miracle, malgré les injonctions de Patrice Menon. "Si tu veux mettre le feu Erwann, c'est maintenant", a lancé à Le Péchoux le directeur des équipes de France (et ancien responsable du fleuret) lorsque celui-ci a entamé l'ultime assaut. En vain.

Après quatre des six épreuves par équipes, le bilan est maigrichon, l'équipe de France n'ayant obtenu qu'une seule médaille, en bronze, grâce aux sabreuses. Le fleuret aura donc fait un flop total ici au Grand Palais, ne rapportant pas la moindre médaille (c'est la seule arme dans ce cas) et ne qualifiant aucune équipe dans le dernier carré. Vendredi et samedi, c'est donc une nouvelle fois sur les épéistes, d'abord les dames puis les messieurs, que le clan tricolore comptera pour garnir un peu plus son filet à médailles. Arme fatale de l'escrime française, l'épée a déjà sauvé la patrie en individuelle. Elle a les moyens de le faire collectivement.