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Etats-Unis - Bien-être, égalité des salaires : Comment les joueuses américaines mènent (et gagnent) leurs combats

Maxime Aubin

Mis à jour 27/03/2022 à 12:27 GMT+2

NWSL - Après une saison 2021 marquée par un scandale d’abus sexuel, les joueuses ont décroché leur première convention collective garantissant une amélioration des salaires et des conditions de travail. L’équipe nationale a ausi remporté son bras de fer face à la fédération américaine pour l’égalité des salaires. Deux avancées majeures même si la route pour l’égalité reste encore longue.

Un match de NWSL Challenge Cup entre San Diego Wave et Angel City FC

Crédit: Getty Images

La nouvelle a fait l’effet d’une bombe en septembre dernier. Ricky Burke, alors entraîneur du Washington Spirit en NWSL, est licencié par son club pour des faits de harcèlement moral et verbal envers son effectif. Moins d’une semaine plus tard, c’est au tour de Paul Riley, coach du North Carolina Courage, d’être accusé d’agressions sexuelles par deux anciennes joueuses. Ces révélations entraînent la chute des dirigeants de la ligue, lorsqu’on apprend qu’ils étaient au courant de ces agissements depuis des années. L’affaire a un écho mondial et ébranle un jeune championnat déjà fragile.

Protéger les joueuses

Cinq mois plus tard, le sourire est de retour sur beaucoup de visages à quelques jours d’entamer la dixième saison de NWSL (NDLR : première journée le 18 mars). Il faut dire que les joueuses ont obtenu un accord inédit avec la ligue le 1er février : la mise en place de la première convention collective protégeant leurs carrières et leurs intérêts. "Nous vivons un moment historique pour le football féminin. Certaines joueuses devaient avoir un deuxième travail pour survivre jusqu’ici. Désormais le salaire minimum augmente de 60% à 35 000 $ par an (31 600 €). Des plans d’accès au logement, à l’assurance santé et à l’épargne-retraite ont également été mis en place" détaille Jessa Braun, journaliste pour Just Women’s Sports, un site américain dédié au sport féminin.
Le bien-être et la sécurité des joueuses ont également été prise en compte, puisqu’elles bénéficieront désormais jusqu’à six mois de congés payés pour prendre soin de leur santé mentale, de 42 jours de vacances par an et de huit semaines de congé maternité. "Peu d’entreprises américaines offrent ce genre d’avantages. Je crois que le message envoyé est très important sur la place de la femme dans notre société", estime Jessa Braun.

Deux nouvelles équipes dans la ligue

La NWSL poursuit également sa progression sportive. Né en 2013, le championnat comptait originellement huit équipes, avant de passer à dix puis désormais à 12 cette année, avec les premières saisons du San Diego Wave et d’Angel City FC. Cette deuxième équipe basée à Los Angeles a été fondée par Natalie Portman, et compte de nombreuses femmes célèbres en tant qu’actionnaires comme les actrices Jessica Chastain, Eva Longoria et la joueuse de tennis Serena Williams.
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Kara Nortman, Natalie Portman et Julie Uhrman, fondatrices d'Angel City FC

Crédit: Getty Images

"Nous voulons mettre en valeur des héroïnes sportives, célébrer les femmes comme nous célébrons les athlètes masculins. Ce sera un changement de culture", expliquait Portman au magazine People au moment de la création du club en 2020. Ouvertement féministe et engagé socialement, l’Angel City FC a prévu redistribuer 10% de ses revenus de sponsoring à des causes locales, et 1% de la billetterie à ses joueuses. "C’est bien d’avoir des personnalités aussi connues qui s’investissent dans le football féminin. Et ça marche. 14 000 personnes ont déjà acheté leur abonnement pour la saison, c’est énorme !", commente Jessa Braun.

L’égalité des salaires en sélection nationale

Puisqu’une bonne nouvelle n’arrive pas seule, l’équipe nationale féminine a remporté son bras de fer face à la fédération américaine le 22 février. "L’US Soccer s'est engagé à fournir un salaire à taux égal à partir de maintenant pour les équipes nationales féminine et masculine lors de tous les matches amicaux et tournois, y compris la Coupe du monde" peut-on lire dans le communiqué publié sur le site de la fédération. En plus de ça, les 28 joueuses à l’origine de la poursuite judiciaire lancée en 2019 se partageront 24 millions de dollars d’indemnité, dont deux millions seront bloqués sur un compte pour des projets d’après-carrière.
"C’est une avancée considérable qui récompense des années d’efforts et de protestation, explique Jessa Braun. Il faut savoir que la lutte pour l’égalité salariale a débuté il y a près de 30 ans. En 1995, les joueuses de l’équipe nationale avaient déjà quitté leur camp d’entraînement avant les JO d’Atlanta en raison d’inégalités dans les primes avec leurs homologues masculins."

Encore un manque de visibilité et d’investissement

Tout n’est pas encore rose pour le football féminin américain, puisque le championnat et l’équipe nationale manquent encore de visibilité et d’investissements conséquents. "C’est très dur d’exister face à des ligues masculines très développées comme la NFL ou la NBA. Le football féminin a besoin d’être plus présent à la télévision américaine et sur des meilleurs créneaux horaires pour être visible", estime la journaliste de Just Women’s Sports. Le montant des droits TV de la NWSL reste famélique : 2,5 millions de dollars par an (2.2 millions d’euros) partagés entre la chaîne américaine CBS et le service de streaming Twitch.
Il en est de même au niveau du sponsoring puisque la NWSL peine à convaincre les investisseurs. En 2019, la marque nationale de bière Budweiser s’est pourtant lancée en devenant l’un des principaux sponsors de la ligue, invitant dans ses campagnes publicitaires les autres grandes marques américaines "à investir dans le football féminin". Quatre ans plus tard, la ligue a convaincu de prestigieuses entreprises comme Mastercard ou l’opérateur télécom Verizon mais les sommes investies restent limitées.
La NWSL a également reconduit l’année dernière son partenariat avec Nike, son premier sponsor maillot, mais ne souhaite pas communiquer sur le montant de l’accord. "Tous les championnats féminins du monde manquent de visibilité et d’investissement. On aurait besoin que la FIFA montre l’exemple au niveau international. Pour rappel, les équipes masculines de la dernière Coupe du monde se sont partagées 400 millions de dollars, contre seulement 30 millions pour les femmes" résume Jessa Braun.
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