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Les clés pour regarder la finale Boca-River en initié

Thomas Goubin

Mis à jour 10/11/2018 à 10:30 GMT+1

Ce serait l'équivalent d'un Real-Barça en finale de Ligue des champions. Pour la première fois de son histoire, la finale de Copa Libertadores va opposer Boca Juniors à River Plate, les deux grands mythes argentins. Voici quelques clés pour mieux comprendre l'importance de ce sommet de passion en aller-retour (samedi 9 et 23 novembre).

Fernandez (River) exclu face à Boca

Crédit: Getty Images

Une finale qui embrase l'Argentine

Même le président de la République s'en est mêlé. "Cette fois il faut que les choses aillent en notre faveur face à ce gros cul de Gallardo". Un dérapage verbal commis cinq jours avant la finale aller à l'occasion d'un petit dialogue avec des employés d'un laboratoire. Rappelons-le : Mauricio Macri, président argentin depuis 2015, a dirigé Boca Juniors de 1995 à 2008, un club dont il a fait un tremplin pour ses aspirations politiques.
Avant que le verdict des demi-finales ne tombe, Macri avait d'ailleurs indiqué qu'il préférait que les Brésiliens de Gremio ou Palmeiras éliminent Boca ou River, pour s'éviter "trois semaines sans dormir … à cause de la pression que cela représenterait".
Du nord au sud, du barrio au palais présidentiel, l'Argentine palpite au rythme de la finale de la Copa Libertadores. Dans la chaleur de la province de Misiones, 1000 kilomètres au nord de Buenos Aires, une dispute entre deux fans, l'un de Boca, l'autre de River, a d'ailleurs conduit à l'incendie d'une modeste demeure. Sans surprise, l'Argentine s'embrase pour ces deux clubs les plus populaires, et cette ferveur qui dégénère trop souvent a d'ailleurs conduit à programmer la finale à 17h, heure locale, 21h en France, ce qui fait les affaires du téléspectateur français, alors que la Libertadores se dispute habituellement de nuit et en milieu de semaine.
L'aller se disputera à la Bombonera, et le retour, au Monumental. Sans supporters visiteurs, là encore, pour des questions de sécurité. L'ambiance n'en sera pas moins survoltée dans ces deux temples du football, notamment lors des dantesques "recibimientos", entre papelitos, feux d'artifice, et chants volcaniques. Quelque soit la qualité de cette finale historique, l'entrée des joueurs sur la pelouse constituera un spectacle immanquable qui fera monter au plus haut l'adrénaline des joueurs.
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Boca River Superclasico

Crédit: Getty Images

Xeneizes vs Millonarios : deux identités bien distinctes

Quartier portuaire populaire de Buenos Aires, la Boca a vu naître au début du XXe siècle les clubs qui divisent aujourd'hui en deux l'Argentine. Mais en 1923, le déménagement définitif du club à la diagonale rouge dans les quartiers nord huppés va fixer son identité. River devient le club des "Millonarios", les millionnaires arrogants. Ils deviendront aussi les "gallinas", les poules (mouillées) après avoir perdu, en 1966 une finale de Libertadores face aux Uruguayens de Peñarol, après avoir mené 2-0. La Ligue des champions d'Amérique du sud a d'ailleurs longtemps donné des maux de tête à River qui a dû attendre 1986 pour la soulever, alors que Boca est la deuxième équipe la plus titrée de la compétition avec six succès (1977, 1978, 2000, 2001, 2003, 2007).
Resté attaché à son quartier d'origine, Boca Juniors est considéré comme le club du peuple, même si les frontières sociologiques se sont brouillées avant le temps. Les Bleu et Jaune logent toujours dans la vétuste mais mythique Bombonera, dont le terrain tremble quand les supporters, notamment ceux de la Doce, commencent à s'animer. L'expression "douzième homme" n'est pas par hasard liée à l'histoire des Xeneizes, surnom qui se réfère aux immigrés italiens originaires de Gênes qui peuplaient la Boca.
Pour les hinchas de River, ils sont surtout des "Bosteros", sobriquet méprisant, se référant, selon une version populaire, à l'odeur d'excréments qui parfumait la Boca quand le quartier était inondé. Grande idole de River Plate, Angel Labruna, une fois devenu entraîneur, se pinçait ainsi le nez pour provoquer les Xeneizes en pleine Bombonera. Un geste reproduit depuis par plus d'un Millonario, dont l'entraîneur de River, Marcelo Gallardo, à l'occasion d'un clasico, en 2014.
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Marcelo Gallardo

Crédit: Eurosport

Les idoles : Riquelme plutôt que Maradona, Labruna plutôt que Di Stefano

Membre de la Maquina, cette équipe des années 40 qui "gagnait et plaisait", un autre pilier de l'identité millonaria, Angel Labruna est le meilleur buteur de l'histoire de River Plate, avec plus de 300 réalisations. Son attachement aux couleurs, mais aussi ses succès une fois devenu entraîneur (sept championnats), en font le grand référent de l'histoire du club installé dans le quartier de Nuñez, au-dessus des Alfredo Di Stefano, Hernan Crespo, ou Ramon Diaz.
Côté xeneize, Diego Maradona est évidemment l'icône la plus célèbre de l'histoire des jaune et bleu, dont il était supporter depuis sa tendre enfance. Mais El Pibe de Oro n'a finalement fréquenté la Bombonera qu'une année du temps de sa splendeur (1981), avant d'y revenir à son crépuscule. Des états de service qui pèsent bien peu face à ceux de Juan Roman Riquelme. Le nonchalant numéro 10 avait d'ailleurs débuté sa carrière en remplaçant Maradona lors du dernier match de sa carrière : un superclasico évidemment, en 1997.
Vainqueur de trois Copa Libertadores (2000, 2001, et 2007), d'une Coupe Intercontinentale (2000), et de cinq championnats d'Argentine, Riquelme joue aujourd'hui un rôle d'autorité morale xeneize, dont chacun des avis a bien plus d'écho que les emportements verbaux du champion du monde 1986. Pour 2019, on parle même de l' "ultimo diez" pour prendre la présidence du club.
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Juan Roman Riquelme a annoncé sa retraite, à l'âge de 36 ans.

Crédit: AFP

Clasicos emblématiques : Francescoli, Maradona, et du gaz piment

Le premier match professionnel disputé entre les deux clubs, en 1931, a donné le ton. Une rencontre suspendue alors que trois joueurs expulsés de River refusaient de quitter le terrain. En terme de superclasicos emblématiques, on peut aussi retenir la prolifique victoire millonaria en 1972 (5-4), ou la première de Maradona, à 20 ans, où El Pibe de Oro avait mis à genou Ubaldo Fillol, considéré comme le meilleur gardien argentin de l'histoire, lors d'une après-midi faste (3-0).
Côté millonario, on aime aussi retenir la victoire éclatante à la Bombonera (0-3), en 1994, où les noms de trois esthètes ornaient le tableau d'affichage : Enzo Francescoli, Ariel Ortega, et Marcelo Gallardo.
Au total, les deux clubs considérés comme les meilleurs d'Amérique du sud par la Conmebol se sont affrontés 201 fois depuis le début de l'ère professionnelle : 74 victoires pour Boca Juniors, 65 pour River Plate, et 62 matches nuls. Plus d'un de ses affrontements a eu lieu en Libertadores, mais jamais en finale.
La dernière fois, c'était en 2015, en huitièmes de finale. Le match retour avait été interrompu au retour des vestiaires. Alors que River l'avait emporté à l'aller (1-0), du gaz piment avait été introduit au sein de la structure gonflable qui servait de couloir au moment où Leonardo Ponzio et consorts retournaient sur la pelouse de la Bombonera. Boca sera exclu de la Coupe.

Un Boca lutteur face à un River élastique

La finale de la Libertadores opposera le double champion en titre d'Argentine face à un River Plate qui a accumulé sept trophées, la plupart internationaux, depuis que Marcelo Gallardo en a pris les rênes en 2014. L'ancien meneur de jeu de l'AS Monaco est notamment entré dans le cœur des supporters à l'été 2015, quand les Millonarios ont remporté la troisième Libertadores de leur histoire face aux Tigres d'André-Pierre Gignac. Un statut d'idole renforcé en 2017, quand River a remporté la Coupe d'Argentine face à … Boca.
Avec les génies intermittents, Pity Martinez et Juan Fernando Quintero, le grand espoir, Exequiel Palacios, qui serait proche du Real Madrid, ou le métronome Leonardo Ponzio, le River de Gallardo propose un jeu plutôt léché, mais se distingue aussi par son élasticité tactique.
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Leonardo Ponzio

Crédit: Getty Images

Côté Xeneize, la culture du combat du club est bien honorée par Guillermo Barros Schelotto. Quatre fois vainqueur de la Libertadores en tant que joueur (2000, 2001, 2003, 2007), El Mellizo n'a ainsi pas hésité à mettre sur le banc, voire en tribunes, des joueurs comme Carlos Tévez, Fernando Gago, ou le meneur colombien, Edwin Cardona. Schelotto préfère miser sur des éléments toujours disposés à sortir le bleu de chauffe, comme Ramon Abila, ou Dario Benedetto, auteur d'un retour héroïque lors de la demi-finale face à Palmeiras. Barros Schelotto peut aussi s'appuyer sur la vitesse du jeune international, Cristian Pavón.
Pour Boca et River, les superclasicos disputés par des références mondiales comme Maradona, Francescoli, Di Stefano, ou Batistuta, appartiennent au passé, mais la passion, elle, est toujours là. En 2004, l'hebdomadaire anglais The Observer avait d'ailleurs placé le superclasico argentin en tête de son classement des expériences footbalistiques à vivre au moins une fois. Et s'il s'agit, en sus, d'une finale de Libertadores.
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