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Les atrophiés du coeur

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ParEurosport

Mis à jour 20/06/2010 à 10:24 GMT+2

Sauf miracle, l'équipe de France va quitter le Mondial dès le premier tour. Et ce miracle, il n'est même pas évident que le public le souhaite, tant le fossé s'est creusé entre ces Bleus et leurs supporters. Qui veut pleurer cette équipe sans identité et surtout sans coeur? Pas grand monde.

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Crédit: Eurosport

"Allez, Les Bleus: go. Go home. Il n'y en aura pas beaucoup pour pleurer votre départ." La presse anglaise s'est régalée vendredi matin, à l'image du Times, après la défaite de l'équipe de France contre le Mexique. Mais le plus troublant, c'est que le titre du quotidien anglais ne révèle pas seulement le sentiment international. Oui, le monde entier se fout de la disparition annoncée des Bleus dans ce Mondial. Au mieux, cet "évènement" suscite de l'indifférence. Au pire, un plaisir certain, tant une partie de ce même monde estimait que la France avait volé sa place en novembre dernier avec la main d'Henry. Non, le plus étonnant, c'est de constater à quel point la phrase du Times peut trouver un puissant écho auprès du public français. Voilà le plus terrible sans doute dans le naufrage actuel de la sélection tricolore: il n'y a personne ou presque aujourd'hui, y compris parmi les siens, pour la plaindre et la regretter. On a presque envie de dire "bon débarras".
Faut-il que le degré d'exaspération soit élevé pour qu'on en soit arrivé là. Si la France ne pleure pas son équipe nationale c'est peut-être précisément parce qu'elle n'a plus l'impression qu'elle lui appartient. Le fossé est gigantesque entre ce groupe, ces joueurs, ce sélectionneur et le reste du pays. La fracture entre les Bleus et le grand public est inédite par son ampleur et sa nature. Et qu'on ne nous refasse pas le coup du "en 98, c'était déjà comme ça." Non, en 98, il y avait du doute, du scepticisme quant à la capacité de l'équipe d'Aimé Jacquet à être sacrée championne du monde. Mais pas ce sentiment de rejet massif que l'on perçoit avec ce groupe. Des périodes difficiles, l'équipe de France en a connues. Ceux qui ont connu la fin des années 80, la génération post-Platini, en savent quelque chose. Le public d'alors a souvent été désespéré par les résultats. Parfois moqueur devant la faiblesse du jeu proposé. Mais jamais il n'a été écoeuré par le comportement des joueurs. A tort ou à raison, les Bleus de 2010 donnent l'impression de se foutre de leur propre destinée. Comment, dès lors, pourrait-on s'en désoler?
L'argent n'est pas le problème
Et le mal n'est pas nouveau. S'il atteint son paroxysme aujourd'hui avec la très probable élimination dès le premier tour en Afrique du Sud, il a pris sa source voilà des mois. Bien sûr, il y a Domenech. Ses erreurs de technicien et de tacticien, son incapacité à donner une identité à son équipe ou une couleur à son collectif, et sa communication désastreuse, qui a grandement contribué à couper les Bleus de leurs supporters. N'empêche. Il est peut-être temps aussi maintenant de cristalliser l'attitude des joueurs. De la main d'Henry aux insultes d'Anelka en passant par l'affaire Zahia, ils ont contribué à brouiller leur image.
Mais là n'est pas l'essentiel. Pas plus que le fric. Oui, ils sont riches. Mais le pognon est partout et pour autant, dans d'autres sélections, l'attitude est irréprochable. Prenez Diego Milito. Auteur d'une saison exceptionnelle avec l'Inter, il pourrait foutre le souc en équipe d'Argentine, où il cire le banc. Mais non. A chaque but, il est le premier à se lever pour sauter au cou de Maradona. Le problème des Bleus, ce n'est pas l'argent, c'est le comportement. Si les millionnaires avaient donné l'impression de se mettre minable contre l'Uruguay ou le Mexique, la France leur pardonnerait tout. Beaux parleurs toujours, comploteurs à l'occasion pour mettre de côté un des leurs, ils nous ont trimbalés d'une conférence de presse à l'autre, louant l'état d'esprit de ce groupe, garantissant leur indéfectible volonté... Tu parles, Charles.
Grande nation, petite équipe
Domenech, lui, ne dit plus rien depuis deux ans. Il répond à côté. Manie l'ironie et le cynisme à chaque phrase. C'est agaçant, insupportable même à la longue. Mais on peut se demander si ce n'est pas toujours mieux que le mensonge, voire le foutage de gueule de certains de ses joueurs. Le pire, dans tout ça, c'est qu'ils se sont menti à eux-mêmes. Avec le recul, les mots de cap'tain fantoche Patrice Evra, il y a encore quelques jours, font presque rire. Des paroles des Bleus à leurs actes, il y avait au moins deux tours du monde. Ils n'avaient pas les moyens de matérialiser leurs phrases. Il faut du talent pour ça. Ils en avaient. Au moins assez pour offrir davantage que la bouillie de Polokwane jeudi soir. Il faut, aussi, du caractère et du coeur. Ils n'ont ni l'un ni l'autre. Surtout pas l'autre. Ce sont des atrophiés du coeur. Le pire des crimes quand on porte le maillot bleu.
On nous dira qu'il est facile de tirer sur une ambulance. C'est vrai. C'est facile. Mais cette équipe de France mérite-t-elle encore d'être soutenue quand elle fait tout pour se faire détester? Donnons-lui raison. Il est peut-être temps de lui rendre en amertume ce qu'elle a refusé de donner en générosité, en attendant de repartir sur d'autres bases après le Mondial. Il y a une page à tourner. Le plus vite sera le mieux. Voilà pourquoi pas grand monde ne semble vraiment espérer un miracle mardi prochain. Evra a dit jeudi soir que la France était "une petite nation du football". Il se trompe. Elle reste une grande nation du football. Mais elle a aujourd'hui une toute petite équipe.
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