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Le football du futur est défensif et pas économe : Bilan tactique de la Coupe du monde

Florent Toniutti

Publié 16/07/2014 à 11:13 GMT+2

Entre la fin du culte possession de balle et le sacre d'une équipe plus efficace défensivement qu'impressionnante devant, la Coupe du monde 2014 a livré quelques enseignements tactiques, qui pourraient donner des tendances du football des prochains mois.

Luiz Felipe Scolari et Joachim Löw après l'historique Allemagne - Brésil de 2014.

Crédit: AFP

Si les petites équipes ont pour la plupart toutes disparu au stade des huitièmes de finale, ce Mondial a d'abord été marqué par leur révolte: de l'Algérie aux Etats-Unis en passant par le Costa Rica, l'exception quart de finaliste, les bonnes surprises ont été assez nombreuses dans ce tournoi. Elles ont d'ailleurs été pour beaucoup dans l'impression de "fraîcheur" et de "nouveauté" qui était sur toutes les bouches au cours des premières semaines de compétition. Oui, cette Coupe du monde a consacré l'homogénéisation du niveau de jeu d'ensemble. Jadis sparring partner, l'Australie a bousculé les Pays-Bas ; le Costa Rica est sorti en tête du groupe de la mort et l'Algérie est passé près de l'exploit face à la Belgique et l'Allemagne. 
Cette évolution s'explique avant tout par la discipline et l'approche tactique d'une majorité des sélections engagées dans le tournoi. Rares ont été les équipes à imposer une pression intense sur l'adversaire. Dès la perte de balle, la plupart des formations cherchaient avant tout à se replier rapidement dans leur moitié de terrain afin de s'opposer à la relance adverse. Le pressing se déclenchait dans un deuxième temps, majoritairement par les milieux de terrain. Ce travail de récupération devait ensuite offrir des ballons d'attaque afin de prendre à défaut une défense à découvert. De la France aux Pays-Bas, en passant par l'Uruguay ou la Colombie, les systèmes pouvaient changer mais l'objectif n°1 restait le même. 
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Alexis Sanchez après son ouverture du score face à l'Australie, pour le premier match du Chili

Crédit: AFP

La possession du ballon a entraîné les chutes de l'Espagne et l'Italie

Le Chili a fait figure d'exception grâce au travail de ses attaquants, chargés d'aller constamment harceler le défenseur en possession du ballon. Sanchez, Edu Vargas et Vidal ont ainsi multiplié les courses pour déclencher le pressing chilien et pousser leurs adversaire à la faute. Le système a fait ses preuves face à l'Australie, plus faible techniquement, mais a aussi montré ses limites face aux Pays-Bas. Les Néerlandais ont carrément "refusé" de conserver le ballon, évitant ainsi le pressing et les contres chiliens tout en s'appuyant sur leur solidité défensive pour tenir le score. Obligés de gagner pour aller chercher la première place du groupe B, les Chiliens ont changé de dispositif et se sont découverts... Et les hommes de Louis Van Gaal en ont profité pour prendre l'avantage. 
Au-delà de l'exception chilienne, ce Mondial a peut-être permis de définitivement tourné la page du culte de la possession de balle. Les échecs de l'Espagne et de l'Italie dès le premier tour en disent long sur le sujet. Avoir le ballon n'est pas la garantie de développer du jeu (et de toute façon, cela ne l'a jamais été). Face à des adversaires quadrillant efficacement leur moitié de terrain, les deux derniers finalistes de l'Euro 2012 se sont révélés complètement impuissants. L'Espagne a explosé face à la rigueur néerlandaise et la folie chilienne, l'Italie n'a elle rien pu faire pour contrecarrer les plans défensifs du Costa Rica et de l'Uruguay. L'équipe de France est un autre bel exemple puisqu'elle a dû s'en remettre à un coup de pied arrêté pour débloquer la situation face au Honduras et au Nigéria, et a réalisé son meilleur match du tournoi en brillant en contre-attaque face à la Suisse. 
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Olivier Giroud (à droite) à la lutte avec Ricardo Rodriguez, lors de France-Suisse - Coupe du monde 2014

Crédit: AFP

Les petits obligent les gros à se découvrir

Les autres "grandes nations" du football ont connu des difficultés dans les matchs où la possession de balle était très largement en leur faveur. Le parcours du finaliste argentin éclaire encore un peu plus ce point puisque l'Albiceleste a été l'équipe qui a le moins partagé le ballon durant le premier tour. Bilan pour les partenaires de Lionel Messi, des matchs poussifs face à des équipes bien en place et une réelle incapacité à créer durablement le danger autour de la surface adverse. Une incapacité autant offensive que défensive, puisqu'elle renvoyait aussi au comportement du bloc argentin, plus enclin à reculer pour se replacer à la perte de balle plutôt que d'avancer pour récupérer immédiatement le ballon sous l'impulsion de ses attaquants.
Rarement mises sous pression, les "petites nations" n'ont donc jamais souffert techniquement dans leur moitié de terrain, puisque leurs adversaires, parfois plus forts, n'imposaient pas la pression nécessaire pour les pousser à la faute. Il leur restait donc leur rigueur tactique et leur capacité à rivaliser physiquement en attendant le moment pour frapper en contre-attaque. Or, c'est bien sur ces deux plans (tactique et physique) que la mondialisation du football a apporté une certaine homogénéisation ces dernières années. Mieux en place et plus préparés, les "petits" obligent désormais les gros à prendre des risques...
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Costa Rica

Crédit: Eurosport

Des hommes-clé identifiables et faciles à neutraliser

Et face à des blocs resserrés, ces derniers ont besoin de créativité ou de joueurs capables de faire la différence individuellement. Or ces hommes-clés ont souvent déçu durant le Mondial. Exceptés Neymar, Arjen Robben ou James Rodriguez, constants du début jusqu'à la fin de leurs tournois respectifs, il est possible de citer Hazard avec la Belgique (dans un système qui n'était pas taillé pour lui), Oscar avec le Brésil (qui n'a pas su accompagner Neymar), Higuain et Aguero avec l'Argentine (qui ont abandonné Di Maria et Messi), Van Persie avec les Pays-Bas parmi les joueurs qui n'ont pas été à la hauteur. Et la liste peut encore s'allonger avec Cristiano Ronaldo, Mario Balotelli etc... Résultat, la plupart des grandes nations s'appuyaient sur un ou deux hommes forts, faciles à cibler pour les adversaires. 
Vient alors le cas de l'Allemagne, qui à l'inverse a pu s'appuyer sur un groupe d'une grande homogénéité. Manquant d'explosivité (blessure de Reus), elle a souffert comme les autres face aux petites équipes (2-2 face au Ghana avec 59% de possession, 1-0 face aux Etats-Unis avec 63% et 2-1 contre  l'Algérie avec 63%), s'en remettant aux phases arrêtées pour prendre un point face au Ghana et arracher la victoire face aux Etats-Unis. En revanche, lorsque le niveau s'est élevé, la Mannschaft a fait la différence grâce à son milieu de terrain : efficace dans le repli défensif et infatigable au moment de ressortir pour mettre l'adversaire sous pression. De quoi confirmer, une fois de plus, que ce Mondial a consacré une équipe plus efficace défensivement qu'impressionnante devant. Une constante depuis plusieurs éditions maintenant. 
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