FIFA - Six pays, trois continents pour la Coupe du monde 2030 : toujours plus aberrant

Ce qui est bien avec la FIFA, c'est qu'elle parvient toujours à nous étonner. Coupe du monde 2022 au Qatar, Coupe du monde 2026 dans trois pays, quid de l'édition ô combien symbolique du centenaire ? Uruguay, peut-être ? Un trio sud-américain, sinon ? Eh bien non, la fédération internationale a frappé beaucoup plus fort, mais pas dans le mille. Le Mondial 2030 se déroulera en (respirez un grand coup…) Espagne, au Portugal, au Maroc, en Argentine, au Paraguay et, quand même, en Uruguay. Soit six hôtes, dont les trois premiers cités seront qualifiés d'office.

Cette décision n'est pas encore totalement actée puisqu'il faudra encore valider les critères techniques d'un tel barnum et cela n’adviendra qu’à la fin de l’année 2024. Mais l'approbation "unanime" du dossier par le Conseil de la FIFA laisse à penser que l'affaire est pesée et emballée et que la Coupe du monde 2030 sera la première de l’histoire disputée sur trois continents.

Si Montevideo, Asuncion et Buenos Aires accueilleront chacun une rencontre plus une cérémonie du centenaire pour la capitale uruguayenne - qui ne serait pas la cérémonie d'ouverture, organisée elle en Europe ou en Afrique -, l'essentiel de la compétition se déroulera sur les contours de la Méditerranée.

Mais pourquoi donc la FIFA a-t-elle besoin de six pays pour accueillir une compétition qui pouvait tenir dans une seule contrée il n'y a pas si longtemps, quand 24 ou 32 pays suffisait à réussir la fête ? Non pas pour faire plaisir aux futurs hôtes. Ni pour unifier un monde divisé, comme a osé Gianni Infantino dans le communiqué révélant les plans de la FIFA pour 2030. Non, la fédération internationale est aujourd'hui prise à son propre piège.

Le "toujours plus" demande "toujours plus", simplement. Plus de matches, plus de qualifiés, plus d'argent et de retombées ne va pas sans conséquences. Quand vous conviez quasiment 25% des affiliés de la FIFA à la compétition reine, encore faut-il être capable de les accueillir dans des conditions dignes d’un tel rendez-vous. Et, aujourd'hui, plus aucun pays n'est en mesure de le faire. Hormis, peut-être, un projet délirant venu d'Arabie Saoudite en 2034. Et encore… Les Etats-Unis, pays plutôt bien pourvu en termes d'infrastructures touristiques ou routières, n’ont-ils pas partagé les frais avec leurs deux voisins du nord et du sud en 2026 ?

Derrière cette décision magnanime d'offrir une (minuscule) part du gâteau à l'Amérique du Sud se cachent des raisons plus terre à terre : l'Uruguay et ses partenaires n'étaient pas en mesure d'organiser la Coupe du monde telle qu’elle devenue aujourd’hui. Mais, symboliquement, ça la foutait mal de priver l'Amérique du Sud des festivités.

Une Coupe du monde aussi étendue dans l'espace, c'est aussi, et surtout, une aberration écologique. Alors que la sirène d'alarme retentit depuis de long mois et assez fort pour qu'elle puisse résonner jusqu'au siège zurichois de la FIFA, comment les confédérations européenne, africaine et sud-américaine ont-elles pu s'accorder sur une telle idée ? Difficile de faire plus à rebours et plus déconnecté des affaires planétaires et de l'urgence environnementale. Dire qu'on est complètement surpris serait mentir. Et, même s'il y a bien longtemps qu'on n'attend plus grand-chose de l'instance, on est quand même en droit d'être déçu. Une nouvelle fois.