Euro 2016 - Entre Pogba et les Bleus, l’histoire a encore un goût d’inachevé

On attend de lui l’étincelle, l’éclair de génie. Mais Paul Pogba prend son temps. Après tout, il n’a que 23 ans. Mais déjà 31 sélections. De quoi se faire une idée assez claire de son poids en équipe de France. Le bilan n’est sans doute pas digne de son talent. "L’attente est à la hauteur de ses qualités", tentait d’expliquer Didier Deschamps la semaine dernière. "Je ne me fais pas de souci pour Paul. Ce sont des petits ajustements pour qu’il soit plus efficace." Cinq buts et quatre passes décisives en 31 rencontres, ça ne pèse pas bien lourd pour le meilleur passeur de Serie A.

Pogba n’est pas encore celui qui entraîne avec lui les Bleus et, ces derniers mois, ce sont davantage les nouveaux venus (Payet, Coman, Martial) qui ont fait naître un nouvel espoir. Sa carrière en Bleu est jusqu’ici très inégale. La moyenne des notes que nous lui avons attribué depuis le début de sa carrière internationale en mars 2013 ? 5,52. C’est effectivement moyen, et en-dessous de celles de Blaise Matuidi (5,88), qui joue à ses côtés, ou de Raphaël Varane (6,4), qui a démarré le même jour que lui sa carrière internationale.

Pourtant, c’est lui, par son talent, son poste et son charisme qui doit porter les Bleus vers les sommets. Ses matches références en Bleu ? Il en existe très peu. Il n’a jamais dépassé le 7 dans nos observations. Une note qu’il a obtenu à quatre reprises. Sans doute sommes-nous plus sévère avec lui qu’avec un autre. Mais ses prestations en club l’ont installé parmi le gratin, la crème de la crème (15e du dernier Ballon d’Or). Notre exigence n’en est que plus relevée.

Il n’a pas marqué de son empreinte le seul rendez-vous international disputé avec les Bleus, la Coupe du monde au Brésil. Certes, il était très jeune (21 ans). Mais, après un premier match où sa nervosité a bien failli lui coûter une expulsion face au Honduras, il est sorti du onze type au profit de Moussa Sissoko. Ses négligences l’ont également privé du coup d’envoi de France-Nigéria. C’est pourtant lui qui a débloqué la rencontre d’un coup de tête, son but le plus important sous le maillot bleu. Elu meilleur jeune du tournoi, il n’a pas vraiment explosé au Brésil malgré les immenses attentes qui l’entouraient. Vingt-quatre mois plus tard, la situation est sensiblement identique.

Les deux ans de matches amicaux n’ont pas spécialement consolidé son rôle dans l’entrejeu même si la question de sa titularisation ne se pose plus. Les promesses, il les sème en club et c’est avec la Juve qu’il a pris de l’épaisseur. En sélection, il se montre plus appliqué. Pogba a su gommer ses pertes de balle dans les zones dangereuses et il semble notamment bien plus concerné, désormais, dans ses tâches défensives. Il lui reste à devenir décisif régulièrement, lui qui n’a plus marqué depuis octobre 2014, et a trouvé sa place sur le terrain.

Pourtant, le Turinois laisse parfois entrevoir ce dont il est capable et c’est souvent spectaculaire, comme sa passe décisive sur un pas pour Olivier Giroud face au Cameroun. Mais ses fulgurances sont encore trop rares, son talent trop inconstant pour faire de lui celui qu’il devrait être : le joueur capable de mener les Bleus dans une nouvelle dimension. Un nouveau sacre européen passera forcément par là.