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Indispensable malgré tout : ladies and gentlemen, this is Wayne Rooney

Philippe Auclair

Mis à jour 11/06/2016 à 13:19 GMT+2

EURO 2016 - Wayne Rooney fait encore débat en Angleterre, alors que la sélection nationale entre en lice ce dimanche face à la Russie (21h). Au centre des discussions figurent sa place et son positionnement dans le onze des Three Lions. Mais pour Philippe Auclair, l'Angleterre a le temps avant de se poser la question.

Wayne Rooney avec l'Angleterre - 2016

Crédit: Panoramic

Il a joué seize matchs pour l’Angleterre depuis l’énorme déception du Mondial brésilien, et marqué douze buts. Lors des huit dernières sorties des Three Lions, son bilan est de cinq réalisations, contre trois pour Jamie Vardy, et deux pour Harry Kane et Dan Sturridge. Il a battu le record de Bobby Charlton en sélection (49 buts), qui tenait depuis le 20 mai 1970. Il battra sans doute bientôt celui de Peter Shilton, le plus capé de tous les internationaux anglais: le gardien de Leicester a joué 125 matchs pour son pays; lui, à trente ans, en a déjà disputé 110, l’immense majorité comme titulaire.
Dans un squad anglais qui est le plus jeune de tous ceux assemblés pour l’Euro, il est l’un des seuls à apporter une expérience internationale qui n’est pas constituée que d’échecs, si l’on pense à ses performances avec Manchester United du temps de Sir Alex. Mais tout cela n’empêche pas que beaucoup ici, en Angleterre, auraient applaudi si Roy Hodgson avait choisi de ne pas le nommer dans ses vingt-trois, et redoutent de le voir dans le onze qui affrontera la Russie à Marseille samedi prochain. Ladies and gentlemen, this is Wayne Rooney.
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Face à la Suisse (2-0), Wayne Rooney a inscrit son 50e but avec l'Angleterre.

Crédit: AFP

A quelle place l'aligner ?

C’est absurde, mais c’est ainsi. Douze ans après son explosion lors d’un Euro que les Anglais auraient pu gagner s’il ne s’était pas blessé en quarts de finale contre le Portugal – je suis des plus sérieux -, on ne sait toujours pas où cet homme à tout faire, et bien, doit être positionné pour que sa sélection tire le meilleur parti de ses qualités. En fait, le flou s’est encore accentué au fil des ans. Avant-centre? Mais comment utiliser alors les deux meilleurs buteurs de la dernière saison de Premier League, Harry Kane et Jamie Vardy?
En numéro 10? C’est rogner les ailes de Dele Alli, pour lequel cette position est de loin la meilleure. Sur le côté? Rooney n’a plus le coup de reins d’antan, et son appétit du ballon fait qu’il dézone incessamment lorsqu’on essaie de le placer dans un couloir. En milieu de terrain? Hodgson s’y est refusé jusqu’à présent, même si c’est dans ce rôle à la Paul Scholes, version fin de carrière, qu’il domina la récente finale de FA Cup contre Crystal Palace.
En l’absence de véritables ailiers, Andros Townsend ayant été évincé de la première liste du sélectionneur, l’Angleterre adoptera probablement un 4-4-2 en losange dans lequel la responsabilité d’apporter le surnombre sur les côtés échoiera aux arrières latéraux Danny Rose et, soit Kyle Walker, brillant contre le Portugal la semaine dernière, soit Nathaniel Clyne, qui n’a jamais démérité en sélection. Jusque-là, tutto va bene. C’est lorsque l’on regarde les facettes du losange, que les Anglais appellent ‘diamant’, que l’on se demande comment le sertir.
Eric Dier à la base, cela va de soi; le produit de l’académie du Sporting est le seul milieu défensif naturel que Hodgson ait choisi de faire venir en France. Qui plus est, lorsque Rose et Walker – ou Clyne – s’aventurent plus haut sur la pelouse, il a le réflexe, et l’intelligence, de reculer pour se placer entre ses deux défenseurs centraux, créant une sorte de back three qui sécurise les lignes arrière, un peu à la manière de ce que Sergi Busquets faisait pour compenser les velléités offensives de Dani Alves et de Jordi Alba – toutes proportions gardées, entendons-nous bien. Après, c’est la bouteille à l’encre. Alli à gauche, Milner à droite, Rooney en pointe? Lallana, peut-être ?
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Roy Hodgson avec Wayne Rooney - 2016

Crédit: AFP

Pour les anti-Rooney, c'est un "décélérateur de jeu"

C’est ce qu’on vit contre le Portugal. Et, franchement, l’idée de revivre cela, malgré une victoire poussive, n’est pas faite pour rassurer les fans de l’équipe d’Angleterre. Rooney, en position avancée, s’avança tant et si bien que Vardy et Kane, deux authentiques buteurs, deux diables dans la ‘boîte’, comme les Britanniques appellent la surface de réparation, passèrent le plus clair de leur temps à quarante mètres de la cage de Rui Patricio, incapables de peser sur le jeu, incapables de répéter ce qu’on avait vécu lors d’un match en tous points magnifique contre les champions du monde allemands en mars dernier (3-2 pour l’Angleterre au stade olympique de Berlin), lequel doit servir de match-référence pour Hodgson.
Mais Rooney, encore convalescent, n’était pas de la partie ce soir-là, d’où ce concert de "Rooney? Pas besoin." L’Angleterre, menée 2-0 contre le cours du jeu par un onze allemand auquel celui de Joachim Löw ressemblera beaucoup lors de son premier match du tournoi (contre l’Ukraine, le 12 juin), avait brillamment réagi, en jouant à un tempo que la Nationalmannschaft avait été incapable de soutenir quatre-vingt-dix minutes. La théorie – celle des ‘antis’, dans le cas de Rooney – est que le joueur de Manchester United est trop lent, et dans ses courses, et dans sa transmission du ballon, une sorte de "décélérateur de jeu" dont la présence inhibe ses coéquipiers.
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Wayne Rooney avec le maillot des Three Lions

Crédit: AFP

Pour le moment, le débat n'a pas lieu d'être

Que Rooney ne figure pas sur la feuille de match samedi prochain est néanmoins inimaginable. Contre une Russie que des blessures vont probablement priver de trois de ses meilleurs éléments en milieu de terrain (Dzagoev et Denisov à coup sûr, et, semble-t-il, Shirokov, touché à l’aine), le Rooney qu’on vit à Wembley en finale de FA Cup devrait se régaler, malgré toute l’astuce de Leonid Slutsky, l’un des tacticiens les plus fins que l’on verra à cet Euro. Les espaces ne manqueront pas devant un back four dont les patrons, Sergeï Ignashevitch et Vasili Berezutski, ont passé la trentaine depuis longtemps.
La Slovaquie, qui évolue en 4-6-0 (Hamsik, son seul joueur de classe internationale, jouant en position de faux avant-centre), ne devrait pas non plus présenter une menace insurmontable pour les Anglais, qui pourraient se permettre à cette occasion de faire reculer Rooney d’un cran – probablement sur le flanc droit du losange -, laissant à Alli le soin d’alimenter Harry Kane en ballons, comme il le fait si bien à Tottenham. Quant au Pays de Galles, en chute libre depuis sa qualification, massacré par une Suède des plus ordinaires lors de son dernier match de préparation, j’imagine très difficilement, Bale ou pas Bale, que l’équipe de Chris Coleman puisse remporter la première victoire des Dragons sur les Lions depuis…1984.
Le "débat" autour de Rooney n’a donc pas lieu d’être. Pas pour le moment. La chance – que les Anglais devront savoir saisir, évidemment – a voulu qu’ils héritent d’un groupe dans lequel même un faux pas ne serait pas une tragédie, vu la modestie de leurs adversaires. Pour Hodgson, le processus de réglage et de mise au point pourra continuer pendant ces trois premiers matchs. Attendez-vous donc à voir Rooney utilisé dans plusieurs registres, parfois au cours du même match, comme ce fut le cas lors du 1-0 contre le Portugal. Car si l’on ne sait toujours pas quelle est vraiment sa meilleure position, on sait aussi que se passer de lui n’est pas encore une option.
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