Les plus populaires
Tous les sports
Voir tout

Le Benfica Lisbonne est peut-être le FC Porto de demain

Nicolas Vilas

Mis à jour 18/04/2014 à 14:38 GMT+2

En renversant le FC Porto en demi-finale de la Coupe du Portugal, le Benfica semble avoir vaincu la malédiction du Dragon. Dimanche, pour Pâques, les benfiquistes devraient commémorer la résurrection de Jesus et du Benfica en Liga. Le « Glorioso » a tout pour entrer dans une ère prospère et victorieuse. Et être, au Portugal, ce que Porto est depuis vingt ans.

Benfica écarte Porto en demi-finale de la Coupe du Portugal 2014

Crédit: AFP

Cette fois-ci, il n’a pas laissé filer sa bonne étoile. Un an après être tombé à genou devant le Dragon, Jesus caresse les cieux. Mercredi, et malgré les absences de Luisão, Fejsa, Silvio ou Ruben Amorim, il a renversé le FC Porto en Coupe du Portugal. Vainqueur de la demi-finale aller (1-0), le bourreau s’est fait saigner, à onze contre dix. Et c’est André Gomes qui a envoyé le SLB au Jamor pour espérer y soulever une Taça qui leur échappe depuis dix ans. Le jeune milieu de terrain est un symbole fort pour les benfiquistes. Lui qui a été formé au FCP et qui en fut largué à l’âge de 14 ans a été relancé par son plus grand rival. Avant, avec les Maniche , Deco ou Cristian Rodriguez, c’est Porto qui maitrisait ce recyclage presque provocateur. Et en ce prochain dimanche de Pâques, Jesus pourrait assoir sa position. En cas de succès sur le Olhanense, quasi-condamné aux abîmes, le Benfica sera sacré roi de son pays pour la 33e fois de son histoire.
Le Glorioso attendait ça depuis quatre ans. Et son long parcours n’est pas encore arrivé à sa fin. Un autre classico arrive, le 27 avril, en demi-finale de la Coupe de la Ligue et, surtout, une nouvelle place en finale de Ligue Europa va bientôt se jouer face à la grande et Vieille Dame de la Juventus. Ce Benfica semble entrer dans une nouvelle ère, plus stable, plus prolifique et plus rationnelle. Il n’avait pas battu son rival nordiste deux fois sur une même année civile depuis 1993. Date qui coïncide avec la mainmise du FCP sur le foot portugais. Depuis cette date, les Dragons ont remporté 38 titres nationaux. Les Aigles se contentent des miettes : 11 trophées – dont 4 Coupes de la Ligue – c’est autant que le Sporting, en profonde crise économique. Et si la période ultra-dominatrice du FC Porto touchait à sa fin ? Le SLB pourrait bien être arrivé à maturation, comme un bon Porto… rouge, bien sûr.

Enfin stable

Jorge Jesus achève son cinquième exercice aux commandes du Benfica. 262 matches en encarnado. C’est plus que les légendaires Otto Gloria (249), Eriksson (234) ou Toni (216). Il touche du doigt le record du Hongrois Janos Biri (272 matches entre 1939 et 1947). Une stabilité inhabituelle pour un Benfica longtemps en proie aux coups de sang de ses présidents. Mais Luis Filipe Vieira incarne une constance nouvelle. Elu pour la première fois en 2003, il enquille les mandats. Aucun président n’a connu telle longévité à la tête du SLB. Il est encore loin du règne de Pinto da Costa au FC Porto (initié en 1982) bien qu’il semble s’en être inspiré sur de nombreux points.

Au premier plan à l’échelle européenne

Question palmarès, il n’y a pas photo. Sur les deux dernières décennies, le FC Porto a raflé la majorité des titres majeurs au Portugal. Depuis 2010, les Dragons et les Aigles se partagent un peu mieux la Liga (3 pour le FCP, bientôt 2 pour le SLB). Mais la Coupe et la Supercoupe du Portugal échappent au SLB depuis dix ans déjà ! Avec quatre succès en six éditions, les Lisboètes sont les spécialistes de la Coupe de la Ligue. Une compétition non-qualificative pour l’Europe, qui peine à trouver légitimité et intérêt aussi bien auprès des clubs que des spectateurs. C’est à l’échelle continentale que les benfiquistes ont franchi un palier. Ils y sont plus réguliers encore que leur rival. Voilà cinq saisons qu’ils sont au moins quart-de-finalistes d’une épreuve européenne. Battus sur le fil par Chelsea en C3 l’an dernier, ils peuvent encore y prétendre cette année. Preuve que ce SLB ne fait pas que briller dans la "coupe sans oreilles", en 2012, Jesus avait été écarté en quarts de la Ligue des champions par les futurs vainqueurs : les Blues. Une couleur qui, décidemment, lui a fait du mal…
Titres depuis 2010LigaCoupeCoupe de la LigueSupercoupeC3
FC Porto3204Vainqueur en 2011
Benfica2*030Finaliste en 2013
*À trois journées de la fin de la SuperLiga, Benfica compte sept points d'avance sur le Sporting et devrait décrocher son premier titre depuis 2010.
Parcours européen depuis 2010FC PortoBenfica
2013/141/4 de C3 (reversé de la C1)1/2 de C3* (reversé de C1)
2012/138e de C1Finale de C3 (reversé de C1)
2011/1216e de C31/4 de C1
2010/11Vainqueur de la C31/2 de C3 (reversé de C1)
2009/108e de C11/4 de C3
*Benfica affrontera la Juvetus Turin les 24 avril et 1er mai.

Un savoir-faire en matière de transferts

Longtemps le FC Porto a fait figure d’exemple en matière de savoir-faire sur le marché des transferts. Recruter pas cher et revendre à prix d’or. Le Benfica semble avoir saisi la méthode. Le SLB a au moins aussi bien vendu que le FCP sur les quatre dernières années (les ventes de joueurs avoisinent les 255 millions d’euros pour chacun des deux clubs sur cette période). Alors que ses principaux rivaux se font concurrence sur le marché d’Amérique du Sud, il a misé sur l’ex-Yougoslavie. Six Serbes ont signé l’été dernier et pas mal d’entre eux, comme Markovic, excitent déjà les plus grands clubs d’Europe. Déjà très présent en Afrique, les Aigles multiplient les partenariats et protocoles à l’étranger pour parfaire leurs réseaux. Outre le Serbie, la Suède, le Gabon mais aussi l’Angleterre ou le Brésil ont été visés. Ces accords ne concernent pas que le volet sportif mais répondent à une stratégie marketing aboutie.

Une marque vendeuse

Il suffit de faire le tour du estadio da Luz pour s’en rendre compte. Le Benfica est une marque porteuse. Son équipementier (Adidas) est omniprésent. Les boutiques fleurissent autour de l’enceinte ; un musée à la gloire du  Glorioso  a été édifié en juillet 2013 au pied de la  Catedral, quelques semaines avant que ne soit inauguré celui… du FC Porto. Plus qu’un plan drague à socios, les deux géants du foot portugais se sont lancés dans une quête au consommateur. Le Benfica entend bien faire fructifier ses plus de 230.000 adhérents et ses millions de sympathisants. Selon un rapport publié par l’UEFA, le SLB est le club européen avec le plus grand pourcentage de supporters dans son pays (47%). Des fans qui leur rapportent déjà près de 15 millions d’euros par an. Un billet famille nombreuse a été créé et l’opération Comboio Benfica (Train Benfica) a été lancée afin de faciliter la venue des supporters par les rails. Et ça marche. Par rapport à la saison 2008-2009, l’affluence de la Luz connait une augmentation de près de 11% alors que celle du FC Porto chute de plus de 28%.
picture

estadio da luz, stadium of light

Crédit: AFP

La crise économique ne suffit pas à justifier la fuite des spectateurs du Dragon. Après avoir lancé sa chaîne de télévision, Benfica TV, le Benfica a innové cette saison : il est devenu le premier club portugais à produire et diffuser ses matches à domicile via son propre canal. Conscient des difficultés que connait la société Oliverdesportos (patronne de Sport TV), principal diffuseur de la Liga et en situation de quasi-monopole, le Sporting songe à la jouer comme son voisin. Au Portugal, les droits télé sont individualisés et Benfica TV, qui a aussi arraché les droits de la Premier League et du Brasileirão, a vu le nombre de ses abonnés exploser (300.000 début 2014). Le fruit d’une offensive commerciale redoutable : son abonnement  (9,90 euros par mois) est trois moins cher que celui de Sport TV. Jeux sur PC, applications pour smartphones, vins… la marque Benfica investit tous les secteurs. Même celui de la mort. En 2012, un protocole avait été signé avec une agence funéraire afin que les défunts puissent rejoindre une dernière demeure ornée aux couleurs de leur club, le socio-mort jouissant d’une réduction de 12,5%.

Le discours nationaliste

"Nous voulons être une référence dans le domaine de la formation", avançait Luis Filipe Vieira en décembre dernier. Le président du Benfica l'assure : il ne s’agit pas de "démagogie" mais plutôt d’une nécessité. La crise qui affecte le Portugal n’épargne personne. Le secteur bancaire, duquel dépendent tous les grands clubs, a pris une claque et les fonds d’investissements auxquels se sont remis Benfica, Porto et Sporting sont dans le viseur de l’UEFA et de Michel Platini. Le SLB semble donc vouloir anticiper ces galères en pariant sur ses jeunes. Et il en possède de très bons. Il vient d’atteindre la finale de la Youth League (la C1 des moins de 19 ans). Luis Filipe Vieira est allé accueillir lui-même ses "gosses" à l’aéroport. Jesus avait fait débat lorsqu’en 2011 il avait aligné le premier onze de l’histoire du club sans joueurs portugais. "Le joueur n’a pas de nationalité, ni de couleur, ni de religion, ni d’âge", répondait-il. Mais voilà que son patron se met à parler d’ "identité". Pinto da Costa s’adresse à la "Nação Porto" dans ses discours. Des mots teintés à la fois de paternalisme, de régionalisme mais aussi de patriotisme. Porto est une nation, celle qui a fait naitre le pays (avant d’avoir pour capitale Guimarães, le Comté Portucalense était fixé à Porto). Mais voilà que Vieira tente d’attendrir des supporters inquiets du nombre de débauchés à l’étranger. Les joueurs du Benfica se faisaient rares au sein de la Seleção il y a un an. Les revoilà. Petit à petit. Reste à savoir si Jesus sera l’homme de la renaissance...
picture

Jorge Jesus Benfica

Crédit: AFP

Rejoignez Plus de 3M d'utilisateurs sur l'app
Restez connecté aux dernières infos, résultats et suivez le sport en direct
Télécharger
Partager cet article
Publicité
Publicité