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Avant Troyes-Lyon : Furlan, l'homme qui ne voulait pas s'ennuyer sur son banc

Alexis Billebault

Mis à jour 30/10/2015 à 17:11 GMT+1

Jean-Marc Furlan est escorté par une réputation - plutôt flatteuse - d’entraîneur adepte du beau jeu. L’entraîneur de l’ESTAC, inspiré par Nantes, l’Ajax et Barcelone, a fait de ce principe sa marque de fabrique. Même si son équipe, lanterne rouge de Ligue 1 avant d’accueillir Lyon samedi soir (20 h 00), attend toujours d’en récolter les fruits cette saison.

Jean-Marc Furlan, l'entraîneur de Troyes - Ligue 1 2015-2016

Crédit: AFP

L’allusion le fait franchement marrer. Ce vendredi 9 octobre, Jean-Marc Furlan (57 ans), venu assister au match amical Mali-Burkina Faso (4-1) au stade de l’Aube, ne s’attendait pas forcément à ce que la conversation débute par cette question loin d’être ironique. Tout au long d’une carrière qui l’a vu parcourir la France en long, en large et en travers (Bordeaux, Montpellier, Laval, Lyon, Tours, Bastia, Lens et Saint-Seurin), l’ex-défenseur central a laissé l’image d’un joueur rugueux. Et il n’est pas totalement farfelu de se demander comment Furlan-le-dur s’est mué en un technicien sensible à un esthétisme devenu l’exception du football contemporain.
"Comme j’étais défenseur, j’étais d’une certaine façon fasciné par les attaquants, par les joueurs créatifs. Dans les années 70, le référence du beau jeu en Europe, c’était l’Ajax Amsterdam. Et bien sûr les Pays-Bas. Et en France, il y avait l’école nantaise, celle de José Arribas. Et un peu plus tard, Jean-Claude Suaudeau et Raynald Denoueix. Quand j’étais à l’armée, il y avait plusieurs joueurs du FC Nantes, dont Thierry Tusseau, et je lui posais beaucoup de questions sur la méthode Suaudeau. J’ai été fortement inspiré par ces entraîneurs, comme je l’ai été par Johan Cruyff."
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Jean-Marc Furlan, l'entraîneur de Troyes

Crédit: Panoramic

C’est un fan de Barcelone
Jean-Marc Furlan a toujours eu le souci de faire bien jouer ses équipes. "J’ai vite compris que c’était un fan du FC Barcelone. Le jeu au sol, la possession du ballon, le jeu sans ballon… C’est un entraîneur qui demande à ses joueurs de courir, et d’aimer courir. Pour lui, le ballon doit vivre, mais il veut aussi des mecs qui bougent, qui soient capables de jouer à un autre poste que le leur", intervient le défenseur international congolais Fabrice N’Sakala, formé à l’ESTAC et qui a quitté l’Aube en 2013 pour Anderlecht (BEL). C’est un entraîneur inventif. On le voit lors des séances d’entraînement. Mais ce n’est pas parce qu’il aime le football offensif avec la part de risques que cela comporte qu’il néglige le reste."
L’entraîneur troyen, qui est tout sauf un kamikaze, le répètera plusieurs fois au cours de l’entretien : la mise en musique d’un jeu offensif est impossible sans une vraie cohérence défensive. "C’est la base de tout. Et le travail défensif doit selon moi impliquer tout le monde. J’aime voir mon équipe bien défendre. Je suis très exigeant avec mes attaquants, à qui je demande un travail de harcèlement. Ils sont les premiers défenseurs de l’équipe."
En perpétuelle réflexion - "il aime faire des choses nouvelles lors des entraînements, ses séances sont variées", se souvient N’Sakala -, Furlan a l’intime conviction que le football et le mouvement permanent sont indissociables. "Suaudeau le disait souvent : ‘si tu es dans cette logique, tu vas créer le désordre chez l’adversaire’. C’est pour cela que les lignes ne doivent pas être figées. Le ballon doit aller dans la largeur. Et puis, j’insiste beaucoup auprès de mes joueurs sur la complémentarité par paire. La saison dernière par exemple, j’avais une paire Court-Carole qui marchait très bien."
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Jean-Marc Furlan, à Troyes, en 2013

Crédit: AFP

Je ne veux pas m'ennuyer sur mon banc
Evidemment, la méthode Furlan ne peut fonctionner qu’avec des joueurs capables de s’inscrire dans le cadre qu’il a défini. Lorsqu’il fait son recrutement, le Girondin cible des joueurs "techniques, endurants et rapides". "Autant de qualités qui permettent de mettre de l’intensité dans son jeu." Et en sondant sa mémoire, N’Sakala ne se souvient pas d’avoir entendu des joueurs se mettre en marge du projet de jeu made in Furlan. "Ils savent où ils vont et ce que le coach va leur demander. Donc, les joueurs adhèrent. Mais certains peuvent avoir des difficultés à trouver leur place car son système demande d’être endurant, et tu peux en trouver qui ‘ont pas le coffre nécessaire."
Eric Carrière, l’ancien milieu de terrain de Nantes, Lyon, Lens et Dijon (10 sélections en Equipe de France) et aujourd’hui consultant à Canal +, adhère idéologiquement à l’attention toute particulière que Furlan accorde au beau jeu. "Et pas seulement parce que j’ai joué à Nantes… Furlan croit en son projet. Il a réussi à faire bien jouer son équipe en Ligue 2, un championnat plutôt réputé physique. Cette saison, quand je regarde l’ESTAC, je ne m’ennuie pas. C’est plaisant, ça joue au sol, il y a une vraie intelligence de jeu, et Troyes tente d’imposer un jeu technique dans une Ligue 1 athlétique et où les équipes défendent bien, ce qui n’est pas si évident... Le problème, c’est que cela n’est pas récompensé par les résultats. Et cela peut avoir des conséquences sur le moral des joueurs. Troyes n’a pas de vrai buteur, et cela peut expliquer ses difficultés à gagner. Corentin Jean ou Fabien Camus ne sont pas des joueurs à 15 buts par saison."
Cette évidence, Furlan ne la nie pas. Obligé de bâtir son effectif avec des moyens limités, l’entraîneur de l’ESTAC est aussi un homme de convictions. Même si L’Equipe le disait vendredi dans le collimateur de son président, qui ne pourrait pas se résoudre à faire jouer son équipe contre nature. "J’en serais incapable. Je ne veux pas m’ennuyer sur mon banc. Pour moi, le football est et doit rester un spectacle…"
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