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Bielsa, le démissionnaire en série ou pourquoi on aurait dû s'y attendre

Thomas Goubin

Mis à jour 09/08/2015 à 20:05 GMT+2

LIGUE 1 - En démissionnant samedi soir, Marcelo Bielsa a confirmé sa réputation de "loco", mais surtout, d'employé ingérable pour ses dirigeants. Au final, le coup qu'il vient de faire à l'OM n'a rien d'une anomalie dans une carrière riche en conclusions abruptes. Un départ surprise avant de rebondir au Mexique ?

Un supporter de l'OM avec un maillot à l'honneur de Marcelo Bielsa

Crédit: AFP

Jeudi soir, à l'avant-veille de la démission surprise de Marcelo Bielsa, un événement peu commenté aurait pu nous mettre la puce à l'oreille. Préparateur physique de l'OM, le Belge Jan Van Winckel a quitté ses fonctions. Le communiqué publié par le site du club phocéen ne détaillait pas les raisons de ce membre du staff méconnu du grand public, mais RMC croyait savoir que ce départ de dernière minute avait été consécutif à un "différend" avec El Loco. Voilà qui ne pouvait que rappeler un épisode de la biographie tourmentée d'El Loco, quand Bielsa oeuvrait au Mexique, en 1995.
L'Argentin entraînait alors l'Atlas Guadalajara, et avait viré son préparateur physique suite à un violent accrochage avec lui. Dans la foulée, El Loco avait démissionné estimant qu'il était responsable du choix des hommes de son staff. C'était une autre époque, et un autre contexte : la démission s'était produite au cœur de la saison, pas à son entame. Reste que ces deux épisodes, s'ils ne sont pas tout à fait similaires, rappellent à quel point l'intransigeance de Marcelo Bielsa peut faire basculer ses relations professionnelles du jour au lendemain. De l'investissement total au renoncement absolu.
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Marcelo Bielsa (OM), pour sa première conférence de presse de la saison, le 6 août 2015

Crédit: AFP

Un employé coriace, presque insoumis

Un véritable casse-tête. Voilà ce que représente l'entraîneur argentin pour ses dirigeants. Rétif aux compromis, excédé au moindre contre-temps, El Loco est un employé coriace, presque insoumis. Toujours à l'Atlas, Bielsa, qui gérait tout le secteur sportif du club depuis quelques mois, avait été rappelé aux commandes de l'équipe première, en 1997, pour une opération sauvetage à huit journées du terme de la saison. Encore plus fort qu'à l'OM, il avait démissionné le jour de sa conférence de presse de présentation, qu'il ne donnera pas, à la grande fureur de ses dirigeants. El Loco avait médité sa décision toute la nuit auprès de sa femme. Il avait ensuite expliqué qu'il ne pouvait collaborer avec un président capable de négliger le centre de formation, qu'il avait lui-même contribué à organiser. Autre contexte, même fin abrupte.
Plus récemment, avant de rejoindre l'OM, son départ de l'Athletic Bilbao était devenu inéluctable dès l'inter-saison précédente suite à un accrochage avec le maître d'oeuvre de la rénovation des infrastructures du club, coupable, selon Bielsa, de ne pas avoir tenu les délais. La rénovation des installations du club avait été un point important de la prolongation de son contrat jusqu'en juin 2013. Cette fois, Bielsa ira bien au bout de son engagement, mais s'il remerciera ses joueurs et les supporters dans sa lettre d'adieu, il n'aura pas un mot pour sa direction avec qui la communication était coupée depuis de longs mois.
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Bielsa à l'OM

Crédit: AFP

Bielsa a souvent pris au dépourvu ses dirigeants

Inflexible, rigide, Bielsa refuse d'avaler la moindre couleuvre, ou ce qu'il considère comme tel. La négociation de ses contrats ne s'éternise pas pour rien. Tout doit y être parfaitement cadré, et la moindre anicroche peut le faire exploser. Au Chili, terre où il est encore aujourd'hui adulé, El Loco avait travaillé en bonne entente avec le président de la Fédération, Harold Mayne-Nicholls, un catholique social avec qui il partageait un certain nombre de valeurs et une vision commune d'un football solidaire. Quand celui-ci a été remplacé après le Mondial 2010 par un entrepreneur espagnol, partisan du foot business, Marcelo Bielsa a tout de suite mis sa démission dans la balance.
Après de longs mois de réflexions, il s'en ira en février 2011, alors que la Fédération pensait l'avoir convaincu de rester. Qu'il s'agisse de valeurs, d'un conflit personnel, ou qu'il se dise "épuisé", comme ce fut le cas quand il avait démissionné de la sélection argentine après avoir remporté un match éliminatoire (septembre 2004), Marcelo Bielsa a souvent pris au dépourvu ses dirigeants au moment de leur dire adieu. Le sort de Vincent Labrune, qui s'est dit "abasourdi (…) par une décision brutale", n'a finalement rien d'exceptionnel ...
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Marcelo Bielsa tête basse avec Marseille

Crédit: Panoramic

Et maintenant, le Mexique ?

En conférence de presse, Marcelo Bielsa a assuré que la volonté des dirigeants marseillais de modifier des clauses de son contrat a provoqué sa démission. Mais l'intérêt de la sélection mexicaine pour l'embaucher est-il totalement neutre dans cette décision ? La question mérite d'être posée alors que la presse du pays d'Hugo Sanchez annonce depuis une grosse semaine des contacts directs ou par l'intermédiaire de proches avec la Fédération mexicaine.
En 1998, l'homme de Rosario avait d'ailleurs quitté l'Espanyol Barcelone après seulement six journées pour prendre en main une sélection, celle de son pays, l'Albiceleste. Mais il savait alors que les dirigeants argentins pensaient à lui avant de rejoindre le club espagnol. Une clause dans son contrat prévoyait d'ailleurs qu'il pouvait quitter le club en cas d'approche de l'Argentine. Quoiqu'il en soit, pour avoir officié à l'Atlas et à l'America Mexico au coeur des années 90, Bielsa connaît parfaitement le football mexicain et entraîner El Tri correspondrait au type de défi qu'il apprécie, celui de faire grandir un second couteau pour en faire un outsider redouté, comme il l'a fait avec le Chili.
Reste que depuis sa démission de la sélection argentine en 2004, El Loco prend souvent le temps de l'introspection et d'étudier soigneusement les projets qui lui sont soumis avant de reprendre du service. Bielsa ne court pas après l'argent, mais après des projets qui le passionnent. Le désormais ex-entraîneur de l'OM ne passe pas d'un travail à l'autre en chasseur de prime. Reste que samedi soir, dans la foulée de sa démission, un journaliste de Televisa, grande chaîne de télévision qui fait la loi à l'intérieur de la Fédération, a annoncé son arrivée pour mercredi, au pays d'El Chicharito.
Bielsa serait accompagné de Claudio Vivas, qui a été son adjoint à l'Atlas Guadalajara et en sélection argentine, entre autres. Il se murmure également que l'ex-milieu mexicain, Pavel Pardo, champion d'Allemagne avec Stuttgart en 2007, et lancé dans le grand bain à l'Atlas par Bielsa, pourrait intégrer son staff. Plus prudents, d'autres journalistes mexicains de renom évoquent un contrat en cours de négociation. Quoiqu'il en soit, si la Fédération mexicaine finit bien par convaincre Marcelo Bielsa, elle ne pourra, après ce nouvel épisode polémique de la biographie de l'entraîneur argentin, ignorer les risques encourus au moment d'embaucher le bien surnommé El Loco.
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