Emmanuel Petit : "La France ne sait pas gérer ses supporters"

Les incidents de dimanche, qui ont émaillé le choc Marseille - Lyon (1-1), n'ont laissé personne de marbre. Depuis 48 heures, les acteurs du football français se succèdent pour regretter ce qui est advenu au Vélodrome. Emmanuel Petit, qui était de passage dans notre rédaction mardi pour nous présenter son livre "Franc-Tireur", co-écrit avec Kader Boudaoud (éditions Solar), nous a donné son sentiment sur ces débordements. L’ancien international (63 sélections) regrette évidemment les agissements des supporters, mais a du mal à comprendre que les présidents des deux clubs se soient livrés à un tel spectacle devant les caméras de télévision.

"Ils savent se mettre d'accord pour la scission L1/L2, mais après… Il faut savoir raison garder, juge Petit. En Angleterre, on ne voit jamais les présidents. Cela fait vingt ans que je suis le championnat anglais. Ils sont invisibles. On ne les entend jamais. Le sportif, ce n'est pas de leur ressort. Eux s'occupent d'économie."

Une chose est sûre, ce qui est arrivé dimanche autour de Mathieu Valbuena fait désordre. Mais cela s'inscrit dans une atmosphère particulière, parfois pas loin d’être délétère. "Ces dernières années, il n'y a qu'à se pencher… Attention, tout ceci n'est pas propre au Stade Vélodrome. Il y avait longtemps qu'on n'avait pas assisté à de tels incidents là-bas. ll y en a eu aussi à Metz, Nice ou en Corse. Ce n'est pas localisé géographiquement. Ce qui se passe sur le terrain et en dehors ne donne pas une bonne image de la France", regrette Emmanuel Petit.

Lundi matin, le ministre des Sports Patrice Kanner s'était dit "choqué et furieux" et assurait que cela avait un "impact déplorable" sur le pays. Et à neuf mois du Championnat d'Europe, ça fait même désordre. "Ça m'inspire des inquiétudes pour l'Euro à venir, car il va y avoir un afflux de supporters même si ce sont les équipes nationales et qu'il n'y a pas ce côté identitaire lié aux clubs, embraye Emmanuel Petit. Malheureusement, on est l'un des rares pays d'Europe à ne pas savoir gérer nos supporters. L'Angleterre est le pays où le hooliganisme est né et il n'y a aucun souci désormais, sauf quand ils se déplacent sur la scène internationale."

Le champion du monde 1998 souhaite néanmoins éviter tout amalgame. Il n'y a pas qu'un panier et tout le public à mettre dedans. "Je pense qu'il faut dissocier des fractions de supporters, les hooligans durs, et les ultras, qui sont eux de vrais supporters. Le souci est qu'on fait souvent l'amalgame. La répression à tout-va est-elle une bonne chose ? Frédéric Thiriez parle de sanctionner davantage financièrement les clubs pour avoir un effet dissuasif. Problème, les clubs se retrouvent orphelins face à tout ça. C'est compliqué…"

Alors quelle solution pour endiguer de tels débordements ? Elle n'est pas simple. Mais elle passe par le dialogue, pense Emmanuel Petit. "C'est la meilleure solution et une première étape. Il faut parler avec la LFP et la FFF, je le dis dans mon livre. Des parlementaires ont suggéré que tout le monde discute depuis longtemps. Aujourd'hui, il existe une incompréhension entre les supporters et les dirigeants de club."