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Ligue des champions / Bleus : L’équipe de France, meilleur club français !

Chérif Ghemmour

Mis à jour 06/11/2020 à 12:05 GMT+1

OM, Rennes, PSG : encore une semaine désastreuse pour nos trois clubs français en C1. Mais, heureusement, le génie français corrige la médiocrité chronique de nos équipes hexagonales grâce à son meilleur club : l’équipe de France ! Une exception française sous forme de substitution. Explications…

Antoine Griezmann, Paul Pogba et Kylian Mbappé avec l'équipe de France

Crédit: Getty Images

"On est les rois du monde ! Qu’ils viennent nous tailler, maintenant, on est champions du monde et d’Europe. T’as vu, ‘les Ritals’, ils se tapaient déjà dans la main sur le bord de la touche !". Ce dimanche 2 juillet 2000, vers 22h40, au Kuip de Rotterdam, les Bleus tout juste vainqueurs de l’Euro face à l’Italie pavoisent, "assis le cul dans l’herbe, la tête dans les étoiles", narre Karim Nedjari, du Parisien. La décontraction hilare de Rotterdam, totalement inédite dans la célébration d’une grande compétition internationale, identifie l’équipe de France à ce qu’elle est : un club ! Le Club de France…
Cette exception française, plus que jamais réaffirmée en 2020, repose au départ, au plan international, sur la dichotomie prononcée entre son foot de clubs nullissime et son foot de sélection assez grandiose. Car en 65 années de coupes d’Europe, nos deux petits trophées récoltés (C1 1993 pour l’OM et C2 1996 pour le PSG) ne pèsent pas lourd face à la formidable moisson des Bleus sur la même période : deux Coupes du monde 1998 et 2018 (plus une finale perdue, deux troisièmes places et une quatrième), deux Euros 1984 et 2000 (plus une finale perdue et une quatrième place), trois Coupes des confédérations… et même la médaille d’Or aux JO 1984 ! Pour faire bonne mesure, deux de nos Tricolores détiennent des records quasi éternels : les 13 buts en Coupe du monde de Just Fontaine (1958) ainsi que les 9 à l’Euro de Michel Platini (1984).
Et c’est justement les Bleus de Platini, la Bande à Platoche, qui ont inauguré cet esprit "club de France" dès la fin des années 70. Dans le marasme généralisé du foot hexagonal, égayé seulement en 1976 par l’épopée des Verts, l’équipe de France va devenir le premier des "clubs français", en se substituant symboliquement aux équipes de notre D1 qui ne brillent jamais en Coupes d’Europe. Et c’est sur un mode festif et chatoyant que Michel Hidalgo embringue d’un coup 50 millions de supporters bleu-France, si déçus par leurs équipes locales attitrées : "Le panache et le brio, prône Hidalgo. J’ai toujours rêvé d'un football souriant et créatif. La beauté est compatible avec l'efficacité. Je n'ai jamais parlé à mes joueurs de résultat. Jamais ! Je leur ai toujours dit de penser au jeu" !

La France unijambiste

Le France-Allemagne de Séville 1982 demeure malgré la défaite l’acte fondateur de la communion durable entre un peuple et sa sélection, mais aussi d’espérances nouvelles pour nos footballeurs qui entrevoient enfin depuis 1958 la possibilité de briller sur la scène internationale. Et à l’Euro 1984, hormis Platini (C2 1984), c’est avec leur sélection que les Bleus gagnent leur unique titre international ! Le "label France" revendiqué par Michel Hidalgo impose une originalité du sport français qui consacre son excellence stylée, non pas grâce à ses clubs mais grâce à sa sélection : le Carré Magique en football, le french flair du XV de France en rugby ou la gagne déconnante des Barjots et Experts en hand-ball !
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Michel Platini, Luis Fernandez, Jean Tigana, and Alain Giresse

Crédit: Getty Images

On retrouve ici un peu les traits de la gouvernance de notre cher et vieux pays : étatique, jacobin, centralisé, colbertiste. Paris accapare l’équipe de France : son stade (Colombes, Parc des Princes, SdF), la FFF, Clairefontaine et les finales de coupes… Avec l’équipe de France pour locomotive, le foot français avance donc plus "par le haut" (les Bleus) que par sa base (les clubs). A la différence des autres grands pays de foot qui marchent sur "deux jambes", brillant en sélection comme en clubs, la France unijambiste se ramasse en club mais fait des bonds prodigieux avec ses Bleus.

La vibration "club France" perdure

Il faut dire que les grandes nations bénéficient souvent d’un "club-matrice" qui structure leur équipe nationale (le Bayern avec la Mannschaft, la Juve avec la Squadra, l’Ajax chez les Oranje ou plus récemment le Barça avec la Roja). Pas de ça chez nous ! A part dans les années 2000 à dominante Arsenal et OL, l’équipe de France ne s’appuie jamais durablement depuis Reims 1958 sur un club phare.
Alors nos sélectionneurs bricolent un "esprit-club" spécifique, pas toujours inspiré par la philosophie esthétisante d’Hidalgo, mais solidement bétonné par le fameux "esprit de groupe" de Didier Deschamps hérité de son mentor Aimé Jacquet : "On part d’un projet individuel pour aller vers un projet collectif, et seul ce projet collectif restera, professe Aimé. Dans une vie de groupe, il y a des choses intangibles. Et cet état d’esprit, celui qui ne l’a pas, il est éliminé tout de suite".
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Aimé Jacquet et Didier Deschamps

Crédit: Getty Images

On remarquera que le triomphe des Bleus de Jacquet en 1998 a été marqué par la décennie 1990 où le foot français a "marché sur ses deux jambes", avec des clubs performants parvenant très souvent en demi-finales des trois coupes d’Europe mais aussi avec des Bleus déjà demi-finalistes de l’Euro 1996. L’Arrêt Bosman qui a dépeuplé nos clubs de leurs meilleurs joueurs a mis fin à cette parenthèse enchantée. Mais si nos clubs sont redevenus non compétitifs sur le plan continental, la présence continue des Bleus aux grands tournois internationaux depuis 1996 entretient la vibration "club France" qui culmine avec le doublé Mondial 98-Euro 2000, voire le Mondial 2006 en Allemagne (finaliste).

"Génération tout pour l'équipe"

L’esprit club de l’Equipe de France, ce n’est pas exactement "l’esprit famille" que l’on peut observer par exemple chez les pays sud-américains (Brésil, Argentine, Uruguay, surtout) où les joueurs fraternisent jusqu’à prier ensemble. Hormis la période désastreuse de Raymond Domonech, incapable de fédérer les Bleus "en un club" (à tel point que les joueurs cimenteront eux-mêmes un pacte unitaire : "On vit ensemble, on meurt ensemble" !), la mentalité qui transcende les Bleus de Jacquet à Deschamps s’apparente à l’esprit commando de notre Légion Etrangère. On accomplit une mission tout en veillant à ne jamais abandonner l’un des siens sur le champ de bataille. La fameuse "génération tout pour l’équipe" tant vantée par Raphaël Varane après le triomphe en Russie...
Dans L’Equipe du 18 juillet 2018, le défenseur du Real exposait intelligemment cet esprit "club-France" si particulier. D’abord, un héritage prestigieux à perpétuer ("On a grandi avec Zizou, avec cette génération 1998-2000"), la joie ensuite de se retrouver pour gagner ensemble pour le pays ("C’est juste un besoin commun. La plupart d’entre nous évoluent dans des clubs étrangers et notre ressenti c’est qu’en France, on n’est pas assez fiers : soyons heureux, contents et fiers de nos couleurs !"). Enfin, Raphaël Varane disserte avec justesse sur la notion du "Grand joueur" (conceptualisé autrefois par Albert Batteux) qui a toujours personnifié l’équipe de France à un crack depuis Raymond Kopa 1958 : "On associe toujours une génération victorieuse à un nom. Ca a été Platini, Zidane… Et on fait quoi avec la nôtre ? Bah, on met des photos de groupe ! La photo du bus où on célèbre la victoire !"
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Pogba et les Bleus célèbrent leur sacre mondial au Stade de France

Crédit: Eurosport

La "génération tout pour l’équipe" championne du monde qui peuple encore largement l’Equipe de France actuelle entretient un esprit club très fort. Au point de régénérer certains de ses leaders en difficulté dans leurs clubs respectifs : Giroud, Pogba ou Griezmann se transcendent avec le sourire sous le maillot bleu. On sent ces trois-là heureux de se retrouver dans un club à part, leur club. Avec 118 sélections dont 94 en tant que capitaine (record français), Hugo Lloris assure quant à lui une certaine continuité "clubale". Et hormis une petite coupe de France 2012, le gardien de Tottenham n’a quasiment rien gagné en club. Son palmarès personnel, il le doit en fait plus à la sélection avec le titre mondial 2018. Tout un symbole !
Deuxième au classement FIFA, à un petit point de la Belgique, la bande à DD qui poursuit une série de 22 matchs pour seulement deux défaites à l’extérieur demeure aujourd’hui encore comme l’un des prétendants sérieux à la victoire à l’Euro 2021. Alors que cette semaine, en coupes d’Europe, nos équipes se sont davantage enfoncées dans la médiocrité, le Club de France brille toujours. C’est sur lui qu’on se rabattra si nos clubs giclent sans triompher. Même si ses résultats n’entreront pas à l’indice UEFA…
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Giroud est-il le meilleur avant-centre de l'histoire des Bleus ? Notre top 5

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