Les plus populaires
Tous les sports
Voir tout

Manuel Pellegrini a transformé Manchester City en un club classe

Philippe Auclair

Mis à jour 18/02/2014 à 00:45 GMT+1

Il a suffi de quelques mois, de bonnes manières et d’un vrai savoir-faire pour que Manuel Pellegrini façonne en profondeur l’image de Manchester City.

Philippe Auclair et Manuel Pellegrini

Crédit: Panoramic

Manuel Pellegrini n’a pas froid aux yeux. "La plus grosse équipe’ de Manchester", c’est désormais la sienne, a-t-il déclaré la veille du choc contre le Barça. Vous imaginez-vous Roberto Mancini sortant une telle énormité? L’Italien aurait été massacré dans tous les médias, et pas seulement dans ceux traditionnellement favorables à la zone rouge mancunienne ou acoquinés avec son ancien manager. On aurait vu dans cette fanfaronnade la énième preuve que le beau Roberto hébergeait quelques chauves-souris dans le beffroi, comme on dit ici. C’est qu’il faudrait tout de même que les Citizens gagnent toutes les compétitions dans lesquelles ils sont engagées pendant huit ans – sans que United en remporte la moindre – pour rétablir la parité entre les deux clubs en ce qui concerne leurs palmarès respectifs. Et encore: je n’inclus pas le Charity ou Community Shield, dans lequel le score est actuellement de 20 à 4 en faveur des Red Devils. Et que Moyes a remporté. Passons.
Mais, si ces déclarations ont déclenché un tsunami de colère sur twitter, ce qui n’est pas difficile à provoquer, les insultes ont glissé sur Pellegrini lui-même comme de l’eau sur les plumes… Complétez la phrase vous-même. En moins d’un an, le manager chilien a totalement changé la perception qu’on se fait des nouveaux riches du football anglais, en douceur, avec une certaine suavité toute sud-américaine. City est d’abord une vitrine pour Abou Dhabi, comme le PSG est un outil de propagande pour le Qatar, quand bien même les stratégies de ces deux clubs et de ces deux pays sont aux antipodes l’une de l’autre quand on y regarde de plus près.
Les projets se rejoignent pourtant en ce qu’ils sont tous deux des vecteurs, et pas des ‘fins en soi’. Et, pour cela, ils répugnent à beaucoup; pour emporter l’adhésion, il faut donc séduire. En gagnant. En gagnant bien, avec la manière, le style, la classe. Et c’est exactement ce que Pellegrini apporte à Manchester City, ce style, cette classe. Les rides, les cheveux argentés ne sont pas ceux d’un dragueur sur le retour. Le discours, même quand il a des égarements en partie attribuables à un certain manque de familiarité avec l’idiome anglais, demeure réservé, courtois. J’en parle d’expérience: il parle à chacun de ses interlocuteurs les yeux dans les yeux; quand Mourinho le fait, c’est afin de provoquer une réaction collective, en attendant qu’on se tienne les côtes dans les fauteuils d’orchestre.
Vous vous rappellez quand il fallait éteindre un incendie toutes les semaines? C’est fini. Manuel a calmé le jeu.
City est devenu un club où il ne se passe plus rien, ce qui constitue une excellente nouvelle pour ses propriétaires. Un membre du board me confiait récemment: "Vous vous rappellez quand il fallait éteindre un incendie toutes les semaines? C’est fini. Manuel a calmé le jeu". Pas sur la pelouse, évidemment, où le souvenir du City mancinien, dans lequel Tevez avait joué milieu défensif à l’Emirates (j’exagère à peine), s’est effacé devant la vista de Silva, Agüero, Negredo, Touré – le joueur qui manque au Barça, qui le vendit en 2010? – et, oui, Samir Nasri, dont le visage s’éclaire dès que le nom de son manager est mentionné. Les départs de Tevez et Balotelli ont certainement assaini l’atmosphère, tout comme l’éloignement de certains agents trop influents. Pellegrini n’a pas été le maître-d’oeuvre de cette transformation mais, sans lui, cette dernière n’aurait pas paru aussi convaincante. City est une aberration, un club dopé par les pétrodollars, en apparence un bras d’honneur au fair-play financier.*
picture

Manuel Pellegrini, Manchester City Manager

Crédit: Panoramic

Pour ce qui est de sa ‘vision’, il s’agit aussi de l’un des clubs les mieux gérés d’Europe, et considéré comme tel par ses rivaux directs – le Bayern, par exemple, aussi surprenant que cela puisse paraitre. Pellegrini en est l’ambassadeur idéal, et pas seulement parce qu’il en a le physique et le timbre onctueux. Même les joueurs qu’il a écartés se gardent bien de laisser filtrer leurs frustrations. Jesus Navas, qu’on voyait bien devenir un autre José-Antonio Reyes, les jambes coupées par le mal du pays, est tout aussi pimpant dans l’hiver mancunien que sous le soleil sévillan. Le turnover est accepté, à tout le moins en public. Résultat? Dans un 4-4-2 qui n’a rien d’archaïque, et qui est en fait un 4-2-2-2 ‘à la brésilienne’, les quatre attaquants qui se bousculent pour une place en pointe marquent tous. Même Jovetic, si longtemps blessé, s’est montré décisif contre Chelsea en Cup le week-end dernier.
Attention. Ceci n’est pas une lettre d’amour à Manuel Pellegrini et à son club. La plus grande astuce du diable est de faire croire qu’il n’existe pas. La plus grande astuce du City de 2014 est de faire croire qu’il a toujours existé ainsi, quand il s’agit en fait d’une construction qui n’a presque aucun rapport avec le club de Billy Meredith, Joe Mercer et Malcolm Allison. On peut ne pas aimer, pleurer une dérive. On peut aussi admirer un plan exécuté avec le doigté d’un pickpocket.
Rejoignez Plus de 3M d'utilisateurs sur l'app
Restez connecté aux dernières infos, résultats et suivez le sport en direct
Télécharger
Partager cet article
Publicité
Publicité