Avant Porto - Inter | Sergio Conceição et l'éprouvante vie d'un père entraîneur

Au Portugal, peut-être encore plus qu'ailleurs, le football est une affaire de famille. Ces dernières années, le FC Porto en est devenu l'illustration. Sergio Conceição, devenu il y a quelques semaines l'entraîneur le plus victorieux de l'histoire du club, y jongle aussi avec le rôle de père et tout ce que cela implique sur les plans politique, professionnel et même intime.

L'ancien coach du FC Nantes est l'heureux paternel de cinq enfants, cinq garçons. Tous ont entrepris une carrière de footballeur. José, le cadet (8 ans) fait déjà l'objet d'une certaine médiatisation par le club portista. Francisco, probablement le plus talentueux (21 ans) est allé tenter sa chance à l'Ajax - on y reviendra. Moises, né en 2000, cherche à se faire une place à Leixões, en deuxième division, tout comme Sergio, l'aîné (26 ans), rarement titulaire avec Portimonense, club de Liga. Rodrigo, lui, occupe certainement la position la plus délicate puisqu'il fait partie de l'effectif de son père.

Le latéral a grappillé du temps de jeu, ces dernières semaines, en raison de la blessure de João Mario, le très apprécié habituel titulaire du poste. Le joueur de 23 ans avait fait ses débuts en Ligue des champions à l'automne, "au mérite et grâce à tout le travail qu'il a accompli" selon les mots de son paternel, vraiment pas du genre à accorder des passe-droits à des joueurs simplement parce qu'ils portent le même nom que lui. Au contraire.

Sergio père n'avait déjà pas franchement ménagé Francisco, pourtant considéré à l'époque comme l'un des joyaux du centre de formation portista, notamment en raison d'une gestuelle rappelant celle d'un certain Lionel Messi. "Il vit avec moi, racontait le technicien des Dragons il y a deux ans, au moment où "Chico" se faisait une place en équipe première. Il n'a pas le permis de conduire. Il vient donc en taxi ou avec ses frères. Une fois, je l'ai amené en voiture mais je l'ai laissé un peu plus haut avant d'arriver au centre d'entraînement. Ça l'avait un peu agacé. Mais moi, je veux franchir la porte comme entraîneur du FC Porto. Pas comme le père de Francisco, Rodrigo, Sergio, José ou... comment s'appelle le dernier ? Ah oui, Moises [Rires]. Ils sont nombreux !"

L'anecdote et la manière avec laquelle elle avait été racontée dit à peu près tout du management opéré par l'ancien milieu de terrain avec ses fils. Conceição est un entraîneur relativement jeune (48 ans) mais ses méthodes sont strictes, parfois rustres. Encore plus avec ses enfants, auxquels il tente d'inculquer les valeurs qui lui ont permis de devenir un joueur de très haut niveau après avoir perdu son père dans un accident de moto alors qu'il n'avait que 16 ans et sa mère, deux ans plus tard.

Même s'il a toujours tout fait pour séparer son rôle de père et celui d'entraîneur, sa relation avec ses fils s'immisce toujours dans la vie du club. Dans les bons moments, comme lorsque "Chico" Conceição est devenu champion du Portugal sous les ordres de son père. Mais aussi dans les mauvais. Parce que Porto est un géant national et que l'exigence entourant ce club est immense, parfois irrationnelle.

Le 13 septembre dernier, alors que les Dragons avaient subi une très lourde défaite sur leur pelouse en Ligue des champions face à Bruges (0-4), un petit groupe de supporters avait caillassé la voiture de Liliana Conceição, femme de l'entraîneur portista, dans laquelle figurait également Rodrigo, auteur de ses premières minutes en C1 ce soir-là. "Rien n'est plus important que ma famille et j'échangerais tous mes succès sportifs contre son bien-être", avait commenté le coach du FCP, quelques jours plus tard.

L'été dernier, certains leaders de groupes de supporters lui avaient reproché de ne pas avoir convaincu son autre fils, Francisco, de prolonger l'aventure avec les Dragons. "Chico" s'était en effet engagé avec l'Ajax pour une bouchée de pain, au vu de son potentiel. Quelques semaines plus tôt, l'ailier avouait avoir "forcément plus souffert, et ne pas pouvoir dire le contraire" avec un père entraîneur. Après le transfert de son fils vers le club amstellodamois, Sergio Conceição avait mis fin à la polémique de manière on ne peut plus laconique : "Je ne m'exprime pas sur les joueurs qui ne font pas partie du club."