Un nombre incalculable de joueurs blessés : la trêve a fait d'immenses dégâts

C'est une trêve qui n'a eu de trêve que le nom. Pour les joueurs, ce fut surtout une goutte d'eau supplémentaire dans un vase déjà rempli à ras bord. Installée en amont d'un sprint final particulièrement chargé pour certains, qui précédera d'ailleurs un été extrêmement dense, avec l'Euro puis les Jeux Olympiques, la fenêtre internationale a entraîné une avalanche de blessures.

Rarement un tel rendez-vous aura si bien mis en exergue l'impasse dans laquelle se trouvent les acteurs du jeu, piégés par des calendriers toujours plus chargés, des matches toujours plus longs et des tournées promotionnelles toujours plus éloignées. Aux quatre coins de l'Europe et même du monde, certains clubs vont ainsi retrouver leur routine avec un effectif amputé de 15 à 20% de leurs éléments.

C'est par exemple le cas de l'Olympique de Marseille qui, avant d'affronter le Paris Saint-Germain dimanche soir en Ligue 1, a perdu Jonathan Clauss, victime d'une déchirure de l'ischio lors de l'amical remporté par la France face au Chili. Quelques jours auparavant, Ulisses Garcia, doublure de Quentin Merlin, avait été contraint de quitter le rassemblement de la sélection suisse en raison d'une blessure aux adducteurs. Pape Gueye et Ismaïla Sarr ont également été touchés avec le Sénégal alors que la fin de saison de Bamo Meïté est d'ores et déjà terminée.

L'OM a été particulièrement touché et ce n'est pas forcément une surprise, tant l'équipe était apparue exsangue avant la trêve, à Villarreal puis à Rennes. Et dire que Jean-Louis Gasset comptait sur la respiration internationale pour retrouver des forces vives...

Le club phocéen n'est pas une exception, mais plutôt une preuve par l'absurde, que le phénomène peut avoir d'importantes conséquences soit pour la fin des championnats et des Coupes d'Europe, soit pour la préparation de l'Euro. Car les sélections sont autant - si ce n'est plus - victimes que les clubs. "J'ai croisé Jean-Louis Gasset et Ghislain Printant, ils m'ont demandé si je pouvais leur prêter quelques latéraux mais je n'en ai pas beaucoup non plus", a ri jaune Didier Deschamps en conférence de presse.

L'Angleterre, l'une des favorites du rendez-vous continental de l'été, a disputé deux gros chocs face au Brésil et à la Belgique sans une grande partie de ses cadres : Harry Kane, Bukayo Saka, Kyle Walker, John Stones, Harry Maguire, Jordan Henderson ou encore Trent Alexander-Arnold ont tous dû renoncer, de manière plus ou moins précoce, à disputer tout ou partie de ces matches. "Je n'ai jamais vécu cela auparavant, a déploré le sélectionneur des Three Lions Gareth Southgate. [...] C'est de plus en plus difficile au niveau international."

Tellement difficile que certains de ses homologues ont décidé de s'adapter. Au Portugal, où le temps de jeu et l'état de forme des "sélectionnables" sont analysés au peigne fin, grâce à des données avancées et à l'assistance de l'intelligence artificielle, Roberto Martinez avait lui choisi d'établir une liste élargie de 32 joueurs pour mettre en place un roulement entre les matches face à la Suède (victoire 5-2) et la Slovénie (défaite 2-0).

"C'est lié à la spécificité du mois de mars, avait-il justifié. C'est une période difficile pour les joueurs, avec beaucoup de matches et de fatigue mentale avec laquelle il faut composer." Le technicien a ainsi composé trois groupes : l'un composé de joueurs aptes à disputer les deux matches, un autre seulement le premier, et un dernier seulement le deuxième (Ronaldo, Vitinha, João Cancelo et João Félix).

Cette solution est sans doute une option intéressante pour préserver les joueurs, mais elle est aussi une preuve de l'impuissance des sélections face à la fuite en avant imposée par la FIFA et l'UEFA, qui ne cessent de densifier les calendriers pour augmenter les revenus.

Elle touche les grandes écuries, et le choc entre Arsenal et Manchester City, où beaucoup de joueurs pourraient manquer à l'appel (Akanji, Stones, Saka ?), est bien parti pour le démontrer. Mais elle affecte aussi les clubs un peu plus modestes. En Ligue 1, Nantes va devoir assurer son maintien sans l'un de ses meilleurs joueurs, Moses Simon, victime d'une fracture du péroné et forfait jusqu'à la fin de saison.