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A Chelsea, Jose Mourinho s'acharne à faire jouer les mêmes et ça ne paie plus

Philippe Auclair

Mis à jour 03/01/2015 à 10:14 GMT+1

Chelsea a perdu son aura de début de saison. Pire : le coaching de Jose Mourinho est devenu non seulement improductif, mais incompréhensible. Philippe Auclair nous dit pourquoi.

A Chelsea, Jose Mourinho s'acharne à faire jouer les mêmes et ça ne paie plus selon Philippe Auclair

Crédit: Eurosport

En décembre 2009, alors qu'il s'apprêtait à aligner une équipe différente de la précédente pour la 100ème fois consécutive, Sir Alex Ferguson avait dit: ‘le temps où Liverpool gagnait le titre en ne se servant que de quatorze joueurs est passé. Plus personne ne pense ainsi de nos jours'. Plus personne, sauf José Mourinho, semble-t-il. Voilà un homme de confiance s'il en est, si l'on veut parler de la confiance qu'il place en un groupe très restreint de joueurs. Dix-huit seulement de ceux-ci ont été titularisés en championnat par le manager portuguais depuis le coup d'envoi de la saison; et j'inclue Loïc Rémy et Didier Drogba, aperçus trois fois à eux deux dans le starting line-up des Blues, c'est-à-dire: quand Diego Costa était indisponible. Mourinho est un chef de commando plutôt qu'un général de corps d'armée; les appellés sont rares, les élus encore plus. Comparez avec Manuel Pellegrini qui, de son côté, a eu recours à vingt-trois titulaires différents dans le même temps, ou avec Louis van Gaal, qui en est à vingt-cinq, à son corps défendant il est vrai. Et si, encore, le stratège de Chelsea pratiquait un vrai turnover au sein de ce groupe…mais non. Pas moins de quatre des joueurs de champ de Mourinho sont apparus vingt fois sur vingt (et toujours d'entrée de jeu) en Premier League: Ivanovic, Cahill, Terry et, incroyablement, Eden Hazard. Cesc Fabregas et Nemanja Matic l'ont fait à dix-neuf reprises; le second n'a d'ailleurs manqué un match que parce qu'il était suspendu. Si vous rajoutez la Ligue des Champions à l'équation, ces chiffres deviennent encore plus saisissants, car Terry, Ivanovic, Fabregas, Hazard et Matic ont disputé – comme titulaires, of course - les cinq premiers matchs de la phase de groupe des Blues. Est-il un autre entraîneur en Angleterre, en Europe, au monde, qui se repose à ce point sur un nombre aussi modeste de 'tauliers' à ce niveau de compétition? Aucun nom ne me vient à l'esprit.
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Eden Hazard - Premier League, Tottenham vs Chelsea on 1 January 2015

Crédit: AFP

Continuons. Huit – huit! – des joueurs de champ qui ont vu Tottenham passer cinq buts à leur gardien Thibaut Courtois avaient joué tout ou partie des deux rencontres précédentes contre West Ham et Southampton. Soit un maximum de deux-cent-soixante-dix minutes de jeu dans le championnat le plus exigeant de tous en termes de condition physique, en l'espace d'une semaine, avec deux derbys londoniens dans le lot, plus un déplacement dans le stade de la révélation (et, hourrah!, confirmation) de cette saison. Mauricio Pochettino, qui aura savouré ces fêtes, avait été beaucoup plus prudent, prenant soin de faire tourner ses latéraux et ses milieux défensifs, c'est-à-dire ceux de ses joueurs qui ont à prodiguer le plus d'efforts sur la pelouse. Cinq seulement de ses Spurs ont goûté aux trois rencontres qui ont permis à leur équipe de prendre place au dessus d'Arsenal au classement, Nacer Chadli étant d'ailleurs remplacé à deux reprises autour de l'heure de jeu. Bentaleb, Paulinho, Dembele, Stambouli se sont relayés dans la ‘salle des machines' de l'entrejeu. Bref, à White Hart Lane, c'étaient aussi deux approches distinctes d'un même test qui étaient mises au banc d'essai; et quoi qu'en dise Mourinho, qui fait semblant de croire à une conspiration du corps arbitral dont son équipe serait la cible (depuis quand, et sur les ordres de qui, exactement?), le verdict fut sans appel, malgré la supériorité évidente des ressources à sa disposition. Si vous en doutez, citez un seul joueur de Tottenham présent ce jeudi qui pourrait forcer son entrée dans le XI-type de Mourinho. Eriksen plutôt qu'Oscar? Non, encore trop inconstant. Et Kane serait-il mieux qu'un remplaçant de super-luxe pour Costa?

De la perfection à l'essoufflement

Le plus surprenant de l'affaire est peut-être que l'entraîneur de Chelsea sait aussi bien que quiconque ce que cette période festive exige des organismes. En 2103-14, quand les Blues avaient pris neuf points sur neuf entre le Boxing Day et le Jour de l'An, seuls deux de ses joueurs avaient disputé ce trio de rencontres en qualité de titulaires, Terry et Hazard, faux dilettante, stakhanoviste sans en avoir l'air. En 2005-06 (même bilan: neuf points sur neuf), ils étaient trois – l'indéracinable Terry, William Gallas, et, surprise, Joe Cole. En 2006-07, c'est vrai, six des Blues avaient oeuvré trois journées sur trois; mais Chelsea avait concédé trois matchs nuls, et avait sans doute perdu son titre à cause de cela. L'écart qui les séparait du futur champion Manchester United au 2 janvier était de six points, c'est-à-dire le même qu'au 13 mai, date de la distribution des prix. Chelsea avait apporté une nouvelle preuve de l'aphorisme fergusonien selon lequel un championnat, à défaut de se gagner fin décembre, peut s'y perdre. Il est impensable que Mourinho ait oublié cette leçon, et beaucoup plus probable qu'il soit la victime de sa propre réussite.
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John Terry, à la fin de Tottenham - Chelsea en Premier League, le 1er janvier 2015

Crédit: AFP

Les particules qui composent l'organisme Chelsea sont complémentaires à ce point qu'on a pu croire pendant l'automne qu'il était en route vers la perfection. La tentation est donc là pour Mourinho de l'altérer aussi peu et aussi rarement que possible. Mais le voilà arrivé à un moment-clé de la saison. Plus personne ne parle des ‘Invincibles' en puissance d'avant la défaite à St James' Park. A White Hart Lane, Matic et Cahill en particulier donnèrent l'impression de jouer de mémoire, vides d'énergie, alors que tous deux ont accompli une première moitié de saison admirable. C'est pardonnable en ce qui concerne des joueurs qui ne sont pas des surhommes; ce l'est moins pour ce qui est de celui qui les a forcés à répéter les efforts aussi inconsidérément. La demie-pause de la FA Cup - Watford visite Stamford Bridge ce dimanche - arrive à point nommé pour Mourinho. Car si ses footballeurs ont besoin de souffler, lui a besoin de réfléchir, et, même s'il ne l'admettra jamais en public, d'admettre qu'il peut se tromper.
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