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Chelsea-Manchester City - Agüero, Touré, Kompany : les patrons de City posent question

Philippe Auclair

Mis à jour 31/01/2015 à 00:55 GMT+1

De toutes les conquêtes de Manchester City ces dernières saisons, Sergio Agüero, Yaya Touré et Vincent Kompany symbolisent la trajectoire sinusoïdale de leur équipe cette saison. Si les trois cas de figure sont à dissocier, Philippe Auclair se pose la question de leur responsabilité dans l’inconstance du champion d’Angleterre en titre.

Sergio Agüero, Yaya Touré, Vincent Kompany

Crédit: Eurosport

Un peu de provocation : la victoire certainement la plus précieuse de la saison de Manchester City jusqu’ici fut acquise par un onze dans lequel ne figuraient ni Yaya Touré, ni Kun Agüero, ni Vincent Kompany. C’était le 10 décembre dernier, au Stadio Olimpico, quand Pablo Zabaleta et Samir Nasri inscrirent les deux buts d’un succès sur la Roma (1-2) qui, tout au bout d’un parcours chaotique, ouvrait aux Citizens la voie des huitièmes de finale de la Ligue des Champions.
Le 21 octobre, par contre, ces trois vertèbres de l’épine dorsale de City étaient bien sur le terrain, quand le CSKA Moscou remonta un handicap de deux buts dans un stade déserté, contre tout espoir, contre toute logique (2-2). City avait capitulé. Comme City capitula encore deux semaines plus tard, encore plus honteusement, devant son propre public, face à la même formation moscovite (1-2). Exact: les trois patrons supposés de Manuel Pellegrini étaient encore de la partie ce soir-là, même si Touré, inexcusablement, dut la quitter plus tôt que prévu après avoir laissé sa frustration l’emporter sur son jugement.
Or ce trio – auquel on doit ajouter Pablo Zabaleta et David Silva, qu’on a eux aussi connus plus fringants que cette saison – est bien celui sur lequel Roberto Mancini, puis Manuel Pellegrini, se sont appuyés pour remporter deux titres de champion d’Angleterre. Si City nous a récemment offert le spectacle d’une équipe qui semble reculer d’un cran quand elle semble prête à en franchir deux, serait-ce parce que les patrons supposés ne se font plus respecter que par intermittence ?

Agüero : l'éloge de la patience

Et là, on doit nuancer. Trois joueurs, trois cas de figure. Dans le cas d’Agüero, on ne peut attendre de l’Argentin qu’il retrouve aussitôt le rythme de son magnifique début de saison (14 buts en 15 matchs de Premier League) après la blessure au genou qui le stoppa net au mois de décembre. Le choc contre Chelsea lui donnera une chance de montrer qu’il a achevé sa convalescence, pas de se "racheter". Car lui n’a pas "déçu": lui au moins repartit de Moscou avec un but et une passe décisive à son actif, ainsi qu’une réputation intacte.
Cela dit, les Citizens ne semblèrent pas trop souffrir de son absence forcée. Pendant celle-ci, ils se qualifièrent pour les seizièmes de la Cup et prirent treize points sur quinze en Premier League, qui leur permirent de recoller – brièvement – à Chelsea pendant les fêtes. Bizarre: avec Agüero dans son onze, City a tourné à 2 points par match en championnat - et s’est fait sortir de la Coupe de la League par Newcastle, ainsi que de la FA Cup par Middlesbrough ; sans lui, le bilan est de 2,6 points par match en championnat, et de 100% de réussite dans les autres compétitions, avec trois victoires en trois matches. Comprenne qui pourra.
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Sergio Aguero et City ont perdu face à Middlesbrough, en Cup

Crédit: Panoramic

Rejeter une partie du blâme sur le meilleur buteur, et de loin, sur lequel puisse compter Pellegrini serait absurde. Le paradoxe demeure pourtant : Agüero s’est montré le plus efficace des attaquants de l’entraîneur chilien, et de loin ; mais ce dernier, statistiquement, n’en a pas recueilli les fruits qu’il aurait été en droit d’escompter. N’y voyons pas une "explication" de l’inconstance relative de Manchester City, mais plutôt une illustration de ce qu’il est parfois bien délicat de mettre le doigt sur les causes de cette inconstance.

Yaya Touré : l'importance d'être constant

Parlant d’inconstance, celle de Yaya Touré, retenu en Guinée Equatoriale après la qualification de la sélection ivoirienne pour les quarts de finale de la CAN, est la plus agaçante, et la plus préjudiciable. Oublions le grotesque épisode du gâteau d’anniversaire. Oublions aussi celui, si douloureux (qu’on puisse seulement mettre les deux côte-à-côte suffit à prouver combien le football contemporain a perdu tout sens de la mesure), du deuil d’un frère qu’il dut porter un temps en silence lors du Mondial.
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Yaya Touré (Manchester City)

Crédit: Panoramic

Est-ce que Touré se sentirait mal à l’aise dans le costume de sauveur qu’il avait si souvent endossé la saison passée ? Ou ne serait-ce qu’une période de flottement comme il en déjà connu d’autres ? Et s’il est moins rayonnant, n’est pas aussi parce que le "double pivot" Fernando-Fernandinho, qui était censé lui donner plus de latitude pour se porter là où il fait le plus mal – dans les trente mètres adverses -, n’a pour le moment donné aucune raison à Pellegrini de penser qu’il avait trouvé une solution ? Un peu des trois, sans doute.

Kompany : une fragilité si pénalisante

Reste Vincent Kompany ; et là, c’est beaucoup plus inquiétant. Parce qu’il ne s’agit pas seulement de poser des questions, mais parce qu’il est possible d’aligner des faits, qui amènent d’autres questions. Le "Prince" a toujours eu ses détracteurs. Ceux qui n’ont, Dieu sait comment, jamais compris que, sans lui, les titres de 2011-12 et 2013-14 ne seraient jamais revenus à un club dont il est l’âme, l’ambassadeur, le défenseur de la foi. Ceux pour qui le capitaine des Citizens et des Rode Duivels serait trop frustre, trop emporté dans ses interventions, trop dépendant de ses qualités physiques pour compenser certaines pertes de concentration. Quand il connait celles-ci, c’est vrai, City tend à les payer cash. C’était fort rarement, au passage.
Mais il est impossible de ne pas relever comment Kompany, un superbe athlète dont l’hygiène de vie est irréprochable, accumule pourtant les blessures depuis un peu plus de deux ans. Un chiffre? J’en ai recensé seize depuis octobre 2012. Seize ! Et treize de celles-ci étaient des problèmes musculaires, pas des lésions consécutives à un impact. Rien que cette saison, ce géant fragile en est à quatre, une à la cuisse, trois au mollet. Or Kompany n’a que vingt-huit ans. Il approche ce qui devrait être le faîte de sa carrière, l’âge de l’épanouissement, au lieu de quoi c’est celui des frustrations. Le dynamisme, l’explosivité et le goût du duel sont les bases sur lesquelles ce centre-back a bâti sa carrière, aussi servie par une intelligence hors du commun. Comment faire parler ces qualités lorsque le corps se montre si rétif, ou si capricieux ?
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Kompany (Manchester City) face à Gervinho (AS Rome)

Crédit: Panoramic

Kompany n’a pas non plus été servi par les tâtonnements de son club quand celui-ci a cherché le joueur qui pourrait être son parfait complément. JoLeon Lescott n’avait pas démérité lors de la saison du premier titre, bien au contraire ; titularisé trente-et-une fois, comme son skipper, il avait contribué à faire de la défense de City la plus imperméable de Premier League. Mais le club souhaitait associer son "roc" belge à un centre-half qui soit plus habile dans la relance que le transfuge d’Everton. Un élément qui offre davantage de garanties en Europe également.

Qui pour accompagner Kompany ? Telle est la question

Ce "complément", City le cherche toujours. Martin Demichelis vaut beaucoup mieux que ce que ses premiers matchs avec les Citizens avaient fait craindre, mais son association avec Kompany n’a jamais totalement convaincu ; si vous en doutez, cherchez une rencontre dans laquelle les deux ont excellé ensemble, et vous verrez que cela n’est pas arrivé si fréquemment que cela. Eliaquim Mangala, après une performance de Man of the Match dans un nul héroïque contre Chelsea, est redevenu un joueur de Primeira Liga peinant à se hisser au niveau d’un grand championnat. Il lui faudra être patient. Nous aussi.
Du coup, une responsabilité supplémentaire incombe à Kompany. Il ne s’en plaindra pas. Mais son corps le freine. Avec un grand Vincent, en particulier face à un Chelsea privé de Costa, suspendu trois matchs pour avoir essuyé ses crampons sur Martin Skrtel, on verrait bien City poser au moins autant de problèmes aux Blues que Liverpool sut le faire il y a quelques jours en Coupe de la League. Exposer et exploiter les défauts de la cuirasse qu’on a vus béants à White Hart Lane et contre Bradford. Avec un grand Vincent, pas celui qu’on a vu contre Arsenal, furieux contre lui-même, furieux de ne pas pouvoir tirer de sa grande carcasse l’énergie qui fait de lui l’un des meilleurs à son poste en Europe. Parlant à un ami de cela, celui-ci me corrigea: "tu devrais dire ‘faisait’". Non. L’imparfait ne convient pas. Le temps qui puisse exprimer le doute qu’on ressent aujourd’hui reste à inventer.
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Vincent Kompany, défenseur de Manchester City

Crédit: AFP

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