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Arsenal est au bord de l’implosion et les dirigeants laissent faire…

Bruno Constant

Mis à jour 05/04/2017 à 14:00 GMT+2

PREMIER LEAGUE - Une équipe sans vie, une ambiance toxique à l’intérieur comme à l’extérieur du stade, un entraîneur qui maintient l’incertitude sur son avenir et des dirigeants silencieux qui laissent faire. Bienvenue dans le monde étrange d’Arsenal.

Arsenal's French headcoach Arsene Wenger arrives in the stadium

Crédit: AFP

De notre correspondant à Londres,
De loin, ça ressemble au film Titanic. Tout le monde connaît la fin mais on regarde quand même, avec l’espoir que le bateau ne coulera pas, que Jack - Leonardo Di Caprio, pour les rares qui n’ont pas vu le biopic - ne mourra pas. Peine perdue. C’est le même scénario à Arsenal. Dès la clôture du mercato et le manque évident de renforts capables de donner une autre dimension aux Gunners, on sait que l’équipe a peu de chances de jouer un rôle dans la course au titre. On se force simplement à y croire, ou plutôt à ne plus se l’interdire, depuis le miracle Leicester. Utopie. Il y a d’ailleurs une expression anglaise qui résume assez bien Arsenal : "An accident waiting to happen", littéralement "un accident qui attend pour arriver" que l’on peut traduire par "un désastre en marche".
L’incertitude que laisse planer Arsène Wenger depuis plusieurs semaines sur son avenir rend l’atmosphère électrique, délétère et toxique autour du club et notamment parmi les pro-Wenger et les anti qui ont fini par en venir aux mains à l’intérieur du stade comme à l’extérieur. La question ("allez-vous rester ou non ?") pollue désormais chaque conférence de presse du technicien français. Un média comme Sky a même été jusqu’à lancer une breaking news pour finalement annoncer que Wenger ne… ferait "pas d’annonce sur son avenir aujourd’hui". Risible et ridicule. Comme les scènes de protestation et de soutien des fans envers l’Alsacien. Après l’impression des feuilles A4 l’an passé, l’envol des deux avions au-dessus du stade de West Bromwich, la location de deux camionnettes circulant dans les rues adjacentes de l’Emirates Stadium avec un panneau publicitaire remplacée en tract dimanche dernier, que vont-ils inventer ce mercredi avant la réception de West Ham ? Un bateau sur la Tamise ?
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Certains supporters d'Arsenal espèrent le départ d'Arsène Wenger.

Crédit: AFP

Si Guardiola et Mourinho échouent aux portes du Top 4, comment dire à Wenger qu'il doit arrêter ?

L’étalage de ce grand cirque - il n’y a pas d’autre mot - ajoute un peu plus de nervosité autour du club. Et, pendant ce temps, que font les dirigeants ? Ils laissent faire, restent silencieux et, lorsqu’ils s’immiscent dans le débat, c’est pour annoncer qu’ils ne décideront pas. A l’image d’Ivan Gazidis, directeur exécutif du club, qui a laissé entendre qu’il y aura du changement à Arsenal cet été, "avec ou sans le manager", et que la décision sera "mutuelle", c’est à dire en commun accord avec le manager en question. Vous aurez noté la subtilité.
Or, à l’ombre des caméras, Arsène Wenger a donné une indication sur son avenir. Alors qu’ils étaient attendus devant les médias, Pep Guardiola et lui ont discuté de longues minutes dans le tunnel de l’Emirates. Le Français, très démonstratif, révéla combien il avait toujours faim et envie de continuer. L’Espagnol a déjà apporté son soutien à Wenger en déclarant que "finir dans le Top 4 en Angleterre équivaut à gagner un trophée". Dans l’histoire c’est donc du gagnant-gagnant pour l’Alsacien qui a longtemps brandi cet argument de défense face aux critiques ces dernières années.
S’il échoue, il pourra avancer l’idée qu’il n’a pas envie de laisser le club dans une telle situation. S’il réussit, il pourra stigmatiser les deux "grands" perdants qui ont échoué comme une forme de réussite en soi. Et, dans ce dernier cas, il sera bien difficile de demander le départ de Wenger si Mourinho (avec MU) et Guardiola (avec City) ou Klopp (avec Liverpool) restent à la porte du Top 4. Or, malgré tous ces déboires, Arsenal n’est qu’à sept points de la quatrième place avec un match en retard et huit sur Liverpool qui en comptent deux de plus. En revanche, une chose est sûre, cette saison sera la première de l’ère Wenger qui verra Arsenal devancé par Tottenham (les Spurs possèdent onze points d’avance à huit journées de la fin mais les Gunners comptent un match en retard).
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Guardiola sur Wenger : "Les gens doivent comprendre à quel point le foot est difficile"

L'incertitude sur Wenger ne doit pas être une excuse pour les joueurs

Pour autant, l’incertitude sur l’avenir du manager ne doit pas constituer une excuse pour les joueurs qui se battent avant tout pour le présent et le futur du club en Ligue des champions. Or, depuis quelques rencontres, certains donnent l’impression de ne plus vouloir se battre, du moins pour le collectif, symptomatique d’un vestiaire fissuré et divisé. Si l’individualisme d’Alexis a été pointé du doigt ces dernières semaines, c’est pourtant lui qui a rameuté ses coéquipiers très peu nombreux à venir célébrer le deuxième but de Mustafi qui permettait tout de même aux Gunners de revenir dans ce match pour la seconde fois. C’était pire encore sur le premier but de Walcott où, à côté de lui, Koscielny comme d’autres n’ont pas levé les bras ni même félicité l’Anglais. L’image d’une équipe sans vie, sans âme, sans leader. Une atmosphère étrange relevée en direct par Gary Neville aux commentaires sur Sky puis par Thierry Henry sur le plateau de la chaîne…
Et tant qu’Arsenal continuera à entamer ses rencontres d’importance comme si elle poussait à cinq minutes de la fin pour remonter deux buts de retard, son équipe n’ira nul part. Surtout face à un adversaire qui sait aussi bien se projeter vers l’avant que Manchester City, dimanche. Après seulement trois minutes de jeu, la défense des Gunners se retrouve à trois contre trois procurant la première occasion pour Sterling.
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Arsenal est trop vite dégarni au milieu

Crédit: Eurosport

Moins de deux minutes plus tard, Sané profite d’un espace béant dans la ligne arrière des Gunners et de l’indiscipline défensive de Bellerin pour ouvrir le score. L’Espagnol est sans doute l’un des tout meilleurs à son poste mais, comme le dit Thierry Henry, "le cerveau doit réagir plus vite que les jambes et, avec lui, c’est souvent l’inverse". Le placement du jeune défenseur, qui laisse son adversaire à l’intérieur, est déjà une erreur en soi.
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Hector Bellerin sur le but de Sané

Crédit: Eurosport

Comme celui de ses coéquipiers. Xhaka se laisse attiré par De Bruyne plein axe, laissant un trou énorme derrière lui et surtout devant sa défense. Derrière, tout s’enchaîne. Mustafi n’aurait pas dû attaquer ce ballon de la tête si loin de la ligne médiane, laissant une faille immense entre Koscielny et Bellerin dont profita le génie de la passe De Bruyne. One-nil to Man City. Et Arsenal se retrouve une fois de plus à courir après le score…
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Xhaka aspiré par De Bruyne

Crédit: Eurosport

Xhaka, c'est trois fois plus cher que Wanyama

Est-ce le comportement d’une équipe qui aurait, au contraire, besoin de se rassurer alors qu’elle traverse sa pire série sous l’ère Wenger (4 défaites et 1 seule victoire en 6 journées) ? Etre compact défensivement pour reprendre confiance ? Ou simplement l’attitude suicidaire et indémodable d’une équipe qui répète saison après saison les mêmes erreurs ? On ne parle plus là d’argent ni de transfert, simplement d’intelligence de jeu. Que dire de l’attitude défensive des Londoniens sur les deux corners à West Bromwich (1-3) ? Marquage en zone, pourquoi pas. Mais Ramsey ne se préoccupe pas de Dawson sur le premier but. Sur le banc, le responsable du secteur défensif, ou présenté comme tel depuis son arrivée dans le staff de Wenger, je parle bien sûr de Steve Bould, ne réagit même pas. Ni colère, ni remontrance sur le bord de la touche. A-t-il seulement le droit de se lever du banc ? C’est un autre débat. Seconde période, même situation (corner), même joueur (Dawson), mêmes attitudes, mêmes conséquences. Quatre joueurs d’Arsenal – et je dis bien quatre ! – se jettent au premier poteau délaissant totalement le second. Suicidaire. Après l’épisode du premier but, on aurait pu imaginer un recadrage à la pause. Et non.
Mais, revenons à City. Arsenal parvient à égaliser juste avant la pause. On loue alors la réaction des Gunners. Vous noterez, jamais l’action, toujours la réaction. Mais, deux minutes plus tard, les Londoniens s’inclinent à nouveau. Özil perd le ballon à 30 mètres de son but - ça peut arriver - mais le manque de réaction de l’Allemand à la perte est terrible. Pis encore, peut-être, celui de Xhaka, excentré côté gauche et qui ne revient même pas aider ses coéquipiers. L’été dernier, j’avais émis des doutes sur le recrutement de Xhaka, qui plus est à hauteur de 35 M£ (40 M€), tandis que Wanyama a coûté trois fois moins cher (11 M£) à Tottenham ! Aujourd’hui, le constat est affligeant : Xhaka ne sait pas tacler, il est lent, inadapté à la Premier League et indiscipliné tactiquement. Ses qualités de passe et de frappe avaient été mises en avant à l’époque. Bilan : un but et seulement deux passes décisives en 22 apparitions en championnat.
Cet été, Arsenal se retrouvera avec les mêmes problèmes que l’an passé : trouver un milieu défensif d’envergure, un buteur et peut-être plus si Alexis vient à quitter le navire pour "un club londonien qui a l’ambition de gagner des titres", comme il l’a laissé entendre lui-même. Pour ne pas finir comme Jack dans Titanic.
Bruno Constant fut le correspondant de L'Equipe en Angleterre de 2007 à 2016. Il collabore aujourd'hui avec RTL, Europe 1 et Rfi en tant que spécialiste du football anglais et vous livre chaque sa semaine sa chronique sur la culture foot de Sa Majesté. Pour approfondir le sujet, retrouvez dès ce mardi mon Podcast 100% foot anglais sur l'actualité de la Premier League et du football britannique
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