Premier League | 3e journée : Brighton, le mercato festival
Avec 166,9 millions d'euros, Brighton est le club qui a dépensé la plus grosse somme en net à l'occasion du mercato estival, tous pays confondus. Les Seagulls, qui ne fréquentent la Premier League que depuis 2017, n'ont pourtant pas l'habitude de se distinguer en achetant des joueurs à des montants mirobolants. Mais cette situation n'a rien de surprenant, comme l'explique Philippe Auclair.
Yankuba Minteh (Brighton) à l'occasion du match de Premier League face à Manchester United, en août 2024.
Crédit: Getty Images
L'hiver dernier, Roberto De Zerbi s'était plaint de ne pas avoir été suffisamment soutenu par les dirigeants de Brighton sur le marché des transferts. C'était même en grande partie pour cela qu'il avait rendu son tablier et se retrouve désormais à préparer un déplacement à Toulouse plutôt qu'à Arsenal. Or, trois mois après l'addio à l'Angleterre de l'Italien, Brighton & Hove Albion FC est, de tous les clubs de la planète - tous, sans exception -, celui qui a déboursé le plus lors de ce mercato estival. Pardon?
L'investissement est colossal : 166,9 millions d'euros en net, les dépenses net étant les seules qui donnent une juste idée de l'effort consenti. Chelsea a pu débourser davantage en brut - 261 millions d'euros à trois jours de la clôture du mercato en Angleterre -, mais a en partie équilibré ses comptes en vendant Ian Maatsen, Conor Gallagher, Lewis Hall et Omari Hutchinson pour un montant combiné de 145 millions. Brighton, de son côté, n'a laissé partir que Deniz Undav et Pascal Gross.
/origin-imgresizer.eurosport.com/2024/08/24/4030448-81746608-2560-1440.jpg)
La joie des joueurs de Brighton face à Manchester United.
Crédit: Getty Images
Comment Brighton, club réputé "vendeur" qui n'a découvert la Premier League qu'en 2017 (*), peut se permettre de telles folies - car ce doivent en être, non? - a des allures de mystère, quand le débours actuel est à peu près identique à ce que le chiffre d'affaires du club était en 2021-22. Mais commençons par le pourquoi.
À Brighton, on laisse très peu de choses au hasard
On laisse très peu de choses au hasard à Brighton. Ses dirigeants se souviennent de clubs un temps cités comme 'modèles' en Premier League, comme Brighton l'est aujourd'hui, et dont la chute fut aussi inattendue que leur ascension avait été remarquée. Il n'y a pas si longtemps, Southampton possédait l'une des meilleures académies du pays, un réseau de recruteurs hors pair et la réputation d'être géré par des "visionnaires". La preuve ? Ils avaient eu le nez d'aller chercher Mauricio Pochettino quand presque personne ne s'intéressait à lui. A bien des égards, les Saints étaient un peu les Seagulls du milieu des années 2010. Et puis, patatras.
A force de vendre ses meilleurs joueurs - Adam Lallana, Virgil van Dijk, Sadio Mané - sans les remplacer et de perdre les figures les plus influentes de son encadrement, l'abonné à la Ligue Europa devint un candidat répété à la relégation dont l'unique ambition était de survivre, jusqu'à ce que le fil sur lequel les Saints faisaient de l'équilibrisme finisse par casser il y a un an et demi. Le club qui est remonté dans l'élite il y a quelques mois aura bien du mérite à y demeurer plus d'une saison.
/origin-imgresizer.eurosport.com/2024/04/04/3943093-80075568-2560-1440.jpg)
Tony Bloom, propriétaire de Brighton & Hove Albion, le 10 mars 2024
Crédit: Getty Images
Encore plus spectaculairement, il ne fallut que deux ans à Leicester City, champion en 2016, pour passer du statut de valeur sûre et de "modèle" (5e de PL et vainqueur de la FA Cup en 2017-18) à celui de relégué. Brighton était prevenu, et Brighton s'est bien juré de faire tout son possible pour ne pas être un nouveau Southampton ou un nouveau Leicester. Cela signifie planifier et se préparer à l'inéluctable, à savoir le départ des meilleurs éléments de l'effectif. Cela signifie avoir un plan B, et un plan C, et même un plan D en place pour ce qui est du remplacement d'entraîneurs victimes de leur succès.
Un solde positif de 163 millions d'euros sur deux ans
Vous pouvez être certain que le propriétaire des Seagulls Tony Bloom et son directeur exécutif Paul Barber, les deux hommes qui font la pluie et surtout le beau temps à l'AMEX Stadium, avaient identifié Fabian Hürzeiler comme un possible successeur à De Zerbi bien avant qu'il ne fasse retrouver la Bundesliga.1 à Sankt Pauli. Vous pouvez aussi être certain que si le jeune manager allemand avait repoussé leurs approches et qu'il avait fallu passer au prochain nom sur la liste, ils ne se seraient pas retrouvés face à une feuille blanche.
Les deux dernières saisons n'avaient pas seulement été les plus satisfaisantes en termes de résultats dans l'histoire de Brighton, 6e de PL et 8e de finaliste de la Ligue Europa. Elles avaient aussi été les plus profitables sur le marché des transferts, avec un solde positif de 163 millions d'euros sur deux ans, généré par les ventes de, entre autres, Marc Cucurella, Léandro Trossard, Yves Bissouma, Moisés Caicedo et Alexis McAllister. 163 millions, autrement dit à peu près ce que Brighton a dépensé cet été, ce qui n'est évidemment pas une coincidence.
L'un des patrons financiers de la Premier League
Brighton savait devoir redonner de l'épaisseur à son effectif, en allant chercher des joueurs utilisables d'emblée (comme Yankuba Minteh, très en vue dans la victoire in extremis sur Manchester United le week-end dernier), mais aussi susceptibles de permettre au club de faire une plus-value considérable en cas de revente. Jeunes, donc, et ils le sont. La moyenne d'âge des sept recrues de l'été (**) est de 20 ans et 7 mois.
La différence est que Brighton a désormais les moyens de fixer la barre plus haut, sans devoir se reposer exclusivement sur les données et les algorithmes dont Tony Bloom a fait usage pour devenir milliardaire sur le marché asiatique des paris sportifs avant de donner une nouvelle vie à son club de toujours. Brighton n'était pas le seul club à s'intéresser à l'avant-centre de Leeds Georginio Rutter, par exemple. Et, il y a deux ou trois ans, Brighton n'aurait pas eu les reins suffisamment solides pour activer la clause libératoire du jeune attaquant français à Leeds United (47,5 millions d'euros, tout de même). Mais les choses ont changé depuis.
Financièrement parlant, Brighton est devenu l'un des patrons de la Premier League. En 2022-23, alors que la plupart des autres clubs du championnat d'Angleterre affichaient des pertes considérables, Everton et Nottingham Forest se voyant même déduire des points pour avoir enfreint les règles de la PL en la matière, Brighton annonça des revenus et des bénéfices record, de respectivement 242 et 146 millions d'euros.
Plus qu'un poil à gratter
Et c'était sans prendre en compte les ventes de Moisés Caicedo et de Robert Sanchez à Chelsea, conclues après le terme de l'exercice fiscal, et qui rapportèrent 139 millions au club. Celles-ci apparaîtront dans les prochains comptes, tout comme les revenus dérivés de la participation des Seagulls à la Ligue Europa (10,9 millions de primes de performance, plus billetterie et droits TV). Il ne serait pas impossible que le "petit" Brighton, 10e du classement des clubs les plus riches de la Premier League en 2022-23, se positionne encore plus près du "Big 6" lorsque leur prochain bilan sera publié.
/origin-imgresizer.eurosport.com/2024/08/24/4030403-81745708-2560-1440.jpg)
Danny Welbeck (Brighton).
Crédit: Getty Images
Aussi, ce à quoi on a assisté cet été n'avait rien d'un coup de folie. C'était la conséquence on ne peut plus logique d'une stratégie à long terme qui s'est avérée payante - au sens littéral comme au figuré. Brighton, de par sa situation géographique et son histoire, ne pourra sans doute jamais déboulonner les grands clubs de Londres, Liverpool et Manchester. Mais Brighton est déjà bien plus que le "poil à gratter" de la Premier League. Et Brighton le demeurera.
(*) Brighton joua également quatre saisons dans la vieille Division One entre 1978 et 1983.
(**) Georginio Rutter, Yankuba Minteh, Mats Wieffer, Brajan Gruda, Matt O'Riley, Ibrahim Osman et Malick Yalcouyé.
Sur le même sujet
Publicité
Publicité
/origin-imgresizer.eurosport.com/2025/09/24/image-0f5b5ecf-f8d6-4b24-8227-3e8855a17ca0-68-310-310.jpeg)