France - Ukraine (4-0) - N'Golo Kanté, 10 ans que ça dure et c'est loin d'être terminé

A la 35e minute, alors que France – Ukraine était plongé dans un puissant formol et que le public était comme anesthésié par ce qu’il voyait, le Parc des Princes s’est réveillé d’un seul coup. Sur une action presque banale : au combat, N’Golo Kanté arrache un ballon dans son plus pur style de chewing-gum qui ne veut pas se décoller de la semelle.

Le stade salue la récupération de balle comme il s’enivrerait sur un drible décisif. Parce que l’histoire d’amour avec N’Golo Kanté est assez unique. Joueur attachant par son humilité et sa timidité, il est aussi associé aux plus grandes conquêtes des Bleus. Il fut le chouchou du pays en 2018 et dans une équipe où les immortels de Russie ont fini par tous s’en aller, à l’exception de Kylian Mbappé, Lucas Hernandez et… Florian Thauvin. Kanté incarne aussi cette époque bénie. 

Mais sa présence ne ravive pas que des bons souvenirs. Kanté, même à 34 ans, c’est toujours le présent voire le futur. Il ne doit pas seulement son retour en Bleu, un an après sa dernière cape, aux forfaits d’Aurélien Tchouaméni ou Adrien Rabiot. Jeudi, il a prouvé qu’il avait encore les cannes et la faim d’un jeune homme. Avec 103 ballons touchés, 9 récupérations, 8 duels gagnés et 94% de passes réussies, dont une, décisive pour Michael Olise, sa prestation prouve qu’il a sa place dans ce groupe et même, pourquoi pas, dans son onze.

"Je ne sais pas s’il va aller à la Coupe du monde, je ne suis pas coach, mais N’Golo, c’est un joueur spécial, témoignait Kylian Mbappé après le succès de jeudi (4-0). Je pense que dans l’histoire de l’équipe de France, c’est un joueur important. On est très content de l’avoir avec nous, on va voir s’il sera sélectionné, mais s’il est sélectionné, c’est toujours un atout de choix." Et il fallait sans doute prendre au sérieux Didier Deschamps la semaine dernière quand il affirmait que son milieu de terrain était "à son meilleur niveau".

S’il ne l’a pas sélectionné pendant un an, c’est d’abord parce que Deschamps voulait tester d’autres options et lancer de nouvelles têtes. Manu Koné en a profité pour se faire une place. Mais, au fond, avec Kanté, le sélectionneur sait ce qu’il a en magasin. La question qu’on se pose aujourd’hui est la même qu’on se posait en juin 2024 quand il avait surgi, par surprise, dans le groupe pour l’Euro. Après deux matches de préparation, la réponse était évidente : oui, il avait toujours le niveau pour prétendre démarrer les rencontres. Et il fut, dans un rôle plus haut, l’une des individualités les plus constantes des Bleus à l’Euro allemand.

Quand les Varane, les Lloris, les Pogba, les Griezmann, usés par les cadences et les exigences du très haut niveau, ont fini par s’éloigner pour de bon, ou non, du groupe, Kanté, lui, est le dernier rescapé de cette génération. A son rythme, tous les douze mois, il rappelle à tout le monde qu’il est encore là. Sans taper du poing sur la table, avec ce sourire désarmant et cette façon de presque s’excuser d’être là. Pourtant, comme le résume parfaitement Lucas Digne, "avec NG, c’est toujours plus facile". C’est vrai depuis 10 ans en équipe de France et sans doute pour quelques mois, au moins, encore.