Rodri, Carvajal, Carboni... "L'épidémie" de ruptures du ligament croisé, indicateur du burn-out ?

Ils paraissent si nombreux que certains parlent désormais "d'épidémie". "Ils", ce sont ces joueurs des principaux championnats européens pour lesquels la saison 2024-2025 est déjà pourrie par une rupture du ligament croisé. Parmi eux, il y avait eu Terem Moffi en Ligue 1, Gianluca Scamacca en Serie A... Dernièrement, il y a eu des joueurs comptant parmi les références à leur poste : Rodri, pilier de Manchester City, puis Dani Carvajal, cadre du Real Madrid.

Hasard ou non, ces deux derniers avaient critiqué, à peine quelques jours plus tôt, la lourdeur de calendriers toujours plus chargés. Ils sont donc devenus victimes d'un surmenage criant. Et, par un raccourci beaucoup moins établi, les ruptures de ligaments croisés sont elles aussi devenues une conséquence directe de cette tendance. La "maladie" des grands joueurs trop sollicités, en somme.

Il est, pourtant, extrêmement difficile, pour ne pas dire impossible, d'établir un lien concret et direct entre ces deux constats. "Il n'y a pas d'étude scientifique fiable sur le sujet, nous confie Nicolas Dyon, préparateur physique au Borussia Mönchengladbach. La raison est simple : il y a une infinité de scénarios pouvant engendrer une rupture du ligament. Ça peut être à la réception d'un saut, sur une glissade, un mauvais appui, à la suite d'un contact avec un autre joueur, ou après un déséquilibre musculaire. On peut penser que ce type de blessure intervient souvent en période de surmenage, mais c'est assez subjectif."

Une étude publiée en 2020, portant sur 134 ruptures de ligaments croisés survenues au cours de dix saisons de football professionnel en Italie démontre que 56% d'entre elles ont été provoquées par un contact, contre 44% sans aucun contact. Avec des effets provoqués par des causes aussi distinctes, difficile de remonter jusqu'à la source.

Les chiffres manquent, et ceux qui existent ne permettent pas d'illustrer une éventuelle hausse de ces ruptures ligamentaires avec l'augmentation du nombre de matches disputés - notamment par les grands clubs - observée ces dernières années.

En revanche, de nombreuses données démontrent que le nombre de blessures de tous types progressent. En Premier League, par exemple, elles ont augmenté de près de 25% la saison dernière, par rapport à l'année précédente qui, avec la Coupe du monde 2022, avait lancé un cycle particulièrement exigeant pour les joueurs.

"Scientifiquement, on sait que le facteur de blessure le plus important, c'est le stress, analyse Anthony Mette, coach mental et auteur du livre "Les 10 secrets du mental des champions". Les joueurs se blessent parce qu'ils ont subi un stress aigu sur des périodes assez importantes. Ils peuvent donc perdre leur attention sur un appui par exemple. Et ça peut provoquer une fragilité, une blessure plus ou moins bête."

La hausse des blessures mineures, ou des fragilités, augmente-t-elle le risque de ruptures du ligament croisé ? Un constat laisse penser que c'est effectivement le cas. Selon le site "Premier Injuries", qui répertorie avec minutie toutes les blessures affectant des joueurs de Premier League, plus de 30% des ruptures du ligament croisé se concentrent sur deux mois en particulier : août, et janvier. Autrement dit, les deux mois durant lesquels les joueurs ont un peu plus tendance à "masquer" leurs pépins physiques, ou à les minimiser, afin de ne pas se retrouver sur le flanc dès le début de saison, ou d'année. Quitte à s'exposer, eux aussi, à "l'épidémie".