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Sebastián Abreu, histoires d'allers et retours

Thomas Goubin

Mis à jour 31/12/2017 à 10:08 GMT+1

Attaquant excentrique, l'international uruguayen, Sebastián Abreu, 41 ans, a signé dans le vingt-sixième club de sa carrière, mardi dernier. Un record et une manière anecdotique de rester dans l'histoire de son sport. Retour sur le parcours prolifique de ce personnage hors-norme, qui avait connu son quart d'heure de gloire lors du Mondial 2010.

Sebastian Abreu

Crédit: Getty Images

De la première division paraguayenne (Sol de América), à la deuxième division chilienne (Puerto Montt), en passant par l'élite du Salvador (Santa Tecla), ou la quatrième division brésilienne (Bangu), et même par de la deuxième division uruguayenne (Central Español). Voilà comment Sebastian Abreu a passé ses deux dernières années.
Un parcours de fugitif qui ne peut se permettre de s'éterniser dans un même lieu. Ou de chasseur de primes. En réalité, le longiligne international uruguayen aux soixante-dix capes courrait surtout après un record, celui du gardien allemand, Lutz Pfannenstiel, qui avait défendu les couleurs de vingt-cinq clubs au cours de sa carrière, d'Allemagne en Namibie, en passant par le Canada ou la Finlande. Une odyssée achevée en 2011. Mardi 26 décembre, Sébastien Abreu a ajouté un vingt-sixième club à sa panoplie, en signant à l'Audax Italiano, modeste pensionnaire de la première division chilienne.
Sebastian Abreu ne le cache pas : il a fini par faire d'une fin en soi la perspective de dépasser la marque du méconnu Pfannenstiel. "Comme Christophe Colomb, on voyage dans toute l'Amérique en trompant tout le monde", s'est-il même amusé dans une interview donnée le 15 décembre au quotidien uruguayen, El País. Abreu n'a pourtant rien d'un mercenaire las, ou de ces footballeurs rincés mais pourtant incapables de raccrocher les crampons.
Si sa chevelure a perdu en longueur avec le temps, l'Uruguayen continue de faire trembler les filets à une belle moyenne. Onze buts en treize matches indique la fiche statistique de sa dernière saison sous les couleurs de Puerto Montt. La qualité des performances de l'attaquant d'1,93m lui a même valu d'être élu meilleur joueur de la deuxième division chilienne, mais a aussi convaincu Audax Italiano de devenir le vingt-sixième employeur de sa carrière.
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Sebastian Abreu

Crédit: Getty Images

Le goût au voyage

Abreu est un nomade rentable. S'il a beaucoup déménagé au cours de sa carrière débutée en 1994 au Defensor Sporting, son club formateur, il a aussi affiché un ratio buts-minutes avantageux à peu près partout où il est passé. Des buts fêtés en jetant une chaussure dans le public, en enfilant un masque de super-héros, ou en suçant une tétine. L'Uruguayen n'est pas surnommé "El Loco" pour rien. Au total, Abreu a inscrit plus de quatre-cent buts au cours de sa carrière. Son plus célèbre étant évidemment cette Panenka qui avait conclu la séance de tirs aux buts face au Ghana et avait envoyé l'Uruguay en demi-finale du Mondial 2010.
En 1998, la carrière naissante de Sebastian Abreu a connu un premier grand tournant. Après avoir marqué plus d'un but tous les deux matches en deux ans sous les couleurs de San Lorenzo (Argentine), il est recruté par le Deportivo la Corogne, alors puissance montante de la Liga. Opportuniste, excellent joueur de tête, intelligent dans son placement, Abreu manque toutefois peut-être d'un peu de vitesse et d'aisance technique pour le top niveau.
Après une première moitié de saison à trois buts en quinze matches, il ne convainc, en tout cas, pas l'entraîneur de ce qui allait devenir le "Superdepor", Javier Irureta, et va commencer à enchaîner les prêts. Ce sera d'abord au Gremio Porto Alegre (Brésil), puis aux Tecos Guadalajara (Mexique), avant de revenir à San Lorenzo. Abreu, qui a signé pour sept ans à La Corogne, enchaînera huit prêts pendant son bail galicien. Plutôt que de se contenter de toucher sa paie, l'Uruguayen a préféré connaître du pays. Et a pris goût au voyage.
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Sebastian Abreu lors de Uruguay - Ghana en 1/4 de finale de la Coupe du monde 2010

Crédit: Getty Images

Un nomade impliqué

Mais que fait courir Abreu ? L'Uruguayen assure que ce sont les "défis" qui l'animent, et pas l'argent, lui qui gère sa carrière sans agent. En 2008, cet homme marié et père de quatre enfants avait ainsi quitté River Plate pour le Beitar Jerusalem, alléché par la perspective de disputer la première Ligue des champions de sa carrière. Le club israélien sera éliminé en tour préliminaire... En 2010, il signe à Botafogo, la légendaire institution brésilienne qui veut retrouver de son lustre. En deux ans, le numéro 13, son chiffre fétiche, y disputera 105 matches, le record de longévité de sa carrière mouvementée.
Comme un peu partout où il est passé, il y deviendra une idole. Car si le nomade impénitent s'éternise rarement, Abreu s'investit avec passion dans chacun des projets auquel il est convié. Généreux sur le terrain, leader dans le vestiaire, son caractère excentrique l'aide aussi à se faire adopter presque sur-le-champ par les supporters de Grèce (Aris Salonique), du Mexique (sept clubs de première division, dont les Tigres), ou d'Equateur (Aucas), quelques uns des pays où il a officié. Au Brésil, un morceau de baile funk lui sera ainsi dédié quelques semaines seulement après son arrivée à Botafogo.
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Sebastian Abreu

Crédit: Getty Images

Le maître de la "Panenka"

Partout, El Loco fait aussi beaucoup parler pour son goût prononcé pour la Panenka. Quand il défendait les couleurs de l'ancien club de Garrincha, il en tentera même deux au cours d'un même match. La première manquée, la deuxième réussie. Au Mexique, ce pêché mignon de l'Uruguayen avait failli coûté une descente aux Tecos, quand sa Panenka avait été arrêtée lors de l'avant-dernière journée.
L'Uruguayen avait alors été accusé de vouloir tirer la couverture à lui, plutôt que de penser aux intérêts de son employeur. “Mes décisions sont toujours responsables", s'était-il défendu, en 2011, interrogé par So Foot. "Je ne fais pas ces gestes pour humilier le gardien ou me faire mousser. La minute, l’enjeu, le type de gardien, son expérience, sont des variables que je prends toujours compte. A la Coupe du monde, j’avais observé que sur les quatre tirs précédents, le goal du Ghana avait choisi son côté un pas avant la frappe. Le cinquième penalty étant décisif, j’ai estimé qu’il y avait peu de probabilité qu’il ne bouge pas de sa position.”
Globe-trotter le plus prolifique de l'histoire, Sebastian Abreu peut revendiquer un autre record : il a changé trente-deux fois de club. L'intenable uruguayen a ainsi effectué cinq séjours, étalés sur la période 2001-2015, au Nacional Montevideo, l'un des deux grands du football uruguayen, qui est aussi son club de cœur. Le footballeur aux multiples conquêtes assure d'ailleurs n'avoir qu'un grand amour, le maillot des Bolsos, qu'il peut même porter sous les moult tuniques qu'il a défendu.
En 2001, pour fêter son premier titre avec le Nacional, l'attaquant déjanté avait tenu une promesse en parcourant à vélo les cent kilomètres qui séparent le stade des Bolsos de la vierge de Verdun en compagnie du médaillé olympique uruguayen de la discipline Milton Wynants et d’un peloton de supporters. Au Nacional, Abreu a aussi accompagné l'émergence d'un jeune attaquant qu'il guidera lors de ses premiers pas avec l'équipe professionnelle : le désormais Barcelonais, Luis Suarez. Parrain de l'un de ses fils, Abreu gagnera en sa compagnie la Copa América 2011, son dernier fait d'armes avec la Celeste qu'il ne fréquente plus depuis 2012.
Où s'arrêtera Abreu ? Passionné de football qu'il aimait analyser en compagnie de Pep Guardiola quand ils ont partagé le vestiaire des Dorados Sinaloa (2006), au Mexique, l'attaquant ne parle toujours pas de retraite. Cet ex-basketteur, qui a défendu les couleurs de la sélection uruguayenne en moins de dix-sept ans, assure d'ailleurs prendre particulièrement soin de son corps, en allongeant ses séances d'entraînement et en soignant particulièrement son alimentation. Ne dit-on pas qu'il s'agit de l'un des secrets de la longévité ?
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Sebastian Abreu lors de Uruguay - Ghana en 1/4 de finale de la Coupe du monde 2010

Crédit: Getty Images

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