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Jusqu’où l’exigence du tifoso peut-elle être tolérée ?

Valentin Pauluzzi

Publié 10/07/2017 à 10:32 GMT+2

SERIE A - Faire part de son mécontentement est un des droits sacrosaints du supporter qui est avant tout un consommateur. Or, il ne doit pas perdre de vue le produit qu’il a choisi. Ainsi, certains coups de gueule sont parfois difficiles à comprendre.

Supporters de la Fiorentina pas contents

Crédit: Getty Images

Cela a commencé par des banderoles de contestation, un classique en Italie, et cela s’est conclu, pour le moment, par une mini-manifestation organisée par une partie des ultras de la Fiorentina. Le contenu du cahier des charges ? Saison décevante, direction absente et tout le toutim. Le 26 Juin, un communiqué publié sur le site officiel de la Viola récitait ces mots : « Les propriétaires de l’ACF Fiorentina annoncent être absolument disponibles, vue l’insatisfaction d’une partie des supporters, à s’écarter et mettre le club à disposition de ceux qui veulent l’acheter pour pouvoir le gérer comme bon leur semble. » Les frères Della Valle en ont leur claque d’être régulièrement remis en cause alors que le club se porte bien. Une situation à la limite du paradoxal que vivent les propriétaires d’autres équipes renommées.

La Fiorentina est bien à sa place

Numéro 5, c’est la position occupée par la Fiorentina au classement all-time de la Serie A, soit à partir de la création du championnat à poule unique en 1929-30. Depuis le retour du club parmi l’élite après la faillite de l’été 2002, elle se classe en moyenne au septième rang avec pas moins de 6 quatrièmes places et une cinquième. Le tout en ayant régulièrement le 6e budget de la Botte et avec des comptes en ordre (un peu moins de 3 millions d’euros de déficit sur le dernier bilan financier). Un postulat de départ qui met de suite les choses au clair : la Viola est en phase avec son potentiel économique et ses résultats historiques. 8e cette saison, le club de la splendide Florence a lutté jusqu’au bout pour une qualification en Europa League avec les deux formations milanaises, aux moyens bien plus conséquents. Enfin, il y a un an et demi, les hommes de Paulo Sousa (parti depuis) se sont mêlés un moment à la course au titre.
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2017, Borja Valero, Fiorentina, Getty Images

Crédit: Getty Images

La contrariété des supporters découle également de la vente imminente de plusieurs cadres de l’équipe. Concernant Borja Valero, les torts sont encore à attribuer, mais les cas Kalinic et Bernardeschi sont limpides. L’attaquant croate a clairement annoncé vouloir être transféré au Milan, tandis que l’ailier a refusé une prolongation de contrat avec une jolie hausse de salaire à la clé pour tenter de finir à la Juve. Quelle est la faute des dirigeants ? De ne pas faire miroiter des objectifs illusoires à leurs joueurs ? De rester dans les clous de leur budget afin de ne pas risquer une nouvelle banqueroute ? En 15 ans, Diego et Andrea Della Valle ont injecté 220 millions pour compenser les pertes tout en ramenant rapidement le club à sa place (8 qualifications européennes en 13 tentatives). Que peuvent-ils faire de plus ?

Eux aussi font quasiment le maximum

Maintenir le bon cap, pérenniser sa présence dans le top 8 italien est une réalité que de nombreux tifosi ont du mal à apprécier à sa juste valeur. En suivant l’équation budget/prestige/résultats, les contestations des supporters interistes et milanistes de ces dernières années sont tout à fait légitimes, mais ce sont les seuls en droit de se plaindre. Or, ça grogne souvent ailleurs, notamment dans la capitale. La Roma enchaîne les secondes places en championnat, c’est d’ailleurs son classement sur les 10 dernières saisons de Serie A. Pas de titres certes, mais un record personnel de points amélioré deux fois en trois ans. Elle a courageusement tenu tête à une Inter stratosphérique d’abord puis à une Juve cannibale ensuite.
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2017, Kostas Manolas, Roma, Getty Images

Crédit: Getty Images

Même topo pour la Lazio, européenne six fois en dix ans et donc elle aussi dans les cordes. C’est vrai, on parle de clubs capables de remporter le scudetto au début de ce millénaire, mais à quel prix ? La faillite était assurée sans la bienveillance de l’état italien. Même du côté de Naples, les reproches ne sont pas rares alors que le Napoli est devenu un modèle de gestion économique, et propose une qualité de jeu que tout le monde loue, sans oublier les huit qualifications européennes consécutives.

Combattre la frustration par la trahison ?

Evidemment, cela n’autorise pas les propriétaires respectifs à en rester là, la hiérarchie économique n’est pas inaltérable et des surprises peuvent advenir. Toutefois, dans le football moderne, Leicester est un miracle qui sera difficilement reproductible. L’écart entre les riches et les pauvres continue d’augmenter, et pour des questions de salaire et d’ambition, les clubs ballottant entre les deux catégories sont voués à voir leurs meilleurs éléments partir à un moment ou un autre pour rejoindre la dizaine de Top Clubs composant l'élite du foot. Un cercle un brin vicieux et quasi irréversible, à moins d’un investisseur généreux, et encore, le fair-play financier de l’UEFA et l’attractivité relative de la Serie A en limitent les investissements. Jouer l’Europe, glaner quelques trophées secondaires et se mêler de temps en temps à la course au titre, voilà ce à quoi sont cantonnés des formations comme la Lazio, la Roma, la Fiorentina et le Napoli. Des équipes qui totalisent d’ailleurs neuf scudetti à eux quatre, ce qui veut bien dire qu’un titre de champion relève du domaine de l’exception. Aucune d’entre elles n’est donc en sous-régime.
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Diego Della Valle, Andrea Della Valle, Fiorentina, 2013 (Getty Images)

Crédit: Getty Images

Alors, l’esprit contestataire a aussi pour utilité de maintenir les dirigeants en alerte, mais parallèlement, il serait souhaitable de savourer un peu mieux une finale de coupe, une seconde place, une campagne européenne, une gestion financière saine ou un bon mercato. Dans le cas contraire, il ne reste qu’une solution, retourner sa veste et se mettre à supporter la Juve, le Milan ou l’Inter où les instincts primaires du tifoso ont plus de chances d’être assouvis.
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