Des sommets à la relégation en troisième division italienne : La Sampdoria Gênes ou la chute d'un club mythique

C'est la chute d'un club mythique. Pour la première fois de son histoire, la Sampdoria Gênes évoluera la saison prochaine en troisième division italienne après avoir terminé à la 18e place de la Serie B mardi soir. Le retour des anciennes gloires du club dans la dernière ligne droit, dont un certain Roberto Mancini, n'aura rien changé à un destin devenu presque inévitable.

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Video credit: Eurosport

Gênes qui rit, Gênes qui pleure. Pendant que les supporters de la Sampdoria pleuraient à chaudes larmes, mardi soir, après la descente historique de leur club en troisième division italienne, ceux du Genoa, le grand rival, n'ont eu aucune pitié en descendant dans les rues pour tirer sur l'ambulance blucerchiata. Klaxons, chants, feux d'artifices : la nuit de mardi à mercredi a été terriblement longue pour les tifosi de la "Samp". Eux ont pourtant tout tenté pour sauver ce qui pouvait encore l'être.
Ces dernières semaines, ils ont ainsi rempli les tribunes du mythique Stadio Marassi pour pousser les leurs à se maintenir, au moins, en Serie B. Le minimum syndical pour un club annoncé comme favori à l'aube de cet exercice 2024-2025. Ils ont aussi fait tous les déplacements possibles, qu'importe les kilomètres à parcourir et l'argent à sortir. La Sampdoria était en danger de mort. Mais tous leurs sacrifices n'auront servi à rien. Après un ultime nul sur la pelouse de la Juve Stabia (0-0) lors de la dernière journée, la Sampdoria a officiellement été reléguée au troisième étage du Calcio.
Jusqu'à mardi, le club ligure faisait partie des sept équipes italiennes qui n'avaient jamais évolué en Serie C, parmi lesquels l'Inter, l'AC Milan et la Juventus Turin. C'est désormais révolu. Une nouvelle terrible, dramatique, pour un club qui a marqué l'ensemble d'une génération dans les années 90.
Pour les plus jeunes qui liront ses lignes, la période dorée de la Sampdoria remonte au début des années 1990 : portée par les exploits des "jumeaux du but" ("i gemelli del gol") Roberto Mancini et de Gianluca Vialli, décédé en 2023, elle avait remporté la défunte Coupe des vainqueurs de Coupe (C2) en 1990, puis son seul titre de champion d'Italie en 1991, avant d'atteindre la finale de la Coupe d'Europe des clubs champions (C1) en 1992 contre le FC Barcelone (défaite 1-0 a.p.).
De toutes ces années, il n'en reste aujourd'hui plus que les souvenirs, le maillot et le public. Malgré ses déboires sportifs, la Samp est en effet le club le plus suivi de Serie B avec une moyenne de 22 000 spectateurs par match à domicile. La situation s'est toutefois précipitée au fil de la saison : les tifosi avaient caillassé le bus de leur équipe fin mars près une lourde défaite à domicile (3-0).

Le retour des gloires n'aura servi à rien

Comme pour tenter de conjurer le sort, la Sampdoria avait tenté de convoquer les esprits de sa période faste. Alberico Evani et Attilio Lombardo, deux proches de la légende du club Roberto Mancini, avaient récemment pris en main les destinées de l'équipe. Ils faisaient partie de son staff lorsque le meilleur buteur de l'histoire de la Samp (171 buts entre 1982 et 1997), a été sélectionneur de l'équipe d'Italie et a conduit la Nazionale au sacre européen en 2021.
Ce dernier, lui, n'avait certes aucun rôle officiel dans l'organigramme du club, mais sa présence au centre d'entraînement de Bogliasco ces dernières semaines était fréquente. Appelé à la rescousse pour sauver les meubles, le "Mancio" n'avait pu refuser, à condition toutefois de ne pas être en première ligne. C'est dans ce sens qu'il s'était refusé à s'asseoir sur le banc pour ces dernières journées. Lui œuvrait en coulisses, presque désespérément, se sentant investi d'une mission quasi impossible. "Le club a très bien réagi. On leur a fait vivre un enfer, mais il ont répondu de la meilleure manière", s'était réjoui à l'AFP Emanuele Vassallo, le président d'un des principaux clubs de supporters, la Federazione Clubs Blucerchiati. "Rappeler ceux qui ont fait partie de notre âge d'or nous a galvanisé et a ramené l'espoir : on peut décrocher notre maintien", espérait-il alors.
Les héros de la "Sampd'oro" voulaient tenter le miracle, aussi, pour rendre hommage à leur ancien coéquipier Gianluca Vialli, qui avait tenté de racheter le club il y a quelques années. Ils lui connaissaient l'amour et l'attachement de ce club. Après la première victoire à domicile face à Cittadella (1-0) le 13 avril dernier, Lombardo, très ému, avait alors porté ses mains vers le ciel juste après le coup de sifflet final. L'opération sauvetage semblait alors encore possible. Simple illusion.
Malgré l'euphorie retrouvée, la Sampdoria a fini par chuter pour de bon. Même des vieux roublards comme Fabio Borini (passé par Liverpool, la Roma et l'AC Milan) et M'Baye Niang (AC Milan, Montpellier, Rennes, Bordeaux...), sans oublier une autre vieille connaissance de la Ligue 1 comme Rémi Oudin (Reims, Bordeaux), n'ont rien pu y faire. Le deuxième cité, qui était parvenu à sauver Empoli dans l'élite à l’ultime seconde la saison dernière, a même manqué un but tout fait mardi soir en fin de match. Mais la descente aux enfers des Blucerchiati remontent à bien plus loin qu'un simple raté. Cette relégation sanctionne également une saison catastrophique marquée par trois changements d'entraîneur, des rotations invraisemblables chez les gardiens (3 différents lors des 5 premières journées), une piètre série de résultats (14 matches sans victoire de fin octobre à février) et une nervosité ambiante (3 rouges en 3 matches, mise au vert, contestation des tifosi...).
La Samp a touché le fond et son futur est très sombre
Reléguée en Serie B en 2023, la "Doria" collectionne les crises depuis. Proche de la faillite il y a deux ans, le club a été sauvé in extremis par le président actuel Matteo Manfredi et l'ancien propriétaire de Leeds United, Andrea Radrizzani, qui s'est depuis retiré. Les comptes sont toujours dans le rouge avec des pertes de 29,8 millions d'euros et 136,7 millions d'euros de dettes. Mais le nouvel homme fort de la Sampdoria, l'homme d'affaires singapourien Joseph Tey, qui détient 58% du capital, se disait ambitieux : "Je n'irais pas si je ne pensais pas que ce serait rentable", déclarait-il récemment à Channel News Asia. La plateforme norvégienne d'investigation numérique Josimar révélait toutefois que Tey était aussi lié à l'opérateur de jeux et paris sportifs FUN88. La Fédération italienne n'avait finalement rien trouvé à redire.
"Tous les grands clubs italiens appartiennent en partie ou entièrement à des fonds d'investissement, rappelait Vassallo à l'AFP le 20 avril dernier. C'est la réalité pour tout le monde, donc ce n'est pas ce qui nous inquiète. Ce qui nous inquiète, c'est que ce type de propriétaire n'apporte pas de résultats sur le terrain." Le temps lui donnera malheureusement raison.
Difficile, aussi, d'oublier la gestion catastrophique du fantasque Massimo Ferrero, contraint de démissionner de la présidence en décembre 2021 après avoir été arrêté dans le cadre d'une affaire de banqueroute frauduleuse. À l'époque, la Sampdoria avait même eu du mal à assurer le paiement de certains salaires, se voyant contrainte à négocier au début de l'année avec ses joueurs un accord pour éviter une sanction sportive.
C'est dire si le mal remonte à loin. Pour tout le Calcio, forcément marqué par la chute de l'un de ses piliers, la crainte est désormais d'une possible faillite et la nécessité de repartir de zéro. "La Samp a touché le fond et son futur est très sombre", prévenait d'ores et déjà La Gazzetta dello Sport dans son édition mardi. Comme si la lumière n'était pas prête d'apparaître dans ce tunnel sans fin.
(Avec AFP)
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