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Derrière Paris, le désert

Eurosport
ParEurosport

Mis à jour 01/09/2011 à 14:03 GMT+2

En France, les investissements massifs du PSG n'ont pas reboosté le marché des transferts, qui s'est clôturé dans la nuit de mercredi à jeudi. Contraints de travailler dans l'urgence, les clubs de Ligue 1 se sont surtout évertués à maîtriser leurs dépenses. Décryptage.

FOOTBALL 2011 PSG - Pastore

Crédit: AFP

Le rideau est tombé. Depuis minuit, le mercato d'été a fermé ses portes. Et comme chaque année, le marché des transferts s'est animé dans la dernière ligne droite. Les clubs français ont négocié jusqu'au bout, à la recherche des bonnes affaires, en quête de solutions d'urgence. "C'est un peu caricatural, mais on attend les dernières heures pour solder les invendus", nous explicite Christophe Mongai, l'agent de Milan Bisevac et de Frédéric Kanouté.
Cette tendance à s'activer tardivement ne date pas d'hier. Elle s'explique. "Durant les deux premiers mois, les entraîneurs rêvent de joueurs inaccessibles, nous confie Christophe Hutteau, qui gère les intérêts de Mathieu Valbuena et de Charles Kaboré. Et puis soudain, dans les quinze derniers jours, la raison prend le dessus sur la passion. C'est aussi vrai pour certains joueurs, qui sont complètement déconnectés de la réalité du marché. Résultat : fin août, ils acceptent un salaire qu'ils refusaient deux mois plus tôt. Ils ne sont plus en position de force pour négocier. Parfois, il arrive même que des présidents en profitent pour revoir leur proposition à la baisse."
Bourgoin: "Une immense partie de poker"
C'est un peu ça, le marché des transferts. Un "grand bluff organisé, une immense partie de poker", dixit Gérard Bourgoin. Durant de longues semaines, le président de l'AJ Auxerre a repoussé les assauts lyonnais au sujet de Delvin Ndinga. "Certains ont un tel sentiment de supériorité qu'ils se permettent de faire des propositions ridicules ou de fixer des prix astronomiques, en se disant qu'ils vont grappiller quelques millions d'euros. Mais ça ne marche comme ça." Pour paraphraser un autre agent, qui souhaite garder l'anonymat, "les clubs cherchent à faire des économies de bouts de chandelle, au risque de tout faire capoter".
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Gérard Bourgoin, président Auxerre

Crédit: AFP

Le cru 2011 n'a pas dérogé à la tradition. A croire Christophe Mongai, "les transactions ont été assez nombreuses cet été, mais elles n'ont pas été très onéreuses". Si les clubs hexagonaux ont regardé à la dépense, "c'est parce qu'on est dans une période transitoire". "Ils sont raisonnables, et ils ont raison de l'être, affirme l'économiste du sport, Frédéric Bolotny. La période des transferts représente des enjeux économiques capitaux dans le budget d'un club. Il y a nombreuses incertitudes, liées notamment au fair-play financier et à la négociation des droits TV, qui n'est pas encore bouclée." Pour "minimiser les risques et compenser un réel manque de liquidités", les prêts avec option d'achat sont devenus monnaie courante.
Bolotny: "Lyon essaie de la jouer malin"
Sur un marché "volatile", chaque transfert s'apparente à une prise de risques. A un pari sur l'avenir. "Les clubs ont aujourd'hui moins le droit de se tromper qu'il y a encore quelques années", note Hutteau. "Quand on achète un joueur, on a une visibilité sur la masse salariale qu'il représente, reprend Bolotny. Mais pas sur sa future valeur à la revente. A l'exception de joueurs à forte notoriété comme Messi ou Ronaldo, qui possèdent un vrai pouvoir marketing, il y a un lien étroit entre les performances d'un joueur et sa valeur marchande."
Dans certains cas, la méforme sportive s'accompagne inévitablement d'une dévalorisation économique. Bolotny : "Regardez Yoann Gourcuff. Il y a un an, il a été acheté 22 millions d'euros à Bordeaux. Aujourd'hui, il ne les vaut plus. A Lyon, ça les a refroidis." Finie, donc, la politique ultra-dépensière. Oubliés les 77,5 millions d'euros investis durant l'été 2009. L'heure est à la sagesse. "Lyon essaie de la jouer malin, mais en réalité, il n'a pas le choix, insiste l'économiste du sport. De 2000 à 2006, l'OL était pourtant l'un des rares clubs européens à avoir conjugué compétitivité sportive et économique. L'OL gagnait, en restant prudent sur le marché des transferts. En 2008, il s'est mis à investir massivement sur le marché des transferts : les droits TV avaient été renégociés, et Lyon avait une visibilité sur quatre ans. Ce n'est pas le cas aujourd'hui."
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FOOTBALL 2011 Lyon - Gourcuff

Crédit: AFP

Mongai: "Paris n'a pas réinvesti sur le marché français"
Du coup, sans Lyon, "le marché français a perdu son bailleur de fonds", dixit Christophe Mongai. Car dans le même temps, Bordeaux "n'a plus d'argent", selon le président Triaud. A Marseille, "seul un départ peut compenser une arrivée", d'après le président Labrune. Malgré son doublé Coupe-Championnat, Lille doit surveiller ses finances en attendant de décupler ses recettes billetterie grâce à son nouveau stade. Et Paris alors ? Boosté par l'arrivée des investisseurs qataris, le PSG a bien déboursé près de 89,5 millions d'euros cet été, dont 42 pour le seul Javier Pastore. Seul Manchester City et ses 99,5 millions peuvent se vanter d'avoir dépensé plus cet été. "Mais Paris n'a pas réinvesti sur le marché français, comme Lyon le faisait ces dernières années", souligne Mongai. "Le marché du PSG est clairement tourné vers l'international", abonde Bolotny, pour qui "le foot français ne doit pas perdre ses racines". Dit autrement, il doit "miser sur la formation". "Ça tient davantage au réalisme économique qu'à une logique identitaire, comme en Angleterre, où les clubs recrutent aujourd'hui sur le marché britannique."
En France, l'austérité ambiante a déteint sur les négociations joueurs-clubs. "Les discussions ont toujours été âpres, tempère Hutteau. C'est normal, chacun défend ses intérêts." L'agent de Valbuena "constate pourtant une nette baisse des rémunérations chez les joueurs, de l'ordre de 25 à 30%". "Les clubs acceptent de payer très cher les grands joueurs. Mais ils estiment que les joueurs de clubs, les ouvriers du football, sont trop payés." Pastore, la tête d'affiche du recrutement parisien, touche plus de 5 millions d'euros bruts par saison. Dix fois plus que le salaire moyen d'un joueur de Ligue 1. L'herbe est, paraît-il, plus verte ailleurs. Pour le vérifier, certains ont succombé à l'appel du large. Comme le Caennais Youssef El-Arabi, parti garnir son portefeuille à Al Hilal. Le président Fortin en est intimement "persuadé" : "Youssef aurait opté pour un club français si une véritable proposition s'était présentée". Mais Malherbe "n'a eu aucun contact avec des clubs de Ligue 1" pour son buteur marocain. En Arabie Saoudite, il touchera 13 millions sur quatre ans.
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Youssef El Arabi

Crédit: AFP

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