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Zinédine Zidane a 50 ans - De Zinédine à Zidane, éloge de la patience

Maxime Dupuis

Mis à jour 23/06/2022 à 13:22 GMT+2

Zinédine Zidane a 50 ans aujourd'hui. Et depuis près d'un quart de siècle, il est entré dans l'histoire du football et dans la légende du sport français. Mais avant le 12 juillet 1998, Zizou a connu une évolution régulière et plus lente qu'on ne l'imagine. De Cannes à la Juventus, en passant par Bordeaux, le numéro des 10 Bleus s'est construit à son rythme. A contre-temps.

Zidane, un n°10 de légende en 10 photos iconiques

À une époque où l'on n'a plus le temps d’attendre, où chaque seconde qui passe en est une de perdue, Zinédine Zidane est un cas d’école, qui mériterait une étude approfondie dans les centres de formation de l'Hexagone et d'ailleurs. A l'heure où l'on a laissé passer sa chance à 22 ans, que l'on est périmé si l'on n'a pas éclos à 24, ZZ serait une fantastique anomalie. Une anachronie, tout au moins.
Le bienheureux Zizou est né avec du talent et un toucher de balle uniques qui l'ont classé dès ses années cannoises dans une catégorie à part. À peine sorti de l'adolescence, ce qu'il faisait avec un ballon (que Maradona réussissait peut-être avec une orange, dixit un Michel Platini taquin ou fielleux, c'est selon), peu de ses congénères, bien plus aguerris que lui, s'en montraient capables.
De Gilles Rampillon à Jean Fernandez, en passant par Guy Lacombe, qui l'ont accompagné dans sa première vie azuréenne, tous ont vu que le gamin surdoué de la Castellane était doté d'une facilité et d'une gestuelle inimitables. Sa conduite de balle, soyeuse, couplée à un équilibre et une gestuelle de funambule, laissait augurer du meilleur. Ce n'est d’ailleurs pas un hasard si Fernandez l'a lancé dans le grand bain à 16 ans et demi. Ce jour-là, à la Beaujoire et dans le camp d'en face, il y avait Didier Deschamps et Marcel Desailly, eux aussi promis à un avenir radieux.
Son premier but en division 1, ZZ l'inscrirait aussi face au Canaris. Mais bien plus tard et après une saison passée sans fréquenter le groupe professionnel parce que Zizou, bien que bosseur, avait parfois tendance à s'éparpiller à côté du pré. Cette première réalisation, le 10 février 1991, tout en douceur et simplicité, résume ce qu'il deviendra. Mais pas tout de suite. Parce que ceux qui l'ont côtoyé se doutaient qu'il irait loin. Mais aussi haut ? Rien n’était moins sûr. L’OM s'apprêtait d'ailleurs à le recaler, Raymond Goethals le trouvant "trop lent".
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Zinédine Zidane sous le maillot de l'AS Cannes.

Crédit: Getty Images

Pas le nouveau Platini

De Marseille, le 23 juin 1972, à Saint-Denis, le 12 juillet 1998, date où deux coups de tête l'ont fait entrer au Panthéon et propulsé dans une autre sphère, Zizou a connu une lente évolution. Le numéro 10 des Bleus a progressé à son rythme. Régulièrement. Sûrement.
Le nouveau Platini, ça n'a jamais été lui. Ce fut Jean-Marc Ferreri, un temps, Gérald Passi, aussi, puis Philippe Vercruysse, un peu plus tard. On sait ce qu'il est advenu.
"Yazid" n'était pas le successeur désigné. Zidane est longtemps resté à l'abri de l’ombre envahissante de Platoche. Elle a fini par lui tomber sur le paletot quand ZZ s’est engagé à la Juventus Turin, sans numéro 10 sur le dos, réservé à Del Piero. Lui a hérité du 21. Et a écrit sa propre histoire. Bien lui en a pris.
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Zinedine Zidane sous le maillot de la Juventus Turin

Crédit: Getty Images

L'équipe de France, Zidane l'a découverte à 22 ans. A un âge où, aujourd’hui, un type de son talent et avec ses promesses aurait déjà compilé 30 ou 40 sélections. Là aussi, tout s'est fait piano, même si le Bordelais s'était chargé d’accélérer le tempo dès la première, par un soir d’août 1994 où il avait filé un sacré coup de main à ses partenaires. Par un doublé, déjà.
De par son caractère et en raison d'une humilité non feinte, Zidane n'a jamais rien revendiqué. Cantonné à jouer milieu défensif ou relayeur à Cannes comme lors de sa première saison bordelaise où il penchait à gauche, avec l'ami Duga et le compère Liza, il s'est finalement retrouvé au cœur du jeu, un cran plus haut. Naturellement. L'évidence sautait aux yeux de tous. Sauf aux siens.
Zidane, c’est le joueur dont on m'a parlé ou c'est celui que j'ai vu au Championnat d’Europe ?
Chez les Bleus version Jacquet, le chef de file et maître à jouer fut d’abord Eric Cantona. Puis Youri Djorkaeff et lui, enfin. Canto auto-évincé, la question se posa même de savoir si Djorkaeff et Zidane pouvaient jouer ensemble. On a vite su. Mais avant d'être certain que ZZ avait les épaules pour porter les Bleus au sommet de l'Everest, il fallut un peu plus patienter. Parce que sa première sur une scène internationale, à l'Euro, fut un échec patent. 0 but, 0 passe décisive : même pour un footballeur qui ne vit pas par et pour les statistiques, ça fait désordre.
A sa décharge, le nouveau Juventino avait été victime d'un accident de la route moins d'un mois avant le début du Championnat d'Europe. Sous la violence du choc, il avait fait céder le levier de vitesse et sa cuisse, verte, bleue et noire, le lui avait rappelé tout au long d'un morne été, de Newcastle à Manchester.
Quelques semaines après, alors qu'il découvrait la Juventus et un nouveau monde, il était revenu sur cette première expérience, dans les colonnes de L'Equipe. "J'ai essayé de positiver, de me dire que cette première grande compétition qui s'était mal passée pour moi me fera du bien pour plus tard, qu'elle m'a préparé à la Coupe du monde. Je n'étais pas prêt, il fallait être plus costaud que ça, c'est tout."
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De Cannes aux Bleus, l'évolution de Zinédine Zidane

Crédit: Quentin Guichard

Lucide, il avait aussi dû encaisser les vacheries du président de la Juve, Giovanni Agnelli, qui avait mis 35 millions de francs sur son nom. "Zidane, c’est le joueur dont on m'a parlé ou c’est celui que j’ai vu au Championnat d’Europe ?" Là non plus, ZZ n'avait pas moufté. Il s'était mis au travail, à double ou triple dose. Et après une période d'adaptation au meilleur championnat du monde, qui s'est symboliquement terminée par un but fantastique face à l'Inter, Zidane a grimpé d'un rang.
Troisième du Ballon d'Or 1997, souvent brillant avec les Bleus avant le grand rendez-vous de 1998, il lui a fallu traverser le Mondial comme on fend un champ de ronces. Jusqu'au rendez-vous ultime, celui qui l’a définitivement propulsé dans une autre sphère, celle qu'il ne quitterait jamais.
Avant la finale face au Brésil, Laurent Blanc, privé de dessert en raison d'une tarte sur Bilic, était venu le voir et l'avait prié de sortir de son cocon : "Marque au moins un but, c'est maintenant qu'on va voir si tu es un grand joueur". On a vu. Zidane en a mis deux. Il suffisait juste de demander. Et de patienter. Ça en valait la peine.
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