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JO Pékin 2022 : La marque Anta, du Xinjiang aux Jeux

ParAFP

Publié 19/02/2022 à 10:35 GMT+1

JEUX OLYMPIQUES D'HIVER - Elle est l'une des grandes gagnantes des Jeux Olympiques de Pékin, plus encore que son égérie star, la championne Eileen Gu. La marque de sport chinoise Anta, qui se fournit en coton au Xinjiang, a déferlé sur les sites olympiques. Le logo de la marque s'affiche partout, même si les organisations de défense de droits de l'Homme l'ont dans le viseur.

Des modèles défilent pour la marque Anta avant les JO

Crédit: Imago

La marque Anta est l'une des "stars" des JO. Le groupe chinois, qui a fêté ses trente ans l'an dernier, est depuis 2016 le fournisseur officiel du Comité international olympique (CIO). Résultat, le logo rouge de la marque, qui n'est pas sans rappeler la virgule de l'américain Nike, s'affiche partout aux Jeux de Pékin. Sportifs chinois et même certains canadiens, bénévoles et personnels du comité d'organisation arborent des tenues Anta, sans compter le président du CIO, Thomas Bach. Sa parka bleu roi lors de la cérémonie d'ouverture dans le Nid d'oiseau ? Anta. Sa veste de survêtement turquoise lors de sa visite au centre de presse ? C'était encore Anta.
La marque, qui a réalisé un chiffre d'affaires de 32,5 milliards de yuans (4,5 M EUR) en 2020, a un contrat avec le CIO qui court jusqu'à la fin de l'année. Ce partenariat fait tiquer les organisations de défense de droits de l'Homme, dont Human Rights Watch (HRW) et la Coalition pour mettre fin au travail forcé au Xinjiang (EUFL). En cause : l'approvisionnement d'Anta en coton du Xinjiang pour ses tenues.
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Thomas Bach lors de la cérémonie d'ouverture des JO de Pékin

Crédit: Imago

Pas de coton
Pékin est accusé d'avoir recours au travail forcé dans cette région du nord-ouest de la Chine, où vivent les Ouïghours, une minorité musulmane. Plusieurs géants du textile, dont H&M, Nike ou Uniqlo, ont annoncé en 2020 stopper de s'approvisionner au Xinjiang en raison d'atteintes aux droits fondamentaux. Cette région a longtemps été frappée par des attentats attribués à des séparatistes ou des islamistes ouïghours. Le Xinjiang fait depuis l'objet d'une surveillance draconienne. L'administration Biden accuse Pékin d'y avoir enfermé dans des camps des Ouïghours ainsi que d'autres minorités et évoque un "génocide".
"Ces questions reposent en grande partie sur des mensonges", a fustigé jeudi la porte-parole des Jeux de Pékin, Yan Jiarong, reprenant la ligne officielle des autorités sur le Xinjiang. Anta continue lui de s'y fournir : "Nous achetons et utilisons du coton provenant des régions productrices de coton en Chine, y compris le coton du Xinjiang, et nous continuerons", avait assuré la firme en mars. Le groupe explique sur son site internet avoir pris des mesures pour contrôler l'absence de travail forcé.

Paradoxe canadien

Quant au CIO, il assure qu'un audit, mené par un tiers, "n'a pas trouvé de travail forcé, non rémunéré, sous la contrainte ou exécuté par des enfants" chez ses fournisseurs parmi lesquels donc Anta. Le rapport, sans jamais mentionner le Xinjiang, prend soin de préciser que les "tenues (fournis par Anta) ne contiennent pas de coton." Toutefois, estime Human Rights Watch, la chaîne d'approvisionnement manque de "transparence" et comporte des "lacunes substantielles" comme l'identité du tiers ayant mené l'audit et la méthodologie.
Par ailleurs, l'étude "ne recouvre pas" des "milliers de produits" liés aux Jeux, dont la mascotte est en rupture de stock, souligne à l'AFP Minky Worden, directrice des initiatives mondiales à HRW. Sur les sites, les sportifs chinois ne sont pas les seuls à s'afficher en Anta. Les équipes de snowboard et de ski freestyle du Canada arborent aussi le logo écarlate A de la firme chinoise. Le Canada est pourtant l'un des pays, avec en tête les Etats-Unis, qui boycotte diplomatiquement les Jeux, pour dénoncer les violations des droits de l'Homme en Chine. Qu'en pensent les athlètes, impossible à dire: "On ne répondra pas à cette question", a coupé court leur attaché de presse en zone mixte du snowpark jeudi.
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Mikael Kingsbury

Crédit: Getty Images

Message contradictoire
"Ce partenariat est problématique", estime auprès de l'AFP Zumretay Arkin, Canadienne et responsable du Congrès mondial ouïghour, une organisation d'exilés opposés à Pékin. "Les boycotts diplomatiques des Jeux olympiques de Pékin 2022 ont été bien accueillis, et c'était un bon outil pour faire pression sur la Chine. Cependant, le fait que Freestyle Canada soit partenaire d'Anta sports sape cette décision et envoie un message contradictoire." D'un point de vue stratégique, l'alliance illustre le virage d'Anta vers les sports d'hiver. Le groupe chinois, qui a pris la suite de Columbia fin 2018, apporte plus du tiers des revenus partenaires de Freestyle Canada.
En contrepartie, Anta s'affiche sur le meilleur skieur de bosses de la décennie, Mikaël Kingsbury, médaillé pour la troisième fois à Pékin. Anta a également pris la tête en 2019 d'un consortium ayant racheté Amer sports, groupe réunissant Salomon, Atomic et Arc'teryx. Une stratégie qui colle au calendrier des JO-2022 et s'inscrit plus généralement dans la volonté de mettre la classe moyenne aux sports d'hiver en Chine, où le nombre de stations a quadruplé depuis 2015. Le président chinois Xi Jinping arborait d'ailleurs une parka Arc'teryx lors de la cérémonie d'ouverture.
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