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Mondiaux Doha - "Il faudra transformer le bronze et l'argent en or à Paris" : Le judo français en veut plus
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Publié 15/05/2023 à 16:31 GMT+2
Stéphane Nomis, président de la Fédération Française de Judo a fait pour nous le bilan des Mondiaux de Doha. Satisfait d'un strict point de vue comptable du nombre de médailles (8, record égalé), il pointe certains regrets et surtout, à un an des JO, la nécessité de décrocher plus de titre à Paris en 2024. Bilan d'un homme heureux mais toujours plus ambitieux.
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D'un strict point de vue des chiffres, le bilan de ces Mondiaux avec 8 médailles est très bon. Partagez-vous ce sentiment ?
S.N. : Oui, si on ne s'en tient qu'aux chiffres. On a le même bilan qu'à Tokyo et on égale les meilleures performances du judo français aux Mondiaux donc on est heureux. Mais il y a des petites imperfections qu'on aurait pu gommer. Comme par exemple, la médaille d'argent par équipe alors qu'on ne doit pas perdre. On a deux fois l'opportunité de remporter l'or, c'est dommage qu'on n'ait pas su saisir l'opportunité. Sarah-Léonie Cisyque nous avait donné la victoire aux JO, elle y a pensé pendant son combat. La déception est sur son combat à elle. C'est là où c'est un peu problématique. Dans sa tête, ça a dû tourbillonner de partout. Elle a fait une petite erreur, elle ne la refera plus.
Vous repartez de Doha avec deux titres des patrons Riner et Agbegnenou. Est-ce que l'objectif est atteint ?
S.N. : Non, on n'est pas satisfait. Comme l'Agence National du Sport nous le dit : il faut transformer le bronze et l'argent en or. On fait six finales pour deux médailles d'or. Ce n'est pas suffisant en terme de réussite. Mais on est là, on fait le travail. Huit médailles sur 14 catégories, c'est quand même énorme. Je souhaite à tous les sports d'avoir un médaillé sur deux dans leur championnat du monde respectif.
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Teddy Riner et Clarisse Agbegnenou ont remporté deux titres alors même qu'ils affirmaient venir à Doha pour s'étalonner en vue des JO…
S.N. : (Il coupe) Mais c'est vrai et c'était le cas pour tous. On n'était pas là-bas pour performer mais dans l'optique des JO. Bien sûr, c'est mieux de gagner mais ce n'était qu'une étape vers Paris 2024. Ça ne sert à rien de faire une médaille aux mondes et pas de médaille à Paris. C'est incomparable, ils le savent tous. On est venu pour gagner des places au ranking et avoir de meilleurs tirages ensuite. Le but premier était là.
Les deux titres sont encore une fois amenés par deux légendes de leur sport. Riner et Agbegnenou ont une marge énorme sur la concurrence alors même qu'ils ne semblaient pas à 100% de leur capacité.
S.N. : Mais oui, ce sont deux légendes. Ils n'ont rien à voir avec les autres. Ils sont tellement au-dessus en terme de résilience, de professionnalisme. Ils ont un temps d'avance sur tout le monde et sont numéros 1 incontestés. Le titre de Clarisse après un bébé, c'est époustouflant, incroyable. Teddy a, lui, cette faculté à gagner alors qu'il n'est pas programmé pour, alors qu'il a pris de l'âge. C'est incroyable. J'étais choqué de ce qui transpirait de lui après 6 minutes de golden score. On ne pouvait pas lire le doute en lui. Il était toujours en marche. Il a des certitudes absolues.  
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Pour les JO de Paris, vous visez dix médailles mais combien en or ?
S.N. : Nous ne sommes pas que les représentants de la France. L'ANS et le ministère veulent peut-être des titres et pas de médaille. Mais si j'envoie 14 athlètes et que j'ai 10 médailles, c'est le jackpot absolu. Le classement aux JO ne prend quasiment que l'or en compte, on vise trois titres mais la vie de nos judokas change à partir du moment où ils sont médaillés olympiques même sans titre. 
Vous êtes un immense pourvoyeur de médaille pour le sport français. Est-ce que vous ressentez une pression à 15 mois du début des JO ?
S.N. : Oui, une très grosse pression. On était le premier pourvoyeur à Tokyo, on est ultra-attendus. Mais vous avez vu comment nos athlètes réagissent sous pression à Doha... 
Après les Mondiaux ratés de Tachkent, on imagine quand même que le bilan de Doha doit vous enlever un poids.
S.N. : C'est vrai et c'est indéniable. On attaque la dernière ligne droite sereinement. Après, à Tachkent, ça s'est mal passé mais on ramène cinq médailles. Il faut juste relativiser. 
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Stéphane Nomis, président de la Fédération Française de Judo
Crédit: Imago
Si vous visez 10 médailles, où aller chercher les deux qui vous ont manqué à Doha ?
S.N. : Chez les hommes. Même si on a fait deux médailles et ça faisait très longtemps qu'on n'y était plus parvenu. Voilà six mois qu'on a changé (ndlr : Baptiste Leroy a remplacé Christophe Gagliano comme patron de l'équipe masculine) et il y avait une synergie folle cette semaine entre les entraîneurs, les athlètes, le public…
C'est une chose d'avoir une bonne ambiance et une autre d'avoir des athlètes capables de décrocher des médailles. 
S.N. : Si on prend catégorie par catégorie, on n'est pas si loin. Lucas Mkheidze a le talent, il est médaillé olympique. Là, il a fait une erreur, il a trop attaqué. Bon, il ne le refera pas à chaque fois et il reste dans les 8 meilleurs mondiaux. En moins de 66 kilos, on fait bronze donc je passe. En moins de 73 kilos, Joan-Benjamin Gaba perd contre le médaillé de bronze au deuxième tour mais, dans l'épreuve par équipe, il bat le Japonais et prouve qu'il est là. En moins de 81 kilos, avec Djalo, on a le numéro 5 mondial. Il a performé toute l'année mais pas aux Mondiaux. Il est capable de battre les meilleurs. En moins de 90 kgs, Maxime-Gaël Ngayap Hambou et Alexis Mathieu ont déjà eu des médailles aux Masters mais ils sont plus loin au ranking mondial. On doit les faire performer et rentrer dans les 8 aux JO. En – de 100 kgs, c'est une catégorie plus faible en France. On mise sur des jeunes aussi en vue des JO.
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Crédit: Getty Images
La grosse déception, c'est Romane Dicko qui aurait dû apporter le troisième titre à Doha. On vous a vu lui parler dès son élimination. Que lui avez-vous dit ?
S.N. : Je lui ai dit que ce n'était pas normal, qu'elle n'était pas au niveau. Mais je suis aussi là pour les réconforter. Ça peut arriver un mauvais championnat, une mauvaise préparation, un mauvais entraîneur ou un manque de concentration. Elle a beaucoup de chance que ce soit arrivée là. Elle doit le prendre en compte, il lui reste 15 mois. Le problème, ce n'est pas de perdre mais de perdre comme ça. Mais elle le sait. Mais elle m'a autant déçu que Djalo ou Mkheidze. J'étais persuadé que ces trois-là feraient une médaille.
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