Jorge Martin champion du monde MotoGP | La trahison de Ducati et l'éclatante revanche
Mis à jour 18/11/2024 à 15:26 GMT+1
Jorge Martin a réussi ce que personne n'avait fait dans l'ère MotoGP : décrocher un titre de champion du monde avec une structure satellite, en l'occurrence Pramac. Ce, alors qu'il a longtemps rêvé de le faire avec l'usine Ducati, qui l'a plusieurs fois boudé et lui a préféré Marc Marquez en vue de la saison 2025. Une drôle de revanche. Et une bonne manière de dissiper l'amertume.
Jorge Martin (Ducati-Pramac) avec son trophée de champion du monde MotoGP
Crédit: Getty Images
Aucun succès n'est plus savoureux que lorsqu'il a un goût de revanche. C'est sans doute ce qui rend le titre de Jorge Martin si particulier. L'Espagnol n'est pas simplement le premier pilote champion du monde avec une structure satellite : il l'est aussi devenu en battant Francesco Bagnaia, l'un de ses rivaux historiques, et l'équipe officielle Ducati, qu'il a convoitée à plusieurs reprises mais toujours en vain.
Dès son arrivée en MotoGP, en 2021, le Madrilène a intégré le giron. Pour un pilote de son âge (il a aujourd'hui 26 ans), de son talent et de son pedigree (il a été sacré champion en Moto3), passer quatre saisons chez Pramac, principal tremplin vers le team usine, est une sorte d'anomalie. "Martinator" s'était vu plus haut dès la saison 2022, malgré un début d'exercice très moyen. Ducati lui avait alors préféré Enea Bastianini et la pilule avait eu du mal à passer.
Martin était convaincu d'avoir fait "tout ce que Ducati [lui] avait demandé", tout en admettant que Bastianini avait lui aussi mérité sa promotion. Il s'était alors donné deux ans pour convaincre la firme italienne de lui offrir le guidon le plus prestigieux de la grille. Longtemps capable du meilleur comme du pire, souvent irrégulier, l'Espagnol a évolué et mûri. Il était rapide et talentueux. Il est devenu redoutable et constant.
Marquez a fait pression pour lui chiper le guidon
"Ma carrière n'a pas été facile, ça a été un long chemin, j'ai travaillé dur et fait de gros sacrifices pour m'améliorer, s'est-il souvenu en conférence de presse. La chose importante cette saison était d'apprendre du passé. On peut faire des erreurs évidemment, on est humain, mais il faut savoir tirer le positif, apprendre de cela pour ne pas les reproduire. L'an dernier, j'avais eu une première opportunité de remporter le titre mais je n'étais pas prêt. Cette saison, j'ai été très régulier."
Malgré cela, le Madrilène s'est une nouvelle fois fait doubler, et de manière bien moins compréhensible, sur la forme comme sur le fond. Manuel Pecino, journaliste parfaitement renseigné, avait révélé que Ducati avait d'abord acté sa promotion chez Ducati, juste avant le Grand Prix d'Italie en juin dernier. Mais entre-temps, Marc Marquez avait fait pression pour obtenir une machine d'usine, tout en refusant de s'engager avec une autre équipe que Gresini (son écurie actuelle)… ou la structure d'usine. Habile.
Face à cet ultimatum, et certainement grisée par l'idée de constituer une "Dream Team", Ducati a finalement décidé de miser sur le sextuple champion du monde, alors qu'il n'avait pas encore regagné la moindre course à ce moment-là. "De mon côté, c'est difficile à expliquer, admettra Martin dans la foulée lors d'une interview accordée à DAZN. J'ai parlé à Ducati avant le Grand Prix d'Italie et tout semblait très clair. […] Mais quelque chose ou quelqu’un est arrivé et a changé d’avis."
Peut-être que ma place n'était pas chez Ducati
Frustré, amer, parfois piquant lorsqu'il a été interrogé à ce sujet – il a plusieurs fois expliqué ne plus discuter avec le constructeur de Borgo Panigale, ni son patron Claudio Domenicali – le pilote de 26 ans ne s'est pas démobilisé. Mais Ducati a également eu l'élégance de ne pas lui mettre des bâtons dans les roues, et de continuer à lui fournir son meilleur matériel – même si cela constituait un engagement contractuel – malgré le risque qu'il chipe le titre au chouchou Francesco Bagnaia.
"Merci à Pramac et à Ducati de m'avoir permis d'avoir une moto fantastique pendant quatre ans", a-t-il salué dimanche. […] Je pourrais arrêter la moto demain, je serais tout de même l'homme le plus heureux du monde car j'ai été champion du monde." Ce sacre mondial a visiblement apaisé l'amertume : "Je n'ai jamais voulu prendre une revanche ou leur montrer qu'ils avaient fait le mauvais choix. Peut-être que ma place n'était pas chez Ducati et j'étais plus à ma place chez Pramac, qui est devenue ma famille. Peut-être que je n'étais pas au top au moment où il aurait fallu pour aller chez Ducati, mais je leur suis reconnaissant de m'avoir permis de me battre pour le titre grâce à leur moto."
Après avoir été boudé par la firme italienne, au début de l'été, Jorge Martin s'était rapidement engagé avec Aprilia, dont le budget est incomparable à celui du constructeur champion du monde. Battre Ducati avec Pramac était un sacré pied de nez. Le faire avec une autre marque italienne serait un sacré tour de force.
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