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Patinage artistique - Solène Mazingue : "Je suis un miracle pour la médecine"

Anne Boyer

Mis à jour 11/01/2024 à 16:56 GMT+1

Solène Mazingue a commencé sa carrière de danseuse sur glace en France, avant de rejoindre Gaidajenko en Estonie, pays qu’elle représente désormais. En septembre 2022, lors d’un entraînement, le couple chute. Solène est victime d’une fracture du crâne, d’une hémorragie cérébrale et doit subir une opération d’urgence. A force de persévérance, elle est revenue. Un véritable miracle qu'elle raconte.

Mazingue : "La Solène d'avant l'accident, je ne m'en souviens quasiment plus"

Il y a un an, vous n’aviez pas pu participer aux Championnats d'Europe car vous étiez en pleine convalescence après votre accident. Un an après, vous venez de remporter les championnats d’Estonie avec votre partenaire Marko Jevgeni Gaidajenko. Vous réalisez le chemin parcouru ?
Solène Mazingue : C’est un peu compliqué, j’ai du mal à y croire et à comprendre ce qu’il m’est arrivé. Mais pour mes proches, c’est un parcours merveilleux et incroyable parce qu’en octobre 2022 je pouvais à peine marcher et aujourd’hui je gagne des compétitions. C'est donc incroyable.
Quelle a été l'étape la plus difficile de votre convalescence ?
S.M. : Je crois que ça a été d’accepter de devoir recommencer depuis le début, réapprendre à marcher, à faire des exercices simples, devoir me remuscler car j’avais perdu la moitié de mes muscles. Et mentalement, il a été très compliqué d’accepter que j’avais tout perdu.
Pour moi, c'était fini
Y-a-t-il eu de la colère, de la peur de devoir renoncer à votre carrière ?
S.M. : Pas tellement de la colère, non, mais de la tristesse. Parce que pour moi c’était fini, je n’allais pas pouvoir réaliser mon rêve d’aller aux Jeux Olympiques, ou même de retrouver mon niveau d’avant l’accident.
Quand vous étiez à l'hôpital, avez-vous craint que cet accident puisse mettre fin à votre carrière ?
S.M. : Eh bien pour être honnête, le premier jour à l’hôpital, j’ai tout de suite dit à mon partenaire (ndlr : Marko Jevgeni Gaidajenko) qu’en mars 2023 on irait au Japon pour les Championnats du monde ! Je ne réalisais pas vraiment ce qu’il venait de se passer, mais j’étais sure et certaine que j’y arriverais. Un mois et demi après, je me suis dit que ce serait impossible, que j’avais trop de séquelles, parce que marcher dehors seule était déjà compliqué, alors reprendre la compétition de haut niveau… Et finalement ça s’est bien passé, j’ai continué à faire de gros efforts. Et aujourd’hui, je suis là !
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Mazingue : "Les médecins disent que je suis un miracle"

Les médecins ont-ils été surpris de la vitesse à laquelle vous avez retrouvé votre corps et vos aptitudes de sportive de haut niveau ?
S.M. : Au tout début, les médecins m’ont dit que je pourrais ne jamais remarcher ou reposer un pied sur la glace alors que moi j’étais dans mon lit, décidée à faire les Championnats du monde (rires). Mais je me suis rendu compte que le chemin serait long avant de pouvoir retrouver la glace. Et pour eux, je suis un miracle ! Il y avait 0,01 % de chance que je puisse remarcher, reprendre le sport de haut niveau. Ils ont été tellement surpris, que là-bas au Canada, mon cas a été étudié dans différents hôpitaux, évoqué dans des conférences de médecine car pour eux j’étais un miracle. Mais le fait que je sois athlète de haut niveau a beaucoup aidé.
Comment votre entourage a vécu ce terrible accident ?
S.M. : Mes coachs, ma maman et Marko avaient très peur parce que mon crâne était encore très fragile, j’avais encore de grosses séquelles et des symptômes, donc il fallait faire très attention. Au début, je ne patinais que dix minutes et Marko ne me lâchait jamais les mains. Il était très stressé, il craignait que je retombe. Mais au fur et à mesure, j’ai pris confiance en moi. Marko et mes coachs aussi. Et on a mis en place des techniques pour faire attention. Cela nous a énormément rapprochés dans notre patinage, on a gagné en harmonie. Cet accident a vraiment changé notre façon de travailler, notre connexion sur la glace, et en bien parce qu’on est meilleurs aujourd’hui qu’avant l’accident…
Votre entourage a-t-il essayé de vous prévenir que le chemin serait long ou vous a-t-on laissé avec cet objectif des Mondiaux six mois après l’accident ?
S.M. : Ma mère y a toujours cru, et m’a toujours soutenue dans cet objectif. Mais c’est vrai que les médecins étaient plus réticents, ils trouvaient cela trop ambitieux et voulaient que j’y aille doucement. Mais au fur et à mesure de ma rééducation, et de mes progrès, ils y ont cru. Semaine après semaine, je me rapprochais de mon but. Deux semaines avant, mon médecin m’a dit que c’était trop risqué d’y aller. Que c’était important pour mon avenir, que si je voulais aller aux Jeux Olympiques en 2026, c’était plus raisonnable de ne pas prendre le risque de retomber. Et la semaine suivante, une semaine avant les championnats du monde, mes progrès étaient tels qu’ils m’ont donné le feu vert pour y aller. J’ai pu m’y rendre, sous certaines conditions : je m’entraînais moins que les autres, j’avais plus de repos... Mais j’y suis allée !
Je l'ai vécu comme une renaissance
Pourquoi était-ce si important ?
S.M. : C’était surtout mentalement que c’était important. J’ai voulu marquer la fin de cet accident. Me débarrasser de cela, en me disant : je suis aux Championnats du monde, sur la glace, et je suis capable de performer. Le but n’était pas le résultat, mais de montrer au monde entier que malgré les aléas de la vie, et un accident aussi grave, si l’on est motivé et que l’on n’abandonne pas, on peut y arriver et montrer que tout est possible. Et j’avais aussi besoin de me prouver que je pouvais le faire, revenir sur la glace, participer à des compétitions de haut niveau et surtout surmonter cet accident.
Vous avez rechaussé les patins en janvier 2023, soit trois mois après l’accident. Qu’est-ce que vous avez ressenti quand vous avez foulé la glace ?
S.M. : En mettant mes patins, j’étais très stressée, parce que je retournais sur le lieu de l’accident, sur la glace où il avait eu lieu. Je ne savais pas si j’allais savoir comment patiner et si j’en étais capable ! Je suis restée devant la glace un moment, et puis j’ai fini par me lancer. Je suis passée par toutes les émotions : j’étais triste, heureuse, excitée. Je ressentais plein d’émotions et je me suis mise à pleurer. J’étais déjà fière du chemin parcouru en si peu de temps.
Aujourd’hui, patinez-vous complètement libérée par rapport à ces appréhensions, et ces limites physiques ?
S.M. : Oui, aujourd’hui je peux enfin dire que je patine librement. Ça m’arrive d’avoir encore quelques appréhensions sur de nouveaux éléments. Mais en compétition, j’arrive à ne plus penser à l’accident et à me sentir bien sur mes patins, en confiance avec mon corps.
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Solene Mazingue et Marko Jevgeni Gaidajenko

Crédit: Getty Images

En quoi cette épreuve vous a changée ?
S.M. : Je l’ai vécue un peu comme une renaissance. J’ai dû apprivoiser cette nouvelle Solène mais je peux dire aujourd’hui que cette Solène-là est bien mieux. Elle prend mieux soin d’elle, de son corps. Avant l’accident, je n’avais pas conscience de l’importance de tous les à-côtés : manger correctement, faire du sport régulièrement, avoir une vraie préparation physique, voir un psychologue également… Donc il n’y a que du positif à retenir de cette épreuve. J’ai réappris à tout faire, mais en mieux, avec une vision positive de la vie !
Qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter maintenant ?
S.M. : Les Jeux Olympiques à Milan en 2026, c’est un de mes rêves et l’objectif principal ! Gagner une médaille serait encore plus grand et plus fou !
Et à plus court terme ?
S.M. : Cette saison on aimerait être dans le top 10 aux championnats d’Europe, et dans le top 15 aux championnats du monde, puisque c’est encore une saison de reprise pour nous, n’ayant pas patiné autant en compétitions que les autres couples. Et en plus, les Mondiaux seront à Montréal (ndlr : où elle s'entraîne), donc c’est à la maison !
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