ATP Barcelone : Sorti d'entrée, Zverev s'inquiète et pourrait bien dégringoler au classement

Attention à la dégringolade. Sorti d’entrée à Barcelone par le lucky loser et 81e joueur mondial Nicolas Jarry, Alexander Zverev est en plein doute et sa saison 2019, mal engagée, pourrait virer au cauchemar. L’Allemand le sait, il joue gros sur terre battue : ses titres à Munich et Madrid et sa finale à Rome en 2018, soit 1850 points à défendre dans les trois prochaines semaines, le mettent dans une posture plus qu'inconfortable. En manque de confiance, il avait pris les devants en faisant une transition rapide sur ocre à Marrakech, avant même de débarquer sur le Rocher. Mais rien n’y fait, loin de se rassurer, il s’embourbe.

Pourtant avant son entrée en lice catastrophique à Barcelone, le numéro 3 mondial se voulait optimiste. "Lors des dernières semaines et des derniers mois, je n’ai pas joué mon meilleur tennis. Mais ça peut changer très vite et j’espère que ce sera le cas. J’espère que la saison va prendre un tournant différent pour moi. Si je fais la finale ou si je gagne ici, on n’en parlera plus", estimait-il. Sur le court, la réalité l’a vite rattrapé contre Nicolas Jarry et, après sa cinquième défaite lors de ses sept derniers matches sur le circuit, il a renoncé à la méthode Coué.

"Je joue juste mal, c’est évident. Je manque des revers dans toutes les positions, alors que c’est mon meilleur coup. Je n’arrive pas à être percutant, je fais des doubles fautes. C’était un match de très faible qualité : j’ai gagné la plupart de mes points sur ses fautes directes", a constaté Zverev, lucide, sans chercher à s’épargner. A Barcelone, il semble avoir touché le fond tennistiquement : 19 petits coups gagnants pour 49 fautes directes, et une déconvenue à l’issue du tie-break décisif contre un adversaire qui avait pourtant commis 64 erreurs de son côté.

Pourtant, l’Allemand n’a pas lâché l’affaire mentalement : il a même remonté un double break de retard dans le troisième set. Mais son incapacité à profiter de ce retournement de situation montre bien que le problème est profond. "Je pense qu’il se met une pression monstrueuse avec tous les points qu’il a à défendre sur terre. Il comptait certainement prendre un peu d’avance avec de bons résultats en début de saison et ce n’est pas le cas. Il arrive donc fragilisé, sans confiance et ne fait pas les bons choix au bon moment", analyse notre consultant Arnaud Di Pasquale.

Touché à la cheville en Australie, Zverev a aussi dû composer avec un virus en mars qui l’a diminué pendant la tournée américaine. Et l’enchaînement des défaites a fini par peser. Si l’on excepte sa finale à Acapulco et son huitième à l’Open d’Australie, il n’a pas réussi à aligner deux victoires d’affilée en tournoi en 2019, ce qui le place à une très modeste 21e place à la Race. "Je subis des revers que je n’avais pas subis depuis des années, surtout sur terre battue. Je suis dans le pétrin et je ne sais pas comment m’en sortir", a-t-il avoué après son élimination à Barcelone.

Pourtant, Zverev peut compter sur un allié de poids dans son équipe : Ivan Lendl. Les deux hommes ont entamé leur collaboration en août dernier et en ont récolté les premiers fruits lors du Masters en novembre avec des victoires sur Roger Federer et Novak Djokovic en demie et en finale. "Lendl n’est pas là pour enfiler des perles. S’il travaille avec Zverev, c’est qu’il pense pouvoir l’aider à gagner en Grand Chelem. Et sur le plan mental, il peut être utile parce qu’il est aussi passé par des phases compliquées durant sa carrière", estime Arnaud Di Pasquale.

Ce très mauvais départ n’a eu que peu de conséquences au classement jusqu’ici. Mais une chose est sûre : le niveau actuel de Zverev ne correspond pas à celui d’un numéro 3 mondial. D’ailleurs, sa place sur le podium ne tient donc plus qu’à un fil, avec 180 petits points d’avance sur Roger Federer. A ce rythme, il pourrait même ne plus faire partie des quatre premières têtes de série à Roland-Garros. De quoi lui compliquer encore la tâche, alors qu’il espère enfin franchir un cap au meilleur des cinq sets.

Si l’urgence est réelle à court terme, il n’y a toutefois pas lieu de paniquer. A 22 ans, Zverev compte déjà 10 titres en carrière dont trois en Masters 1000 et le Masters, une régularité et un palmarès au plus haut niveau uniques si on les compare à ceux de ses concurrents de la Next Gen. "On oublie qu’il est très précoce : on a l’impression que ça fait dix ans qu’il est au top. Il a le droit d’être vulnérable, de traverser une mauvaise passe. Mais il va retrouver le chemin de la victoire parce que c’est un bosseur et qu’il est complet : il sait attaquer et défendre. En ce moment, il est plus conservateur mais c’est une question de confiance", note notre consultant.

L’émergence conjuguée de Stefanos Tsitsipas et Félix Auger-Aliassime pourrait toutefois bien lui faire de l’ombre dans les années à venir si ce passage à vide venait à durer. A moins que le fait de partager la lumière ne lui permette de se relâcher à nouveau et de redevenir dangereux. "Ils peuvent l’inspirer, créer une émulation. Et puis, ils ont tous un sacré ego, ça peut le piquer et le relancer", observe Arnaud Di Pasquale. Si Zverev semble fragilisé sur le plan mental, il suffirait d’un déclic pour le remettre à l’endroit. Débarquer à Roland-Garros dans un relatif anonymat lui ferait peut-être le plus grand bien.