La France féroce

COUPE DAVIS - Demi-finale : France-Argentine 2-0.

Michael Llodra (FRA) bat Juan Monaco (ARG) 7-5, 4-6, 7-5, 6-3
Gaël Monfils (FRA) bat David Nalbandien (ARG) 6-4, 2-6, 6-4, 6-3 (2h35)

Gaël Monfils vient de signer, face à David Nalbandian, une victoire qui fera date dans sa carrière. Dans un Palais des Sports de Gerland surchauffé par les supporters argentins et français, le N.1 français a, par la même occasion, placé l'équipe de France dans une position idéale à la fin du premier jour de cette demi-finale de Coupe Davis. De quelques coups de griffes étonnants, Monfils s'est montré à la hauteur d'un joueur réputé pour dompter les styles les plus féroces sur ce genre de surface.

Après un US Open réussi, il confirme ainsi qu'il peut devenir un authentique leader de l'équipe, avec Jo-Wilfried Tsonga, absent sur la feuille de match mais premier fan en tribune, et... Michaël Llodra, auteur d'un match très propre juste avant lui. A l'image de Monfils, la France possède désormais un visage terriblement conquérant. L'Argentine n'a plus le droit à l'erreur.

David Nalbandian n'est du genre à être impressionné ni par les coups gagnants ni par les glissades, ni par les muscles. L'Argentin possède dans son oeil et sa raquette tout ce qu'il faut pour gagner un titre du Grand Chelem. Ce vendredi, il a dominé techniquement la rencontre pendant deux sets et demi. Cela n'a pas suffi. Pendant les quatre premiers jeux du match, Monfils a produit le meilleur tennis possible. Accélérations puissantes, prises de risque sans compromis... Et un double break qui a été déterminant (il a mené 4-1, ndlr) pour la suite de la partie.

Il y a plusieurs façons de gérer le stress en tennis. On peut se crisper et jouer petit bras, ou on peut tout lâcher. Monfils avait décidé de tout donner. Nalbandian a subi avant de reprendre le contrôle des points. C'était trop tard pour le premier set, mais cela lui a permis de prendre logiquement le second. La troisième manche a été très équilibrée. Monfils, revenu sur terre, a su canaliser son énergie au service. Cela a fait la différence. Quand Nalbandian déclinait physiquement, usé de devoir faire siffler son fouet au filet pour prendre de vitesse le tigre adverse, Monfils augmentait son pourcentage en premières balles. De moins de 50% à plus de 75% en fin de match. Maître Forget était passé par là (le capitaine lui a demandé de servir différemment, moins fort et à plat, au milieu du premier set, ndlr).

Breaké à 3-1, Nalbandian, pas assez percutant en première balle lui-même, le leader argentin n'a plus la main. Les coups de patte de Monfils en défense reviennent de plus en plus souvent. Les deux joueurs abrègent d'ailleurs les échanges et le rythme s'accélère. Le set est perdu pour Nalbandian. Et bientôt le match au terme d'un quatrième set de très haut niveau et après 39 fautes directes de sa part au total. Mené 0-3, Monfils grignote ce qu'il peut avant de mordre la balle à pleines dents. David va au filet, multiplie les enchaînements avec amorties. Monfils répond à tout. Mieux, il déchire les schémas de jeu de Nalbandian sur quelques points sensationnels. Gasquet avait vécu ce calvaire à l'US Open, Nalbandian pourra aussi témoigner : quand Monfils est déchaîné, il faut éviter de se présenter raquette au vent au filet.

Au huitième jeu, Nalbandian perd un point exceptionnel qui voit Monfils, plutôt fixé par son adversaire dans la diagonale revers, récupérer comme il peut une attaque long de ligne en coup droit avant d'aller contrer au terme d'un sprint "à la Bolt" (citation encore de Gasquet) une amortie parfaite. Nalbandian surpris, tombe de tout son poids par terre. Et c'est tout l'équipe d'Argentine qui vacille. Avec 27 aces et une telle couverture de terrain, Monfils peut exulter : il tient son match référence en Coupe Davis. La France et son leadership à plusieurs visages, doit maintenant mettre les "Pumas" Schwank (ou Nalbandian) et Zeballos en cage pour aller en finale.