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Indian Wells vintage : Edberg-Agassi, deux garçons dans le vent

Rémi Bourrières

Mis à jour 17/03/2020 à 19:20 GMT+1

Il n'y aura pas de tennis à Indian Wells cette année. Merci le coronavirus. Cela nous laisse un peu de temps pour nous replonger dans les grandes heures du tournoi. Chaque jour, retour sur une page marquante ou un match inoubliable restés dans l'histoire du Masters 1000 californien. Aujourd'hui, retour en 1990 et une finale en forme d'opposition de style entre Stefan Edberg et Andre Agassi.

Stefan Edberg vs Andre Agassi

Crédit: Eurosport

Stefan Edberg- Andre Agassi

Edition : 1990
Tour : Finale
Vainqueur : Stefan Edberg (Suède)
Adversaire : Andre Agassi (Etats-Unis)
Score : 6/4, 5/7, 7/6(1), 7/6(6)
Stefan Edberg vs Andre Agassi. Ce sera l'un des gros tubes de cette année 90 (quatre duels en tout) et particulièrement de ce mois de mars, puisque les deux hommes vont s'affronter en finale des deux gros rendez-vous de la tournée américaine qui meuble alors déjà la quasi-totalité de cette partie du calendrier.
Première manche le dimanche 11 mars, donc, devant les 10 500 personnes garnissant les tribunes du Grand Champions Resort d'Indian Wells, qui accueille l'événement à l'époque. L'affiche a beau être alléchante, elle est presque surprenante. Stefan Edberg, blessé aux abdominaux et contraint à l'abandon en finale de l'Open d'Australie un mois plus tôt, vient de faire un retour assez piteux à Memphis.
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Stefan Edberg à l'US Open

Crédit: Getty Images

De son côté, Andre Agassi, après s'être révélé avec fracas en 1988, a connu une saison 89 plus compliquée, lors de laquelle il a davantage brillé par ses pantys et son polo rose fluo que par ses résultats. S'il a entamé la saison 1990 d'un meilleur pied avec un titre dès sa reprise à San Francisco (il n'a jamais joué l'Open d'Australie avant 1995 !), il sort tout juste d'un abandon à Philadelphie face à un certain Pete Sampras. Lui aussi est donc arrivé sur le tournoi accompagné de quelques incertitudes. Mais les deux hommes se sont refait une santé dans le désert califonien, jusqu'à respectivement étriller sur le même score (6/4, 6/1), en demi-finales, Jim Courier et Boris Becker.

Agassi chahuté par "son" public

Sur le papier, un léger avantage est attribué au serveur-volleyeur suédois de 24 ans, pas loin du faîte de son art et à la carte de visite bien plus fournie. Agassi, lui, est encore un rookie qui dispute sa première finale en "Championship Series", ainsi qu'on appelle alors les Masters 1000 selon la nomenclature du nouvel ATP Tour, qui régit à compter de cette année-là le circuit mondial. Mais il a pour lui la fougue et l'insouciance de ses 19 ans, ainsi que l'avantage de jouer sur sa surface préférée, à domicile.
Enfin, à domicile, c'est vite dit. Celui qui est alors considéré comme l'enfant terrible du tennis américain est copieusement chahuté, parfois même hué, pour avoir décliné en cours de semaine un quart de finale de Coupe Davis à venir quelques semaines plus tard en raison d'un état de forme jugé encore "précaire." Gonflé, vu ce qu'il montre sur le terrain…
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Andre Agassi en 1989

Crédit: Getty Images

Pour en finir avec le contexte, rajoutons à cela un invité gênant et particulièrement turbulent : le vent, dont les deux hommes ont du mal à s'accommoder notamment durant les deux premiers sets. Ce qui ne les empêche pas de produire d'emblée un spectacle de qualité. Le style d'Edberg et Agassi, qui se sont affrontés pour la première fois quelques mois plus tôt au Masters – pour une victoire aisée du Scandinave – "matche" particulièrement bien.

Deux styles faits pour s'entendre

Le meilleur volleyeur de son époque contre le meilleur passeur, le meilleur manieur de balle contre le meilleur puncheur, cela donne une farandole de rallyes magnifiques faits d'inspirations, d'improvisations et de changements de direction incessants. Les éléments, mais surtout la qualité exceptionnelle de relance de l'Américain, obligent Edberg à suivre moins souvent que d'habitude son service au filet. En revanche, il n'hésite pas à y inviter régulièrement son adversaire, notamment par des slices courts qui ne sont pas sans évoquer une tactique federesque des temps modernes.
Bref, on se régale, notamment à partir du moment où le Kid de Las Vegas, ainsi qu'on commence à le surnommer, revient à un set partout après une première manche moyennement troussée. Les deux sets suivants seront d'un niveau nettement supérieur. Ils s'achèveront tous deux au jeu décisif mais ne nous y trompons pas : ils seront, comme les deux précédents, émaillés de breaks, une constante durant ce match. Les conséquences du vent, là encore…
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Stefan Edberg - Indian Wells 1987

Crédit: Getty Images

Si Edberg finit par s'adjuger la mise, il le doit à son sang-froid épatant dans les deux tie- breaks, notamment celui du troisième set, "l'un des plus beaux que j'ai jamais joués", comme il l'estimera. Mais sa domination sur l'ensemble de la partie n'est pas flagrante, loin de là. A vue de nez, on a même l'impression de l'inverse. Agassi, d'ailleurs, réussit deux coups gagnants de plus que son rival sur l'ensemble du match (58 contre 56). Mais il rate le coche à deux reprises : au début du troisième, lorsqu'il perd le fil en s'énervant après une décision arbitrale, jet de raquette en prime, alors que le "momentum" était de son côté. Puis au quatrième , pour le gain duquel il sert et s'approche même à deux points, à 5-4, 30-15. En vain.

Edberg en route pour la place de numéro 1

Tout se joue donc lors d'un tie break de la quatrième manche somptueux, incontestable point d'orgue du match. Par rapport à celui du troisième set, dont il avait été spectateur, Agassi rend cette fois coup pour coup à Edberg. Sauf que, comme par hasard, il commet deux erreurs grossières aux moments les plus chauds : à 3-3 (un passing de revers à bout portant dans le filet) et à 5-5 (une attaque de coup droit dans le couloir). Et c'est encore sur un lob de coup droit nettement dévissé qu'il finit par céder, 8 points à 6, après 3h25 de jeu.
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Andre Agassi - Roland-Garros 1990

Crédit: AFP

Fidèle à lui-même, Edberg n'en fait pas des caisses. "La course pour la place de n°1 mondial reste entre Lendl et Becker. Mais je pense ne pas être très loin derrière eux…" Effectivement. Le Big Three de l'époque se tirera la bourre tout au long de cette saison 90 (14 duels) lors de laquelle Stefan finira par devenir n°1 pour la première fois, en août, après avoir conquis Wimbledon. Il le restera jusqu'au bout.
Agassi, lui, battu cette saison-là lors de ses deux premières finales de Grand Chelem (Roland-Garros et US Open), devra patienter quelques années avant d'atteindre ce Graal. Encore loin de la lucidité qui le caractérise aujourd'hui, il expliquera après coup avoir été, en raison de son style, beaucoup plus "handicapé par le vent" que son adversaire. Explication dont il est permis de douter. Mais il va vite se recentrer pour obtenir deux semaines plus tard une revanche assez jubilatoire sur Edberg en finale de Miami. On devrait y revenir vite…
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