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Roland-Garros 2023 - Simple Dames - Demi-finale | Ode à Karolina Muchova

Bertrand Milliard

Mis à jour 08/06/2023 à 12:32 GMT+2

Karolina Muchova n'est pas le nom le plus ronflant du circuit WTA. Mais elle vaut le détour et son tennis plus encore. Un jeu presque porteur d'une certaine nostalgie, qui sort du lot dans le tennis actuel. Peut-elle rendre folle Aryna Sabalenka, que la Tchèque affronte jeudi en demi-finales ? Bertrand Milliard, qui adore Muchova, vous parle d'elle.

Karolina Muchova.

Crédit: Imago

US Open 2018, en cabine à New York avec Marion Bartoli. Tout en commentant mon match, je regarde d'un œil discret mais intéressé la rencontre du deuxième tour entre Garbiñe Muguruza – une de mes joueuses préférées – et la Tchèque Karolina Muchova, 22 ans, 202e mondiale et plus ou moins inconnue au bataillon. Cette dernière est sortie des qualifications avant de passer pour la première fois un tour dans un grand tableau de Grand Chelem.
Parfois, un simple nom suffit, si ce n'est à aimer un joueur ou une joueuse, au moins à s'y intéresser. Question de sonorité. Ça m'avait déjà fait ça il y a quelques décennies avec Carlos Moya. Et quand j'avais mis un visage, un look et un jeu sur le nom, mon intuition avait été confortée et l'Espagnol était devenu mon joueur préféré de cette génération.
Loufoque et subjectif ? Sans doute, mais c'est important, le plaisir de l'oreille. Par exemple, ça ne fonctionne pas avec Akgul Amanmuradova. Mais Muchova, prononcé à la française, c’est plaisant non ? Mu-cho-va. "Les mots qui font drôle dans la bouche, comme tintinnabule ou polochon", disait Robert Lamoureux dans son poème Le dernier de la classe. Muchova plaira aussi à l'amateur de Boris Vian, l'inventeur du pianocktail, du cormarin ou du personnage Vercoquin…
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Karolina Muchova

Crédit: Getty Images

Comme écrit plus haut, le nom attire, le jeu confirme. Et ce qui me frappe dès les premiers points qui se déroulent sur l'écran, c'est le côté vintage et sacrément varié du style proposé par la native d'Olomouc (assez Vian-esque aussi ce nom, non ?). Un service efficace et varié, beaucoup de slice en revers, une élégance technique, de nombreuses montées au filet, parfois même en enchaînant derrière le service, Muchova pratique un tennis paradoxal, à la fois d'un autre âge mais terriblement moderne par son aptitude à déstabiliser et dérégler les adversaires. Et ce soir-là elle réalise la plus grosse performance d'une carrière encore balbutiante en éliminant la douzième joueuse mondiale et double championne en Grand Chelem.
Épris de ce jeu rafraîchissant, me voici affublé d'une deuxième Tchèque comme chouchou aux côtés de Petra Kvitova, mais dans un tennis diamétralement opposé. Et les résultats suivent : quarts de finale à l’open d’Australie et Wimbledon en 2019, une première demi-finale en Grand Chelem à Melbourne en 2021 puis à nouveau un quart sur le gazon londonien. Malheureusement, le physique ne suit pas toujours et Muchova se retrouve régulièrement sur le flanc. Ce sont notamment six mois d’absence après l'US Open 2021 en raison d'une blessure abdominale puis la malchance à Roland-Garros l’an passé où elle se blesse à la cheville au cours de son 3ème tour face à Amanda Anisimova. Elle ne jouera qu'une grosse dizaine de tournois en 2022. 19e courant 2021, elle termine la saison dernière au 149e rang de la hiérarchie mondiale et se fait un peu oublier.

Antithèse de Sabalenka

De retour sur le devant de la scène avec des quarts à Dubai et Indian Wells puis un huitième à Rome, la Tchèque se retrouve donc pour la deuxième fois dans le dernier carré d’un Majeur sur une surface qui est loin d'être celle où elle se sent le mieux. Elle l'abordera plus fraîche physiquement que la précédente en ayant enchaîné quelques victoires en deux sets, un élément important. Et face à la puissance dévastatrice d’Aryna Sabalenka, elle devra plus que jamais utiliser ses armes toutes en délicatesse pour enrayer la furia biélorusse.
Rien de nouveau pour celle qui égalera au minimum le meilleur classement de sa carrière à l’issue de la quinzaine. "Ce style de jeu, il a toujours été en moi. Si vous regardez des vidéos de moi quand j’étais gamine, vous me verrez au filet ou en train de faire des amorties", affirme la tombeuse d'Anastasia Pavlyuchenkova, confortée dans son instinct par un joueur qui a maintenu son niveau d'inspiration : "Quand j'ai été un peu plus grande, j'ai beaucoup regardé Roger Federer, j'aimais son jeu agressif, ses montées au filet et son slice. Bien sûr, je m'en suis aussi inspirée."
Ajoutons à cela un caractère calme, qu'elle promène sur le court comme à la ville et qui l’aide parfois à se sortir de grosses empoignades comme ce 3e tour fou à l'US Open 2020 face à Cirstea, et l’on obtient la panoplie d’une joueuse qui n'a rien à perdre et tout pour plaire. "Je suis calme et ne montre pas grand-chose mais je suis très heureuse de la façon dont mon tournoi se déroule". De quoi parvenir à… calmer l'insatiable Sabalenka ? L’opposition de style a en tout cas de quoi faire saliver et on a hâte d’assister à ce Sabachova, ou Mucholenka, choisissez votre nom préféré.
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