Revers à deux mains, tatouage, Thierry Henry, 35 tentatives: voici Stanislas Wawrinka

On lui prête souvent des relations particulières avec Roger Federer, mais celui dont il est le plus proche, c'est Benoît Paire, même s'il . Les deux hommes ont tissé des liens d'amitiés très forts depuis deux ans. Ils se sont connus à Stockholm en 2011 par l'intermédiaire de Lionel Zimbler, actuel entraîneur du Français et connaissance de longue date du Suisse, mais c'est lors d'une tournée asiatique que les deux francophones sont devenus complices. "Sur le circuit, c’est une chance de trouver quelqu’un avec qui tu t’entends vraiment bien, déclarait-il fin 2012 sur le site de la FFT. Il n’y a pas tant de joueurs avec qui tu éprouves vraiment du plaisir à passer du temps. Nous on s’est bien entendus, on s’est bien marrés… Des amis, tu ne t’en fais pas, ou vraiment très peu, sur le Tour. On est vraiment à l’opposé. Lui, c’est le mec super talentueux, qui de la facilité et exprime beaucoup ses sentiments entre les points. Moi, je suis arrivé là où je suis principalement par le travail."

Avant cet US Open, Wawrinka était un habitué de la défaite, un joueur qui attend son heure sans broncher, en se faisant une raison d'avoir peu d'occasions de briller sur le circuit face aux meilleurs. Son peu de réussite l'a même poussé à prendre cela avec philosophie en se faisant tatouer sur le bras gauche la citation suivante : "Ever tried. Ever failed. No matter. Try again. Fail again. Fail better." Phrases tirées du roman "Worstward Ho" de Samuel Beckett. Comprendre : "Déjà essayé, déjà échoué, peu importe. Essaye encore, échoue encore, échoue mieux." Pourquoi une telle phrase ? Réponse de l’intéressé : "Quand on est habitué à perdre souvent parce qu’on ne s’appelle pas Nadal, Djokovic ou Federer, il faut se souvenir qu’il ne faut jamais rien lâcher". Wawrinka serait-il en train de conjurer le sort avec ce tatouage, réalisé en avril dernier ? Perdre, c'est peut-être une philosophie, mais ce n'est pas une fatalité.

Wawrinka ou l'éloge de la patience, bis. Voir un Suisse dans le dernier carré d'un tournoi du Grand Chelem, ce n'est pas nouveau. Mais voir Stanislas Wawrinka à la place de Roger Federer, là c'est une nouveauté. Avant l'US Open, le Vaudois n'avait disputé que trois quarts de finale en tournois majeurs : à l'US Open 2010, à l'Open d'Australie 2011 et à Roland-Garros 2013 pour neuf défaites en huitièmes de finale. A New York, il a donc brisé le mauvais sort en atteignant le dernier carré d'un tournoi du Grand chelem sur sa 35e tentative. Seul l'Australien Mark Woodforde avait dû attendre sa 38e participation pour jouer une demi-finale, à Melbourne. Troisième joueur helvète à jouer à ce stade de la compétition après Marc Rosset et Federer, Wawrinka se retrouve pour la première fois dans la peau du dernier Suisse en lice dans un majeur... Pas simple d'avoir été dans l'ombre de Federer jusqu'à 28 ans.

Le tennis, c'est une histoire de famille chez les Wawrinka. Le Vaudois est le deuxième d'une fratrie de quatre enfants, tous mordus de tennis. L'aîné, Jonathan, est même devenu professeur de tennis. Mais auparavant, il s'était essayé sur le circuit professionnel jusqu'à l'âge de 19 ans, après être parti à 15 ans en formation à Barcelone. Vite rattrapé par son frère Stan au talent plus prometteur que le sien, il s'est résigné à quitter la compétition pour choisir finalement l'enseignement au Tennis-Club Stade Lausanne.

Stanislas Wawrinka est aussi un fan de hockey sur glace et ne manque jamais l'occasion de le faire découvrir. Il aime à tel point ce sport que depuis juillet 2011, le Vaudois est entré au conseil d'administration du club de Lausanne. Remonté en Ligue Nationale A cette saison, le LHC, où évolue notamment le gardien français Cristobal Huet, a été champion de Suisse de Ligue Nationale B en 2013. "J'ai toujours été un supporter du LHC. J’espère lui faire profiter de mon expérience de haut niveau. Mais ce qui me motive surtout, c’est d’accompagner le mouvement juniors dans son développement, car je connais les sacrifices qu’un jeune sportif doit consentir pour arriver au sommet."

Wawrinka n'a jamais pratiqué le football, et ne s'y passionnait pas plus que cela. En grandissant, Stanislas s'y est un peu plus intéressé, mais ne cherchez pas en lui un supporter d'un club en particulier, mais plus un compatriote qui vibre surtout pour les compétitions internationales. S'il porte naturellement dans son cœur la "Nati", l'équipe nationale suisse, il a également un faible pour l'équipe de France depuis sa victoire en Coupe du monde 1998. Et notamment pour Thierry Henry qui est, selon lui, son joueur de foot préféré. Il remerciera Roger Federer de lui avoir présenté en marge d'une promotion pour leur ancien sponsor commun...

S'il y avait un coup caractéristique dans la panoplie de Stanislas Wawrinka, c'est son revers à une main. A l'instar de Richard Gasquet, le Suisse est l'un des rares joueurs du circuit à pratiquer ce coup particulièrement ardu et le réussir à la perfection. Pourtant, l'Helvète n'a pas toujours adepte de ce coup très technique. Après sa victoire sur Andy Murray, dans un quart de finale marqué par de nombreux coups gagnants en revers long de ligne, Wawrinka n'en était pas peu fier. "C'est vrai que c'est l'un de mes meilleurs coups, a-t-il reconnu sans trop de difficultés en conférence de presse. Quelque fois, ce n'est pas facile, particulièrement en retour de service. Et notamment quand vous jouez face à Nadal sur terre battue... En fait, jusqu'à mes onze ans, je jouais ce coup à deux mains, mais il n'était pas assez bon, alors j'ai changé."

Stanislas Wawrinka a fêté son retour dans le Top 10 mondial au mois de mai 2013, après avoir signé une victoire au Portugal (Oeiras) et surtout une finale en Masters 1000 de Madrid, perdue face à Rafael Nadal. Un retour, car le Suisse avait déjà fait son apparition en mai 2008 parmi les dix meilleurs joueurs du moment. Il avait gagné 14 places après avoir joué sa première finale en Masters Series à Rome, perdue celle-ci face à Novak Djokovic. Cela avait duré jusqu'en octobre. Il a donc ensuite dû attendre quatre ans et demi avant de refaire son apparition dans le Top 10. Si son meilleur classement a été une neuvième place mondiale, le Suisse n'est jamais descendu en deçà de la 29e. Cette constance, Magnus Norman, son nouveau coach depuis le printemps dernier, a su la faire fructifier. Cette collaboration lui a permis de franchir un nouveau palier. A 28 ans, le voici tout près de dépasser Roger Federer au classement ATP pour la première fois de sa carrière.