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Pouille : "Après la balle de match, je me suis juste dit 'Ça y est, tu l'as fait'"

Alexandre Coiquil

Mis à jour 06/09/2016 à 14:37 GMT+2

US OPEN 2016 - Vainqueur de Rafael Nadal en cinq manches, dimanche en huitième de finale, au terme d'une rencontre d'une qualité exceptionnelle, Lucas Pouille a présenté sa victoire comme "la plus belle" de sa carrière. Un véritable acte de naissance au plus haut niveau.

Lucas Pouille serre la main de Rafael Nadal après sa victoire en cinq manches en huitième de finale de l'US Open 2016

Crédit: AFP

Lucas Pouille tient son acte de naissance. Vainqueur de Rafael Nadal en huitième de finale de l'US Open (6-1, 2-6, 6-4, 3-6, 7-6(6)), au terme d'une rencontre absolument époustouflante, le Nordiste a accompli le plus grand exploit de sa jeune carrière.
"Je ressens beaucoup de joie, beaucoup d'émotions, c'était un match très long, avec beaucoup de rebondissements. C'est ma plus belle victoire, c'est certain, a reconnu le joueur de Grande-Synthe après sa qualification. Après la balle de match, je me suis juste dit "Ça y est, tu l'as fait", c'était long, j'étais fatigué, mais il y avait déjà beaucoup de fierté. Je réalise maintenant que je viens de battre Rafa : quand j'étais gamin, je regardais ses matches, notamment ici. Je l'admire encore beaucoup, pour son état d'esprit, c'est quelqu'un de formidable, le battre dans un tournoi qu'il a gagné deux fois, c'est juste magnifique."
Depuis Roland-Garros 2013 et Bercy 2014, où le grand public l'avait découvert et redécouvert à plusieurs mois d'intervalle, le 24e joueur à l'ATP en a fait du chemin. Il a bossé, stagné, douté, avant de gagner le respect de tous dimanche soir dans ce qui restera comme l'un des plus grands exploits du tennis moderne français.
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Et sur son 59e coup gagnant, Pouille a terrassé Nadal : la balle de match en vidéo

Pouille : Avant l'US Open, Nadal m'avait découpé à l'entraînement
Pouille a battu l'un des plus grands joueurs de l'histoire du jeu et avec la manière. Huit ans après Jo-Wilfried Tsonga, qui avait découpé le Majorquin en demi-finale de l'Open d'Australie 2008, il est devenu le deuxième joueur Français à battre Nadal en majeur. Avant lui, aucun Tricolore n'avait battu le nonuple vainqueur de Roland-Garros au meilleur des cinq manches. C'est une montagne qui est tombée à ses pieds.
Nadal justement. L'Espagnol, le modèle, titré à Flushing en 2010 et 2013, a constitué le déclic de Pouille lors de son passage à New York. Le Français avait subi une déroute lors d'un match d'entraînement d'avant-tournoi il y a une dizaine de jours. Une déroute qui l'avait suivi lors de ses premiers tours dans le tableau principal où il était passé à deux points de la sortie au 2e tour contre le Suisse Marco Chiudinelli. "Je frappais pourtant bien la balle, mais il m'avait "découpé" 6-1, 6-2 ou 6-3. Après ce match d'entraînement, j'étais un peu tendu, j'avais eu un discours un peu négatif et mon entraîneur (Emmanuel Planque) m'était "rentré" un peu dedans, je lui ai fait la gueule pendant quelques heures. Après cet entraînement, j'avais d'ailleurs fait de Nadal mon favori pour le titre et maintenant je le bats, c'est incroyable."
Tout le travail accompli depuis trois ans et spécifiquement en fin d'année dernière, a enfin porté ses fruits. A 22 ans, Pouille pèse déjà deux quarts de finale en Grand Chelem à Wimbledon et l'US Open, une demi-finale en Masters 1000 à Rome et une finale en ATP 250 à Bucarest, sa première sur le circuit principal, perdue contre Fernando Verdasco au mois d'avril dernier. Derrière le bond de géant du Tricolore, il y a eu le travail de fond d'Emmanuel Planque, l'ancien coach de Michael Llodra et Fabrice Santoro, avec qui il collabore depuis 2012 et son passage par le Centre National d'Entraînement de la Fédération Française de Tennis. Le technicien a trouvé les mots et la méthode pour faire de Pouille un joueur complet. Service, coup droit, revers, volée, déplacement, couverture, le Français sait tout faire.
"Je suis ému, parce que c'est le dépassement ultime, l'effort suprême contre un adversaire qu'on respecte infiniment. Il est allé chercher cette victoire, je ne sais pas où il est allé chercher cette énergie et cette capacité à rebondir, à se dépasser, à dépasser la peur, la fatigue, a expliqué à chaud son coach. Quand on commence à travailler avec un joueur, c'est pour vivre ces moments-là. C'est pour jouer contre les grands joueurs sur les grands courts, sur les grands tournois. C'était un combat absolument énorme. Quand bien même il aurait perdu, ça n'aurait pas été un énorme drame parce que des matches, on en gagne, on en perd."
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Lucas Pouille lors de son succès face à Rafael Nadal à l'US Open 2016

Crédit: AFP

Nadal : Il a le potentiel pour être dans le Top 10, il peut viser haut
Secoué par Planque, qui l'a cadré, dirigé vers un programme uniquement axé sur le travail, et l'a sorti d'un Paris trop gris en fin d'année dernière pour rejoindre Dubaï, puis reconstruit physiquement par Pascal Valentini, son préparateur physique à plein temps, Pouille est devenu au fil des mois un athlète complet. Face à Nadal, qui a débarqué à New York avec de très bonnes sensations physiques et tennistiques, il a eu la capacité première de tenir bon physiquement dans un match marathon. Résister au Majorquin pendant 4h05, ce n'était pas à la portée de tout le monde, surtout après deux combats en cinq manches au 2e et 3e tour. Pouille, lui, l'a fait. Et ce n'est pas le fruit du hasard.
"La logique voudrait qu'il lâche un peu au 5e set, parce que c'est son 15e set en 5 jours, donc forcément il va être fatigué, et il va le chercher avec les tripes. C'est un match qui va compter pour lui, dont il se souviendra toute sa vie", a analysé Yannick Noah, le sélectionneur de l'équipe de France de Coupe Davis, après la rencontre. Eric Winogradsky, le responsable du haut-niveau masculin au sein de la Fédération française de tennis, est allé dans le sens du vainqueur de Roland-Garros 1983. "Physiquement, il a mis tout le monde d'accord. Il y avait d'autres aspects à gérer, le central, Nadal et le tie-break du 5e set. Même à 6 partout quand Nadal revient, celui qui craque, ce n'est pas Lucas. C'est fort, et je suis content pour lui parce qu'il travaille vraiment dur. Il me bluffe. Il a déjà démontré depuis quelques mois qu'il avait le niveau."
Même Nadal, qui va terminer l'année 2016 sans avoir atteint les quarts de finale en Grand Chelem, a tenu des propos élogieux envers son bourreau du jour. Selon l'Ibère, Pouille a les capacités pour aller haut, très haut mais à condition de ne pas sauter les étapes. "Lucas est jeune, mais il a déjà tous les coups du tennis dans son répertoire, il a le potentiel pour être dans le Top 10, il peut viser haut s'il arrive à continuer à progresser. Il est dans une bonne position, mais tout le monde vise les titres, il n'y a pas que lui. L'enjeu maintenant pour lui est de continuer à progresser."
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Pouille - Nadal à l'US Open 2016

Crédit: AFP

Pouille veut un "Français en finale"

Progresser mais surtout confirmer. La suite elle va se passer avec une vieille connaissance : Gaël Monfils, qu'il va affronter en quart de finale. Les deux hommes ont déjà eu un premier passif en majeur lors du premier tour de l'Open d'Australie 2015 où Pouille avait mené deux manches à rien, avant de subir le retour en grande pompe du Parisien.
"C'est top de se retrouver à trois, il faut essayer qu'il y en ait un en finale, j'espère que cela sera moi... On joue tous les trois très bien, j'aurais préféré affronter un étranger (plutôt que Monfils en quarts), je vais essayer de me qualifier pour ma première demie. C'est toujours spécial de jouer contre un Français, encore plus en Grand Chelem. Gaël est incroyable quand il est dans son état d'esprit actuel, il frappe fort, il sert bien. Je ne m'attends pas à un match facile, mais je suis en bonne forme, cela va être un grand match."
Pour Noah, qui avait commencé à le conseiller pendant Roland-Garros 2015, marquant ainsi les prémices d'un retour à plein temps dans le tennis, ce premier très grand succès en appelle d'autres. Même s'il a volontiers reconnu que Pouille l'avait surpris dimanche soir. "On peut parler de plein de choses, on peut rêver de plein de choses. Mais il reste à aller le faire sur le central de Flushing contre Nadal. Et ça ce n'est pas pareil. Oui il y a eu de la parlote, je l'ai encouragé, il y a eu la Coupe Davis. Mais le quotidien, c'est Manu. Je pense qu'il a peut-être rêvé de ce moment-là. Jusqu'au moment où ça arrive : tu mènes 6-3 dans le tie-break au 5e set et puis l'autre revient à six partout. Et là c'est chaud. Là il a été bon. Il a joué comme un mec. (…) Tu ne peux pas anticiper un match pareil. C'est très beau. C'est impressionnant. C'est une belle progression. C'est notre joueur d'avenir."
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Noah : "J'ai eu de la chance de vivre ça comme spectateur"

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