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2018, année noire pour les Français, et ce n'est (peut-être) pas fini

Laurent Vergne

Mis à jour 23/08/2018 à 13:25 GMT+2

US OPEN 2018 – Après les trois premiers tournois du Grand Chelem de la saison, les joueurs français n'ont toujours pas vu les quarts de finale. Si pareille contre-performance venait à se répéter à Flushing, ce serait tout simplement la pire année pour ces messieurs au XXIe siècle. Mais ce n'est pas à proprement parler une surprise. Et il faudra peut-être s'y habituer...

Lucas Pouille / Wimbledon 2018

Crédit: Getty Images

Et si 2018 était la pire année du tennis masculin français en Grand Chelem ? Cela en prend la direction, en tout cas. A l'Open d'Australie et à Roland-Garros, il n'y avait aucun Tricolore en deuxième semaine. Wimbledon a marqué une légère éclaircie puisque trois Français étaient présents en huitièmes de finale : Monfils, Simon et Mannarino. Mais aucun n'a réussi à franchir le cap.
Résultat, aucun quart de finale au compteur sur les trois premiers Majeurs de l'année. C'est une première depuis 2000 mais, cette année-là, l'US Open avait sauvé les meubles avec le quart de finale d'Arnaud Clément à New York. Pour trouver trace d'une campagne entière sans Français en quarts de finale en Grand Chelem, il faut remonter à 1980. Le tennis masculin tricolore sortait alors d'une période de vaches maigres : aucun quart en Majeur de 1975 à 1980, sans discontinuer. Ensuite, Yannick Noah était arrivé, puis Henri Leconte, et ainsi de suite...
Plusieurs facteurs expliquent ces difficultés. Et malheureusement, elles pourraient de ne pas être que passagères.

Le déclin et l'absence de Tsonga

Opéré du ménisque gauche au printemps, Jo-Wilfried Tsonga n'a plus joué depuis la fin du mois de février. Son année quasi blanche est un handicap pour le tennis français car, depuis une décennie, le Manceau est, de loin, le meilleur Tricolore en Grand Chelem. De 2008 à 2017, il n'y a qu'une seule année où il n'a pas disputé au minimum un quart de finale dans les Majeurs. C'était en 2014. Cette année-là, il avait calé quatre fois en huitièmes, contre Federer, Djokovic (deux fois) et Murray. Pas exactement un naufrage non plus.
Toutefois, au-delà de son absence, Tsonga avait amorcé un net déclin dans ses résultats en Grand Chelem au cours des mois ayant précédé sa blessure. Après son quart de finale à l'Open d'Australie en janvier 2017 (le 15e de sa carrière en Grand Chelem), il avait échoué à atteindre le cap des huitièmes à Roland-Garros (1er tour), Wimbledon (3e tour), US Open (2e tour) et à Melbourne en janvier dernier (3e tour). Quatre Majeurs consécutifs sans figurer en deuxième semaine, cela ne lui était tout simplement jamais arrivé.
Si, au fil des saisons, Tsonga, Monfils, Gasquet Simon ont brillé à tour de rôle sur le circuit, en Grand Chelem, il y avait clairement Tsonga et les autres. Pour preuve, il totalise à lui seul autant de quarts de finale en Grand Chelem (15) que ses trois compères réunis. Et sur ses 25 derniers Majeurs, Tsonga était à 17 reprises le Français ayant survécu le plus longtemps dans le tableau. Sa baisse de régime spectaculaire, suivie de sa blessure au genou, a donc entraîné un affaissement du bilan tricolore de façon presque mécanique.

Un leader qui patauge

Tsonga, Gasquet, Monfils et Simon ont leur carrière derrière eux. Le plus "jeune" d'entre eux, Monfils, aura 32 ans le 1er septembre. Paire, Mannarino, Chardy flirtent ou ont dépassé le cap de la trentaine. L'avenir du tennis français, à court voire moyen terme, repose donc sur les seules épaules de Lucas Pouille. Au début de l'année, le Nordiste était 14e mondial, juste devant Tsonga. JWT ayant disparu de la circulation, il aurait fallu que Pouille reprenne le flambeau. Mais sa saison est globalement décevante (il est 26e à la Race) et c'est tout particulièrement vrai en Grand Chelem.
Sorti dès le 1er tour à Melbourne (une mauvaise habitude chez lui), il n'a pas davantage convaincu à Roland-Garros, en étant sèchement battu par Karen Khachanov en 16es de finale ou à Wimbledon, où il a buté dès le 2e tour contre Dennis Novak. En réalité, depuis ses deux quarts de finale de l'été 2016 à Wimbledon et à l'US Open qui avaient marqué son émergence au très haut niveau, Lucas Pouille n'a atteint qu'une fois la seconde semaine, pour un huitième de finale à Flushing en 2017, où il n'a pas su tirer profit d'un tableau ultra-ouvert pour aller plus loin.
La crise de croissance commence à s'éterniser pour le protégé d'Emmanuel Planque et si c'est un souci en premier lieu pour lui, cela accentue le déficit du tennis masculin français dans cette tranche d'âge. Ses ainés se rapprochent de la sortie, ses cadets paraissent encore loin du compte derrière. C'est l'autre nœud du problème...
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Lucas Pouille

Crédit: Getty Images

La relève n'est pas là

Depuis une grosse année, le circuit masculin est enfin gagné par un bain de jouvence qui a longtemps tardé à venir. Mais il suffit de regarder le classement ATP à la veille de cet US Open pour voir à quel point le rajeunissement s'est amorcé. Pas encore au sommet de la hiérarchie bien sûr, où Nadal, Federer et Djokovic ont remporté les sept dernières levées du Grand Chelem à eux trois. Mais dans le sillage d'Alexande Zverev (21 ans, 4e mondial), on retrouve Stefanos Tsitsipas (20 ans depuis quelques jours, 15e), Hyeon Chung (22 ans, 23e), Karen Khachanov (22 ans, 26e) ou Denis Shapovalov (19 ans, 28e). Tous semblent promis à un rôle majeur dans les années, voire les mois à venir.
Un peu plus loin, Andrey Rublev (20 ans, 37e), Frances Tiafoe (20 ans, 42e) et Alex De Minaur (19 ans, 43e) commencent à pousser aussi. Un joueur de 21 ans dans le Top 5, un de tout juste 20 ans dans le Top 15 et deux "teenagers" (moins de 20 ans) dans le Top 50, c'était inimaginable il y a encore trois ans. Et les Français, pendant ce temps ? Rien, ou presque. A 24 ans, Lucas Pouille est le plus jeune Tricolore du Top 100, ce qui n'augure rien de bon pour l'avenir proche. C'est très révélateur.
Le risque d'une génération totalement creuse n'est pas à exclure et si jamais Pouille ne parvient pas à s'ancrer durablement parmi les meilleurs, une cure d'austérité comme l'ont connue les Suédois n'est pas impossible. La génération Tsonga-Monfils-Gasquet-Simon laisserait alors un énorme vide derrière elle. Or même avec ses limites (pas de titre, une seule finale en Grand Chelem), elle a permis au tennis français de figurer en bonne place dans les principaux tournois pendant plus de dix ans. Beaucoup l'ont critiquée, beaucoup pourraient la regretter. On sait ce qu'on perd, jamais ce qu'on récupère...
Alors, qui pour prendre la relève ? Quentin Halys, qui a flirté avec le Top 100 à 20 ans, ne parvient pas à franchir le cap. A bientôt 22 ans, il est même en train de glisser peu à peu dans le classement. Né en avril 1999, Corentin Moutet est le seul Français de moins de 20 ans parmi les 250 premiers mondiaux. Chez les U20, seuls Shapovalov et De Minaur sont mieux classés que lui. Mais ils sont beaucoup mieux classés que lui. Moutet a grimpé jusqu'au 109e rang, mais sa position à la Race (174e) peut faire craindre un tassement d'ici la fin de saison. Bref, il est difficile d'être optimiste à brève échéance.
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