US Open 2023 | Héritier de "Fedrinka", Sharapova, chocolat… Cinq choses à savoir sur Dominic Stricker

Arriver après Roger Federer et Stan Wawrinka dans le tennis suisse est un lourd héritage à assumer. Mais si Dominic Stricker admire ses aînés, il ne veut pas les copier. "Je pense qu'il y a beaucoup de choses dans mon jeu que d'autres joueurs ont. Mais je ne dirais pas que j'essaie d'en imiter un en particulier", a-t-il assumé honnêtement en conférence de presse après son exploit contre Stefanos Tsitsipas.

Ses grands atouts (service, coup droit, volée) peuvent certes rappeler ceux du Bâlois et son haut du corps massif celui du Vaudois, mais Stricker a déjà un jeu bien à lui. Contrairement à ses compatriotes, il est gaucher et avec un revers à deux mains, qui plus est. Il s'attache à se montrer le plus offensif possible : avec 78 coups gagnants et 42 points inscrits sur 52 montées au filet lors de son 2e tour, il a annoncé la couleur. Benjamin Bonzi devra aiguiser ses passings.

Le talent de Stricker a rapidement sauté aux yeux. Chez les juniors, il s'est brillamment distingué lors de la saison 2020 en réalisant un sacré doublé à Roland-Garros. Il a ainsi été sacré en simple face à son compatriote Leandro Riedi et en double aux côtés de l'Italien Flavio Cobolli, une performance qui n'avait plus été réalisée depuis 1998 par le Chilien Fernando Gonzalez à l'époque. Dans la foulée, il a atteint la 3e place mondiale chez les juniors.

Ses débuts professionnels ont été tout aussi remarquables avec un premier titre en Challenger à Lugano à son deuxième essai sur le circuit secondaire en 2021. La même année, il a atteint les quarts de finale de ses deux premiers tournois ATP à Genève (terre battue) puis Stuttgart (gazon) où il était invité. Mais il n'a pas vraiment surfé sur sa dynamique, avant de se signaler à nouveau en atteignant les demi-finales du dernier Masters Next-Gen, alors battu par le Tchèque Jiri Lehecka.

La saison en cours a été celle d'une prise de conscience pour Stricker. Celle de la nécessité d'être plus professionnel dans l'approche de son métier pour franchir un cap dans sa jeune carrière. Pour ce faire, il a engagé comme coach en avril Dieter Kindlmann, ex-130e joueur mondial qui s'est surtout distingué en entraînant sur le circuit féminin des championnes du standing de Maria Sharapova, Madison Keys et Aryna Sabalenka.

Ce dernier s'est d'ailleurs confié sur le site de l'ATP sur son projet avec le Suisse. "J'ai travaillé avec de grandes joueuses avant, et je vois en lui un grand talent. Mais je vois aussi tant de choses sur lesquelles nous devons travailler. Il ne s'agit pas seulement de ce qui se passe sur le court, mais aussi en dur, ce que ça veut dire d'être professionnel, d'être un joueur du Top 100, 80 ou 50. Petit à petit, il doit apprendre ce que ça veut dire de travailler en salle, avec le kiné, faire de la prévention contre les blessures, entrer davantage dans les détails, travailler dans une structure, planifier une saison."

Les esprits farceurs l'auront bien noté, Dominic Stricker est ce que l'on appelle avec affection un "beau bébé". Le Suisse ne manque pas de joues et ne cache pas qu'il aime bien manger. Mais de ce côté-là aussi, il y a eu une reprise en main récemment. "Je ne pense pas qu'il y ait eu un déclic ou un tournant, mais j'ai juste réalisé que ça allait peut-être m'aider pour des longs matches comme celui d'aujourd'hui (mercredi, NDLR). J'ai changé mon alimentation avec un peu moins de sucre, moins de chocolat et tous ces trucs", a-t-il encore avoué devant la presse.

Et de ce côté-là, le rôle joué par Dieter Kindlmann a été aussi fondamental. Ce nouveau régime a d'ailleurs d'ores et déjà porté ses fruits, vu la forme physique affichée de bout en bout contre Tsitsipas dans des conditions de chaleur humide toujours délicates à gérer à New York. "Mon équipe le fait aussi, donc c'est super pour moi d'avoir leur soutien là-dessus. C'est super de voir que mon corps est capable de jouer quatre heures à ce haut niveau", a-t-il ajouté.

Dominic Stricker dispute seulement son troisième grand tableau en Majeur et le troisième en… 2023. Repêché puis éliminé au 1er tour à Roland-Garros par Tommy Paul, il a franchi un palier à Wimbledon où il s'est incliné au 2e tour contre Frances Tiafoe après avoir battu Alexei Popyrin (déjà au bout des cinq sets). A New York, il ira donc encore plus loin quoi qu'il arrive, et ce alors qu'il aurait pu s'arrêter bien plus tôt.

En qualifications, il a ainsi écarté une balle de match à 8-9 dans le tie-break décisif contre Pablo Llamas Ruiz avant d'être interrompu par la pluie. Mais il a relevé le défi mental en s'imposant in extremis 13 points à 11 à son retour sur le court. Grâce à son parcours à Flushing, le Suisse, 128e mondial cette semaine, est remonté virtuellement à la 102e place au classement ATP. Ce 3e tour contre Benjamin Bonzi représente un double enjeu pour lui : découvrir la seconde semaine d'un Grand Chelem et faire son entrée dans le Top 100. Aura-t-il récupéré de son exploit et comment gérera-t-il cette belle opportunité ? Telles sont les questions.