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US Open 2023 | Les mamans-joueuses, un mouvement de fond bien plus qu'une mode

Maxime Battistella

Mis à jour 03/09/2023 à 12:22 GMT+2

Ces dernières années, des joueuses de plus en plus nombreuses ont repris le cours de leur carrière après une maternité. Ce qui était impensable il y a quelques décennies se transforme en tendance de fond particulièrement prégnante dans cet US Open. Une évolution aussi rafraîchissante que liée à la disparition progressive de préjugés et de freins financiers.

Caroline Wozniacki

Crédit: Getty Images

Elles n'en finissent plus d'étonner. Après les épopées d'Elina Svitolina à Roland-Garros (quart de finale) et à Wimbledon (demi-finale) quelques mois seulement après avoir donné naissance à sa fille, le retour bluffant de Caroline Wozniacki après plus de trois ans de pause et deux enfants fait beaucoup parler à New York. Trois mamans-joueuses étaient même au rendez-vous du 3e tour de cet US Open : outre l'Ukrainienne et la Danoise (même d'ores et déjà qualifiée pour les 8es), l'Américaine Taylor Townsend y avait gagné sa place avant de céder face à Karolina Muchova.
Aussi exceptionnelles soient-elles, ces performances résultent d'un phénomène qui prend de l'ampleur : de plus en plus de joueuses parviennent désormais à reprendre le cours de leur carrière en étant mères. A New York, elles étaient pas moins de dix sur la ligne de départ parmi les 128 engagées du grand tableau du simple dames : Victoria Azarenka, Yanina Wickmayer, Tatjana Maria, Vera Zvonareva, Barbora Strycova, Patricia Maria Tig et Margarita Betova (anciennement Gasparyan) complétaient la liste.

Clijsters 2009, un exploit et la fin d'un cliché

Un vrai petit contingent et une évolution marquante par rapport aux décennies précédentes. Aux considérations morales prégnantes par le passé sur la place de la femme dans le foyer s'ajoutaient alors d'autres obstacles à surmonter. "La limite qu'il y avait à mon époque, c'était plus de savoir comment, en tant que maman-joueuse, on peut s'occuper d'un enfant, témoigne notre consultante Camille Pin. La vie de tenniswoman est extrêmement tournée vers soi-même et quand on voit le temps qu'on consacre aux enfants en bas âge, c'était ça le problème. Comment on gère tout ça en termes d'organisation ? Il y avait Sybille Bammer et Rossana de los Rios qui étaient les pionnières dans les années 2000. C'était des martiennes à l'époque."
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Et puis, des stars ont aussi cassé cette barrière, ancrant un peu plus dans les esprits la compatibilité entre la maternité et la carrière de joueuse professionnelle. Il y a bien sûr eu Serena Williams en 2017-2018, mais beaucoup plus tôt, l'exemple de Kim Clijsters a créé un sacré précédent. La Belge avait pris une première retraite en 2007, avant de revenir en fanfare deux ans plus tard, s'adjugeant l'US Open dans la foulée. Un exploit encensé par certains, mais minoré par d'autres qui considéraient ce titre comme une preuve de la faiblesse du niveau général du circuit féminin.
Elles cumulent cette sérénité et ce recul de la maternité à une maîtrise de leur tennis
Le cliché a néanmoins vécu. "Le corps change indéniablement après une grossesse, mais quand on a un corps d'athlète de haut niveau, on ne le perd pas, surtout si on reprend vite une activité physique intense. Ces mamans jouent quasiment aussi bien voire mieux qu'avant avec un bel état d'esprit. Elles se prennent moins la tête parce qu'elles ont créé des petites choses qui sont bien plus importantes qu'une carrière de tennis. Et je pense que ça leur donne une force énorme. Avec l'âge en plus, elles cumulent cette espèce de sérénité et ce recul liés au fait d'être mère à une maîtrise de leur tennis et de ce qu'elles savent faire qu'elles n'avaient peut-être pas plus jeunes. Je pense qu'elles gèrent beaucoup mieux leurs émotions. Le peu qu'elles perdent éventuellement sur le plan athlétique, elles le compensent largement sur le plan mental", estime Camille Pin.
Caroline Wozniacki ne disait pas autre chose juste avant cet US Open. "Je pense que ce qui est le plus difficile, c'est toute la logistique à organiser. (…) En même temps, ça m'apporte tant de joie d'avoir toute la famille avec moi ici. Etre capable de se concentrer à 100 % sur mon tennis quand il le faut, mais aussi de rentrer à la maison l'après-midi ou après le match et même les voir rapidement le matin si mon match est dans l'après-midi. Juste le fait de les voir un petit peu, ça m'apporte tant de sérénité dans ma vie quotidienne. Et je pense qu'à mesure que je joue de plus en plus, c'est ce qui peut faire une grosse différence pour moi."
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La théorie se tient d'autant plus que bien des mamans-joueuses connaissent un déclic après leur grossesse. Que dire par exemple de l'Allemande Tatjana Maria, pour la première fois demi-finaliste en Majeur à 34 printemps à Wimbledon en 2022, après avoir eu deux filles ? Reste que pour se lancer dans cette aventure, il faut en avoir les moyens. Il sera toujours plus difficile pour une joueuse mal classée de reprendre le fil de sa carrière quand une maternité l'a éloignée des courts. Mais sur ce point aussi, les progrès sont marquants.

De plus en plus de moyens pour se lancer dans l'aventure

"La chance du tennis féminin, c'est que c'est un des sports où les femmes peuvent le mieux gagner leur vie. Parfois, ça peut sembler anodin, mais grâce à ça, vous pouvez payer plusieurs chambres d'hôtel et 3-4 billets d'avion pour New York : ce sont des coûts importants. Avant, on ne pouvait pas se permettre d'engager une nounou ou d'avoir un membre de sa famille à ses côtés. C'est une super évolution que le côté financier soit moins un frein. Les Américains, avec Billie Jean King en leader, sont beaucoup sur ce côté vraiment paritaire. Ils ont été précurseurs et on leur doit beaucoup parce qu'ils ont ce côté militant", note enfin Camille Pin.
Alors que l'US Open a justement fêté cette année les 50 ans de la mise en place d'un "prize money" égal entre ces dames et ces messieurs, la tendance des mamans-joueuses est un joli clin d'œil et ne fait que prendre de l'ampleur. D'ailleus, une autre star, et non des moindres, devrait bientôt s'ajouter à la liste : Naomi Osaka, jeune mère d'une petite fille, a prévu de tenter sa chance à nouveau sur le circuit en 2024.
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